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Olivia de Bona et Jeykill : “Le 9ème Concept a été pour nous propice aux échanges créatifs”

Barbara Legras 6 juillet 2020
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Exposition Summertime - © Kym Nguyen pour la galerie Vincent Tiercin

Artistik Rezo poursuit sa série d’interviews dans le cadre du 30ème anniversaire du 9ème Concept. Aujourd’hui, ce sont Olivia de Bona et Jeykill, deux artistes au style très différent mais qui partagent des valeurs communes issues du collectif, qui nous expliquent quelle influence leur intégration au sein du 9ème Concept a eu sur leur travail individuel et à quel point le collectif est une forme de think tank artistique.

Pouvez-vous nous présenter votre parcours ?

Jeykill : J’ai suivi une formation de graphiste en 1993 puis ai fait des stages dans des agences de publicité. J’ai rencontré par hasard le 9ème Concept car j’ai remplacé un ami régisseur sur une tournée Desperados. Stéphane (ndlr : Stéphane Carricondo est l’un des trois fondateurs du 9ème Concept) m’a demandé de lui montrer mon portfolio. Suite à cela, j’ai intégré le collectif en 1999 avec les tournées de tatouages éphémères, puis j’ai designé la bouteille collector Desperados en 2000 et participé à l’exposition collective Sang9. Avec le temps, j’ai moins participé aux tournées et ai surtout collaboré sur les projets de création avec les marques. En 2010, j’ai monté mon salon de tatouage Bleu Noir à Paris. Je tatouais depuis dix ans et comme j’avais de plus en plus de demandes, j’ai décidé d’en faire mon métier. Mais comme personne ne voulait me faire travailler à cause de mon profil trop artistique, j’ai fini par monter mon propre shop. Veenom (ndlr : un autre artiste issu du collectif 9ème Concept) m’a rejoint comme apprenti au début puis comme associé. Nous avons ouvert le shop Bleu Noir de Biarritz en 2016.

Jeykill – © Damien Dohmen

Olivia de Bona : J’ai fait des études en arts appliqués puis en dessin animé dans le Nord de la France. J’ai eu envie de monter sur Paris pour être illustratrice. J’ai rencontré Stéphane lors d’un dîner, c’était juste après l’édition de Sang9. J’ai été intégrée dès 2005 sur les tournées Desperados puis dans les expositions collectives avant de rejoindre l’atelier à Vincennes pour développer mon travail d’artiste, tout en étant illustratrice et muraliste à côté. Depuis 4/5 ans, je suis hors circuit du 9ème Concept, j’ai rejoint l’atelier Le Terrier avec Théo Lopez et Matthieu Dagorn (ndlr : deux autres artistes du 9ème Concept), mais on ne quitte jamais vraiment le collectif.

Olivia de Bona – © Galerie Vincent Tiercin

Quel rapport entretenez-vous entre la singularité de votre travail individuel qui vous a amené à voler de vos propres ailes et le collectivisme du 9ème Concept ?

Jeykill Il n’y a pas de rupture avec le collectif quand on le “quitte”. Personnellement, j’ai décidé de me concentrer sur le tatouage, ma singularité, car je voulais développer du business, mais je reste ouvert à toute demande de collaboration de la part du collectif. C’est plus la disponibilité qui me manque, hélas.

Olivia de Bona : La séparation est liée à cette notion de singularité. Celle-ci est venue en cours de parcours, elle n’a pas été clairement énoncée. Mais oui, il y a un besoin d’émancipation qui se crée et on n’a plus autant de temps pour les projets collectifs. Cela prend du temps aussi de trouver sa place au sein du collectif et il faut avoir à en donner aux grands projets.

Quelle influence a eu le collectif sur votre travail individuel ?

Olivia de Bona : On a tellement travaillé ensemble, on s’est tellement regardé travailler que, oui, chaque artiste a eu une influence sur nous, suivant ses compétences. Par exemple, j’ai eu de grandes discussions avec Clément Laurentin sur les techniques de reproduction.

