Du Greco à Dali – musée Jacquemart-André
Pour sa précédente exposition déjà, le Musée Jacquemart-André s’était proposé d’accueillir une collection privée, celle de Samuel von Brukenthal, qui regroupait des artistes flamands du XVe au XVIIe siècle. Avec l’exposition de la Collection du mexicain Pérez Simón, l’Espagne est cette fois mise à l’honneur.
La fourchette chronologique s’est considérablement élargie, brossant des œuvres du XVIe au XXe siècle, organisées en un parcours thématique qui confronte au sein de chaque salle les différentes époques. Mais alors qu’un réel esprit flamand se dégageait de la précédente exposition, on peine à homogénéiser les impressions ressenties devant les œuvres de la Collection Pérez Simón telles qu’elles nous sont présentées.
L’exposition hésite constamment entre une organisation chronologique ou thématique sans jamais trancher. La première salle est symptomatique de toute l’entreprise, à la fois prometteuse et déstabilisante. Alors que le titre de l’exposition « du Gréco à Dalí » induit une organisation chronologique, le parcours s’ouvre sur un espace consacré aux Fêtes Royales et aux Fêtes Populaires. L’agencement même des tableaux laisse également songeur. La volonté de faire dialoguer les œuvres, poussée à l’extrême, confronte un tableau de Dalí et un portrait de Charles Quint sans pour autant exacerber leur conversation.
Les deux salles suivantes forment un diptyque consacré à la religion. D’une part les « Splendeurs de l’art sacré », d’autre part la « Dévotion privée, ferveur populaire ». Cette division, tout à fait pertinente puisqu’elle reflète un état réel de la société espagnole jusqu’au début du XXe siècle, met malheureusement en valeur le déséquilibre des œuvres, et fait de la deuxième salle un repoussoir de la première. L’Immaculée Conception de Murillo, le magnifique Saint Jérôme de Ribera qui fait l’affiche de l’exposition, et l’Ascension du Christ de Dali écrasent le minuscule portrait de Goya, seule œuvre présente de l’artiste, dont le nom est pourtant mentionné en accroche dans le titre même de l’exposition. En revanche, les Dalí sont légions dans cette très riche collection, et l’on ne s’en plaindra pas.
Les salles se suivent et ne ressemblent pas. La (petite) salle des « peintres de l’enfance » est suivie du thème « peindre la lumière », avec de beaux Sorolla très à propos (ainsi Soleil du Matin), et l’esquisse de la Pêche aux thons de Dali. Cette salle précède celle consacrée aux « images du corps féminin », où se promène sans complexe le déjeuner du Pauvre de Picasso, qui exhibe ses visages masculins avec une totale absence de pudeur : regardent-ils les nus qui les environnent en se demandant, comme nous, ce qu’ils font là ?
Après la salle des portraits (dont le splendide Portrait de femme de Julio Romero de Torres), l’exposition se clôt sur celle consacrée aux maîtres de la modernité (Miró, Picasso, Juan gris, Antonio Tàpies, et, sans surprise, Dalí), conclusion chronologique toute naturelle pour un parcours qui ne l’a jamais été. Les textes compliquent encore une scénographie peu claire, en tentant de creuser les liens thématiques (puisque telle semble être la ligne directrice dominante) entre les œuvres par des explications sans fin où se multiplient dates et noms. En revanche, le site internet consacré à l’exposition, très clair, propose l’organisation chronologique qui n’ose pas s’affirmer dans le musée.
Cette exposition soulève ainsi le problème très pertinent de l’exposition d’une collection privée. Il est regrettable que la difficulté d’en montrer la cohérence soit ce qui prime ici, malgré de véritables chefs-d’œuvre qui sont les premiers à en pâtir.
Viviane Saglier
Collection Pérez Simon : Du Greco à Dali
Jusqu’au 1er août 2010
Tous les jours de 10h à 18h
Nocturnes tous les lundis jusqu’à 21h30
Informations : 01.45.62.11.59
Plein tarif : 11 euros // Tarif réduit : 8,5 euros
Gratuit pour les moins de 7 ans
Les visites pour les groupes se font uniquement sur réservation : groupes@musee-jacquemart-andre.com
Musée Jacquemart-André
158, boulevard Haussman
75008 Paris
M° Saint-Augustin, Mirosmesnil, Saint-Philippe du Roule
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