Violette Lovecat : “Je souhaite mettre en valeur l’ésotérisme et le féminin”
C’est au salon de tatouage L’Encrerie, dans le 11e arrondissement de Paris, que la magie opère. Illustratrice et tatoueuse, Violette Lovecat est aujourd’hui reconnue pour son style unique et sa technique minutieuse. Elle nous partage ici son parcours et ses inspirations.
Comment as-tu commencé à dessiner ? Quand t’es-tu orientée vers le tatouage et pourquoi ?
J’ai commencé à dessiner quand j’étais enfant. Avec mon père, on lisait beaucoup de bandes dessinées de différents dessinateurs, allant de Régis Loisel à Enki Bilal par exemple. Il m’a aussi fait découvrir de fascinants illustrateurs comme Frazetta et Mœbius. Il m’a appris les bases, à dessiner les proportions du corps, les perspectives, en même temps qu’il m’a appris le vélo. C’est comme ça que j’ai commencé à prendre goût au dessin et depuis, je n’ai jamais arrêté. Je me suis orientée vers le tatouage il y a une dizaine d’années, aux alentours de la vingtaine, car j’ai un ami qui apprenait le tatouage à ce moment-là. Il m’y a initiée en me mettant une machine dans les mains alors que j’étais en train de finir mes études en communication visuelle. Ce domaine m’a tout de suite attirée. J’ai toujours aimé dessiner sur la peau, j’aimais orner le corps de mes amis au feutre, discrètement, pendant certains cours. Ça m’a tout de suite parlé !
On retrouve beaucoup d’influences asiatiques dans tes réalisations, en particulier japonaises, qu’est-ce qui t’inspire dans cette culture ?
Effectivement, on retrouve beaucoup d’influences japonaises dans mon travail. Je trouve que c’est une culture très inspirante, très belle. Le contraste qu’on peut voir à tous les niveaux me fascine, que ce soit dans leur manière d’être, dans leur nourriture, dans leur quotidien, ou tout simplement dans leur art… Tout n’est que contraste et je trouve ça magnifique. J’essaie de retrouver ça dans mes créations : le côté à la fois brut et doux, sombre et lumineux, prosaïque et poétique.
Tu as un style très identifiable, comment l’as-tu trouvé et comment le définirais-tu aujourd’hui ?
Je suis déjà très contente d’entendre que j’ai un style reconnaissable, c’est extrêmement valorisant. L’idée qu’on puisse reconnaître un dessin que je fais me touche beaucoup ! Je qualifierais ce style géométrique de “dotwork blackwork”, c’est-à-dire le mélange de formes géométriques avec le végétal, l’animal, le féminin, des dégradés de points, des trames de points, avec des éléments plus dessinés, détaillés et réalistes. On retrouve encore ces contrastes dont je parlais avec la minutie, le travail du détail, à l’opposé des grands aplats, des courbes et des lignes. En général, je souhaite mettre en valeur l’ésotérisme et le féminin dans mes créations.
Te souviens-tu du premier tatouage que tu as réalisé ? Quel regard portes-tu sur ton évolution en tant qu’illustratrice et tatoueuse ?
Le tout premier tatouage que j’ai créé avant de le tatouer était une tête de chat avec des formes géométriques en dot autour. Cette réalisation m’a permis de prendre conscience de ce que je souhaitais réellement faire, vers quel style de tatouage je voulais m’orienter. Dessiner pour des tatouages m’a aidée à me développer en tant qu’illustratrice. L’alliance de la pratique du dessin et l’exigence technique du tatouage pousse à développer sa vision et à évoluer plus rapidement et plus efficacement.
Le “dotwork” fait partie intégrante de tes tatouages, peux-tu nous en dire plus sur cette technique ?