Jeykill : Cette notion d’influence, c’est une évidence qui se digère avec le temps, qui ressort parfois longtemps après. On évolue tous ensemble, on est forcément influencé par le travail des autres. Le collectif a été l’occasion de vrais échanges créatifs.

Œuvre de Jeykill pour l’exposition Summertime – © Galerie Vincent Tiercin

Quelles sont les valeurs que vous retenez de votre expérience au sein du 9ème Concept ?

Jeykill : Le travail, l’amitié et la loyauté. Il n’y a pas de perte de distance avec le collectif.

Olivia de Bona : L’humilité et la reconnaissance. Le 9ème Concept, c’est de la générosité ; je leur dois énormément. Ils sont loyaux dans leur façon de respecter nos choix et de nous accompagner sur le long terme. C’est un peu comme une famille que l’on quitte pour s’émanciper et on se rend compte avec le temps combien on leur doit et combien on a pu parfois être arrogant individuellement.

Quels sont les projets qui vous ont le plus marqués avec le collectif ?

Jeykill : Je me suis mis à peindre grâce au 9ème Concept ! Le projet de création numérique collective Sang9 en 2000, l’exposition Welcome on Board en 2001, qui alliait arts graphiques et plastiques, musiques et sports de glisse, mais aussi la soirée “Détonation” ont été les projets majeurs auxquels j’ai participé avec le collectif.

Olivia de Bona : J’ai vu passer les projets dont parle Jeykill, mais je suis d’une autre génération. Je suis arrivée au sein du collectif avec le concept d’agence et le développement de la partie très artistique. Pour moi la résidence “Aux tableaux” pour laquelle le 9ème Concept a été mécène et a assuré la direction artistique résume le plus ce qu’est le collectif: cette vocation à travailler tous ensemble mais avec des idées personnelles.

On vous retrouve jusqu’au 24 juillet à la Galerie Vincent Tiercin pour l’exposition collective Summertime : votre travail à chacun est très différent de celui de l’autre, quel est l’angle d’approche choisi pour cet événement ?

Olivia de Bona : Ce qui rapproche les artistes du 9ème Concept, c’est le travail de la ligne. Ce n’est pas le cas ici. Ce n’est pas le rapprochement plastique que Vincent a vu, mais le rapprochement des énergies : la nature, le soleil, l’été. Le soleil est évident dans le travail de tatouage de Jeykill.

Oeuvre En attendant l’été par Olivia de Bona – © Kym Nguyen pour la galerie Vincent Tiercin

Jeykill : C’est un heureux concours de circonstances. J’ai rencontré Vincent qui m’a parlé de son projet d’exposition Summertime. Il m’a proposé de me joindre à Olivia car il n’a pas vu d’opposition mais le rapprochement de deux types de travaux qui ont un langage différent.

Œuvre de Jeykill pour l’exposition Summertime – © Galerie Vincent Tiercin

Quelle est votre actualité à chacun en dehors de cette exposition collective ?

Jeykill : Je participe avec Stéphane Carricondo à Scratch Paper sur Fluctuart fin août. Je suis beaucoup pris par le salon de tatouage, mais je me suis remis à la production de toiles ces derniers temps. Même si j’ai développé mon travail artistique via le tattoo, j’ai besoin de créations plus personnelles.

Olivia de Bona : J’ai une grosse session de fresques cet été, soit pour des clients, soit pour les murs officiels des villes, comme Cherbourg ou Orléans. Je fais de plus en plus de fresques depuis quelques années et un peu moins d’illustrations, dans une démarche économique, mais dans ma démarche artistique, je travaille beaucoup sur l’artisanat d’art : la gravure sur bois, la gravure à l’eau-forte, les techniques de reproduction, la marqueterie, la céramique ou encore la sérigraphie textile. Il faut savoir se donner du temps pour le travail personnel.

Retrouvez Jeykill sur son compte Instagram et sur le site de Bleu Noir.

Retrouvez Olivia de Bona sur son compte Instagram.

Propos recueillis par Barbara Legras

 

A découvrir sur Artistik Rezo :
L’interview des créateurs du 9ème Concept

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