Marie Bashkirtseff (1858-1884) : une artiste à la vie intense et passionnante
Artiste érudite et singulière au destin tragique, Marie Bashkirtseff (1858-1884) a minutieusement écrit sa souffrance et ses convictions dans son Journal. Comment la connaissance de sa mort prématurée l’a-t-elle influencé dans son expression artistique ?
Assoiffée de savoir, Marie Bashkristeff apprend les langues, la musique, le chant et la littérature. Elle est brillante, talentueuse et a un grand désir de laisser sa trace sur Terre en dépit du peu de temps qui lui est imparti. En effet, elle est atteinte de la tuberculose et par conséquent, elle façonne sa vie sans en perdre un instant : elle sera toujours entièrement dévouée à son art, elle ne se mariera jamais. Elle souhaite faire de sa vie une œuvre d’art, ce qu’elle réalisera à travers son journal dans lequel elle se met en scène dès ses 14 ans.
On sait d’elle qu’elle a passé une partie de son enfance et de son adolescence en France et en Italie dans un environnement élégant et relativement excentrique. C’est probablement ce milieu pourvu de goût et d’originalité qui l’a poussé à intégrer l’Académie Julian en 1877, la première à ouvrir ses portes aux femmes. Elle dépeindra l’atmosphère de ce haut-lieu de l’apprentissage artistique dans ses œuvres, notamment dans L’Académie Julian (1881). Elle s’y représente toute de noir vêtue et posant sous un squelette afin de symboliser son angoisse de la mort. Dans son journal, elle témoigne de l’émulation ambiante au sein des murs de l’Académie et nous donne ainsi la possibilité d’imaginer la vie d’une artiste femme à cette époque. Elle participe au Salon à partir de 1880. Dotée d’une grande intelligence et d’une sensibilité exacerbée, elle se révélera également douée pour la sculpture, le pastel et le dessin.
Ambitieuse à une époque qui ne permettait pas aux femmes d’exploiter leur potentiel, elle souffrait de la discrimination qui l’empêchait d’accéder aux formations dont bénéficiaient les hommes. Elle écrit : “On voyait l’École des beaux-arts. C’est à faire crier. Pourquoi ne puis-je aller étudier là ?!” (Journal, 20 octobre 1878). Féministe et engagée en faveur des droits des femmes, elle contribua au journal féministe La Citoyenne, dirigé par Hubertine Auclert, sous le pseudonyme de Pauline Orell.
Après sa mort précoce à 25 ans, qu’elle avait malgré tout eu le temps d’anticiper, son journal est publié comme elle le souhaitait. Parce qu’elle se savait condamnée, elle rédigea une introduction en mai 1884 et relu l’ensemble de ses écrits qui s’étalaient depuis 1872. En parallèle de son journal, l’importante correspondance qu’elle entretint avec les écrivains qu’elle estimait particulièrement est publiée. Nous y découvrons des lettres spontanées et franches adressées à des auteurs tels que Guy de Maupassant et Emile Zola.
Malgré une œuvre prolifique au regard de sa courte existence, peu de ses œuvres sont encore visibles car beaucoup ont été détruites par les Nazis pendant la Seconde Guerre mondiale. Curieusement, c’est moins à son œuvre picturale elle-même qu’à son journal qu’elle doit sa notoriété. Nous pouvons y lire les mots suivants : “C’est ce qui m’a toujours épouvantée. Vivre, avoir tant d’ambition, souffrir, pleurer, combattre, et, au bout, l’oubli !… comme si je n’avais jamais existé.”
Agathe Pinet
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