Le “dotwork” est ce qu’on appelle le travail au point, il s’agit d’introduire dans la peau des petites touches d’encre point par point qui permettent de créer des lumières, des contrastes, des ombres, des nuances. Même si ça n’est qu’en noir et blanc, le volume et le contraste sont présents grâce à ce travail au point, ce “dotwork”. Il s’agit d’une technique variée, il y a plusieurs façons de la travailler. On peut donc faire du point par point mais aussi du “whip shading”, il s’agit d’une sorte de gratté de points, des lignes très fines qui font plein de petits points et qui créent des dégradés de points. En fonction de l’orientation de ces lignes, on peut créer du mouvement. Cette technique demande pas mal de temps et de patience mais le rendu en vaut le détour. Le mélange de ces deux techniques permet de jouer sur la matière, c’est fascinant ! Je prends un réel plaisir à travailler de cette manière.
Qu’est-ce qu’un bon tatoueur selon toi ?
Un bon tatoueur, selon moi, est avant tout une personne qui est à l’écoute, qui arrive à comprendre la sensibilité de son client et qui puisse mettre sur papier la fusion entre la demande du client et son art, tout en ayant la capacité de le guider, de l’orienter, car dans le tatouage nous ne pouvons pas tout faire. Il faut parfois savoir mettre de côté certains éléments pour en mettre d’autres en valeur, pour qu’à la fin ce tatouage évolue correctement et soit harmonieux par rapport à la création, l’emplacement du corps et à la vision du client.
Qu’est-ce que tu préfères dans ton métier de tatoueuse ?
Il y a énormément de choses que j’aime dans mon métier. Déjà, le contact avec les gens, le fait de comprendre leur vie, ce qu’ils font, pourquoi ils se font tatouer… Et surtout, qu’une création puisse prendre vie grâce à cette personne-là ! Je trouve ça génial. Que quelqu’un puisse adopter un visuel que j’ai créé et fusionner avec, ça prend vie, ça rend les choses concrètes. J’éprouve une réelle satisfaction et ça donne une raison de faire ce métier.
Quel est le projet rêvé que tu aimerais concrétiser dans le futur ?
Je n’ai pas un projet rêvé, mais plusieurs. Je souhaiterais développer ce que je fais sur d’autres supports. L’univers de la joaillerie et des bijoux est une grande passion. J’aimerais un jour pouvoir collaborer avec une marque ou un créateur qui me permettrait d’associer mon univers à quelque chose qu’on peut porter sur soi, de visuellement fort mais aussi délicat. D’autres projets m’attirent beaucoup comme la création de fresques, des collaborations avec des belles marques, des beaux supports… Tout ce qui est accessoires mais également décoration d’intérieur. Cela me parle énormément, je suis actuellement en train d’apprendre la céramique, j’aimerais développer cet axe-là. Je souhaiterais tout simplement continuer à ouvrir mon univers à tout ce que j’aime : vêtements, peintures, accessoires, décoration… et bien d’autres !
Vous pouvez retrouver les créations de Violette sur son site internet et sur son compte Instagram.
Propos recueillis par Camille Bonniou
Articles liés
La 28e édition du festival “Jazz au fil de l’Oise” revient le 21 septembre
Cette 28e édition automnale du festival Jazz au fil de l’Oise 2024 prendra place dans le Val d’Oise du 21 septembre au 15 décembre 2024. Une édition marquée par les Olympiades pour lesquelles dix structures culturelles estampillées “Val d’Oise-Terre...
Rencontre avec Térez Montcalm, la plus rock des chanteuses de jazz
Mêlant avec grâce rock, folk et jazz, Térez Montcalm, artiste à la voix fêlée et sensuelle, fait partie du cercle très fermé des chanteuses qui possèdent une signature vocale. En d’autres mots, sa voix rocailleuse est reconnaissable dès les...
Les Épis Noirs présentent “Britannicus” : du théâtre musical, rock, populaire et déjanté au Lucernaire
Dans une troupe de théâtre ambulant, un “Monsieur Loyal” tonitruant mène ses comédiens à la cravache pour vous raconter la véritable, et non moins monstrueuse, histoire de Britannicus. Tout se passe en un seul jour à Rome. En mai...