Thomas O’Brien : “Une approche photographique où la lumière serait un pinceau”
Ce photographe trentenaire vient de sortir une série de portraits chez Nombre 7 Éditions : Long Exposure, Portraits. Un beau livre qui met en lumière les différents visages de ses modèles dans une démarche photo en mouvement s’apparentant au light painting.
Comédien, réalisateur, tatoueur, slammeur, Dj, youtubeur, ostéopathe… Qui sont les modèles qui vous ont inspiré cette série de portraits ?
Essentiellement des créateurs. Ce projet est né de rencontres. Moi-même musicien, chanteur, vidéaste, photographe, j’ai la chance de croiser de nombreuses personnalités intéressantes : milieux artistiques – j’ai photographié les lauréats des Molières 2017, par exemple–, corporate… En effet, je suis photographe indépendant dans différents secteurs. Ces photos datent de 2012-2016 et c’est mon premier ouvrage.
Vous réalisez des portraits à l’italienne et à la française mais d’un genre un peu spécial. Comment travaillez-vous ces effets visuels ?
Je crée des effets de transparence, de dédoublement et de superposition, mais sans montage ou postproduction – à l’aide de logiciels, par exemple. Le temps est condensé sur une seule trame. Je me rapproche du light painting, une approche photographique du dessin où la lumière serait un pinceau. C’est la vitesse et la façon dont j’éclaire le sujet qui changent tout.
D’où proviennent vos idées de mise en scène ?
Chacun d’entre nous a plusieurs facettes. Je questionne mes modèles pour proposer d’eux-mêmes de multiples visages, y compris intimes. Ma technique leur permet de s’exprimer librement. L’improvisation est importante et je rebondis sur d’heureux hasards.
Pourquoi cherchez-vous à révéler vos modèles ?
Une façon de dévoiler la complexité humaine…
Concrètement, comment se déroulent les séances photo ?
En studio. Le temps de pose est très long, entre 10 secondes et 12 minutes. C’est un geste simple pour des résultats étonnants. Un seul déclenchement pour une photo unique. Mais les mouvements des modèles prennent une part prépondérante au rendu. La chorégraphie varie selon la personnalité.
Comme dans un film, vos images font récit. Revendiquez-vous une influence cinéma ?
Sûrement, car je suis cinéphile et vidéaste. Chaque modèle raconte une histoire qui lui colle à la peau, mais c’est en mouvement. J’aime l’idée de condenser une séquence narrative, avec sa durée propre, sur une seule photo.
Votre travail renvoie à l’art pictural tout en s’inspirant de notre réalité contemporaine. Quelles sont vos références ?
J’en ai tellement ! J’aime le clair-obscur. Je retranscris aussi le tempo caractéristique du batteur. Je me définis comme un touche-à-tout. Mes références sont donc éclectiques.
Quoi qu’il en soit, je cherche à projeter le lecteur dans une autre dimension. En jouant sur les matières, les couleurs et les lumières, j’essaie d’offrir une autre vision de la personne. Ma propre vision. Pour cette série, ma démarche est quasi anthropologique, voire psychanalytique. J’essaie en tout cas de proposer une signature.
Propos recueillis par Sarah Meneghello
Site de l’artiste ici
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