Raphaël, les dernières années – Louvre
Synonyme de plein épanouissement stylistique de Raphaël, cette période est celle du sommet de la Renaissance italienne, celle du moment où le peintre devient l’inventeur d’un classicisme qui perdurera dans la peinture plusieurs siècles, celle du moment où il devient le génie d’Urbino.
8 salles. 8 façons pour le visiteur de toucher à l’évolution stylistique de Raphaël, 8 façons de chercher à le comprendre, à appréhender son génie. De la période florentine sous l’oeil avisé de son maître, Le Pérugin, jusqu’à l’exceptionnelle production romaine sous le pontificat respectif de Jules II et de Léon X, Raphaël est un infatigable. Vasari dira de lui dans ses célèbres Vies qu’il serait mort d’épuisement d’une production trop prolixe.
Des tableaux de chevalets, de dévotions ou privés, aux grands retables jusqu’aux décors des salles monumentales du Vatican, aux portraits d’apparat ou intimes, pleins de subtilité, ainsi que certaines de ses plus belles études et modelli, les oeuvres communiquent l’esprit du monde de Raphaël, elle communiquent la réalité.
Les grands retables, les décors architecturaux. Témoins du génie de mise en scène et de narration. Vivacité, profondeur, ils assoient la maturité de Raphaël, son influence. On touche à la grâce.
Les modelli, les études. Témoins de la main de Raphaël, de sa recherche de la perfection, de sa grandiloquence. On touche à l’élégance.
Les portraits. Témoins de ses réflexions constantes, insatiables, infatigables. Tout se passe comme si Raphaël se demandait comment représenter telle ou telle figure, de manière unique. On touche à l’extase.
Résultat : intensité du coloris, puissance de la lumière, précision du trait, présence intense, psychologie des personnages. On touche au génie.
Artiste libre, Raphaël dépasse son art. Productions intenses, les œuvres parlent d’elles mêmes. Grâce, douceur, perfection de la touche, d’autres mains se joignent à la sienne. Celles de ses deux élèves et collaborateurs de confiance : Giulio Romano et Gian Francesco Penni. Raphaël n’est pas un solitaire, leur travail est présenté dans deux des salles. On y perçoit l’influence du maître.
Pour Raphaël, normes et beauté étaient synonymes. On devine le maniement subtil des formes et des couleurs, on entrevoit le traitement doucereux de la lumière et des ombres, on retient sa leçon de l’Antiquité.
Raphaël nous apparaît alors comme l’artiste qui incarne le mieux les idéaux de la Renaissance. Et pourtant, parce qu’il est l’inventeur du classicisme et parce que l’on dit de lui qu’il fût l’initiateur de la peinture de la Contre-Réforme, il est dommage que l’exposition, dont le parti pris est de tenter de faire la lumière sur cette période peu comprise du peintre en raison de la chronologie de ses tableaux tardifs difficile à déterminer, d’autant qu’il ne travaillait pas seul, ne réponde pas à certaines questions : qui était Raphaël à la fin de sa vie, comment et pourquoi son style évolue-t’il ?
L’exposition pêche par un fil rouge distendu qui ne nous entraîne pas au coeur de la maturation du peintre, ne nous plonge pas dans ses réflexions, mais se contente de nous montrer, silencieusement, simplement. Chronologiquement.
Parce qu’il était l’élève du Pérugin et parce qu’il était le contemporain de Michel-Ange, son plus grand concurrent, et de Léonard de Vinci, que Raphaël a vu travailler pendant la courte présence de cet autre génie de la Renaissance à Rome, on aurait aimé des comparaisons entre les tableaux, entre les projets, entre les manières, relatant ce qui a fait la gloire de Raphaël. Ce qui a fait sa différence.
Artiste classique mais aussi artiste d’idées, Raphaël a voulu rendre compte dans sa peinture de son idée du monde, de l’esprit qui l’habite, qui évolue. C’est ce qu’on aurait aimé sentir davantage dans les cartels, dans l’air. Dans cette confrontation directe avec le Raphaël des dernières années, il nous manque un propos construit, au service de son génie.
Quoiqu’il en soit, l’exposition reste un incontournable de la saison, ne serait-ce que par la rareté des oeuvres montrées; et puis, il faut bien avouer aussi que passer un moment auprès de Raphaël reste tout de même un moyen de toucher les étoiles.
Anne-Lise Charache
Raphaël, les dernières années
Commissaires : Paul Joannides, Cambridge University, Tom Henry, University of Kent, Miguel Falomir, musée du Prado, et Vincent Delieuvin, musée du Louvre, assisté de Cécile Beuzelin.
Du 11 octobre 2012 au 14 janvier 2013
Ouvert tous les jours, sauf le mardi, de 9h à 18h
Nocturnes les mercredis et vendredis jusqu’à 21h45
Billet spécifique à l’exposition : 12€
Billet jumelé (collections permanentes et exposition) : 15€
Musée du Louvre
Hall Napoléon, sous la pyramide
www.louvre.fr
A découvrir sur Artistikrezo :
– Les grandes expositions parisiennes en décembre 2012
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