V. : une “portraitiste oculaire”
V. est une artiste plasticienne, peintre et street artist. Ses yeux expressifs et touchants abritent les rues de Paris et épient les passants, en attirant leur regard curieux et en les sollicitant à observer.
Qui êtes-vous, V. ?
Mon nom d’artiste est V. Je suis artiste plasticienne et plus particulièrement portraitiste oculaire, je capture les regards.
Quel a été votre parcours ?
J’ai fait un bac littéraire option Arts Plastiques au lycée suivi d’une MANAA dans une école nancéienne, puis je suis venue vivre à Paris pour intégrer une école de mode. Je n’ai suivi que six mois de cours jusqu’à avoir une proposition de stage en Haute Couture.
Après cette expérience significative, j’ai travaillé pendant plusieurs années pour différentes maisons en tant que styliste free-lance. J’ai ensuite décroché un poste de directrice artistique dans un grand magasin parisien, et suite à une longue période de surmenage, j’ai décidé de me consacrer à l’Art.
D’où vient votre choix de représenter que des yeux ?
J’ai toujours dessiné des yeux, le plus ancien vestige que j’ai pu retrouver dans la maison de famille date de 1998, j’avais donc six ans. On me disait, enfant, que j’avais piqué les yeux de ma grand-mère : ça a certainement dû me perturber.
Du plus loin que je me souvienne, je dessinais des yeux, stylisés d’abord, puis ceux de mon entourage, de mes camarades de classe.
Ensuite, je me suis intéressée de près à l’iridologie qui est une science antique basée sur la lecture de l’iris. Il existe plusieurs cartographies iriennes, plus ou moins précises représentant les éléments de notre corps. Je suis donc allée voir un naturopathe pour faire l’objet de cette analyse et j’ai été agréablement surprise de toutes les informations que mes yeux pouvaient transmettre. La moindre tâche de couleur a donc une signification, j’ai trouvé cela fascinant.
Quelles sont vos sources d’inspiration ?
Mes sources d’inspiration sont très variées, j’aime le réalisme cru de Gustave Courbet et celui de Nicholas Nixon. Je suis rêveuse devant les œuvres de Salvatore Dali et, en restant dans le surréalisme, je suis très admirative des créations d’Elsa Schiaparelli.
Je suis passionnée par les bijoux représentant des yeux miniatures que l’on offrait à son amant clandestin au 18ème siècle. Je me retrouve également à travers les œuvres de Sophie Calle et Annette Messager, pour leurs visions de la vérité et leurs installations.
Vous êtes aussi street artist, pourquoi avez-vous décidé de coller vos œuvres dans la rue ?
J’ai décidé de coller dans la rue à une période où j’étais malade et contrainte de rester chez moi, je ressentais un réel besoin de montrer ce que je faisais pendant cette période. J’ai donc créé mon compte Instagram en septembre 2017.
J’étais de plus en plus suivie mais j’avais besoin d’une action physique, donc j’ai fait le choix de coller dans la rue des petits stickers reproduisant mes toiles, puis de plus grandes impressions pour accrocher le regard des passants et monter en détails ce qu’est mon travail. C’est d’ailleurs grâce à mes collages dans la rue que j’ai rencontré mon compagnon, artiste aussi. Il a été touché par mon art avant de me connaître.
Est-ce que vous essayez de transmettre un message avec vos œuvres ?
Le message sous-jacent est l’invitation à l’observation, personne ne prend le temps de regarder les yeux de ses proches et pourtant, ils disent tout et ce sont ces regards qui nous manquent le plus quand ils disparaissent.
J’ai beaucoup entendu de louanges concernant les yeux verts et bleus mais ils ne sont pas les seuls, les yeux marrons sont finalement des yeux clairs recouverts d’une lentille colorée, leur beauté est égale à leur mystère.
Les yeux sont des trésors, ils parlent avec un autre langage propre à eux-mêmes, cette diversité de couleurs est tellement riche, à chaque nouvelle découverte je suis ébahie !
Quelle est la technique que vous utilisez ?
J’utilise la peinture acrylique sur toiles ou planches de bois de forme ronde exclusivement. Le cercle est une forme divine, parfaitement adaptée à l’œil.
Quels sont vos projets pour le futur ?
Je participe prochainement à la 9e édition du festival d’Arts Actuels de l’île de Ré.
En outre, je projette aussi d’organiser une exposition collective autour des fenêtres de l’âme, en invitant différents artistes à jouer avec leur regard physique et psychique.
Et bien évidemment je continue ma production pour être en mesure de réaliser des installations de plus en plus imposantes afin d’exposer dans des lieux tout aussi imposants.
Plus d’informations sur V. sur son Instagram.
Propos recueillis par Violagemma Migliorini
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