Margaux Henry-Thieullent : “Le plus important c’est de prendre position et de raconter des histoires”
Artiste plasticienne pluridisciplinaire originaire du Pays basque, nous rencontrons aujourd’hui Margaux Henry-Thieullent qui a décidé de consacrer son temps et sa vie à sa pratique artistique, après avoir obtenu son diplôme d’architecte.
Quel est le lien entre l’architecture et ta pratique artistique ?
Il y a une vraie porosité entre l’architecture et le milieu de l’art. C’est une discipline qui est complètement systémique, qui va se nourrir de littérature, de philosophie, d’économie, de politique ou d’art, donc de beaucoup de disciplines différentes. En étudiant l’architecture, on nous amène vraiment à prendre place dans des contextes politiques, historiques et plastiques. L’architecture est un milieu très rigide d’une certaine manière, très concret et rationnel. J’ai donc appris à libérer une pratique artistique et à nourrir ma personnalité. Je me suis rendu compte que l’art ou la pratique plastique avait pris une place très importante et que je voulais affronter toutes ces envies et ces idées. Les études d’architecture te poussent vraiment à avoir un esprit critique, un esprit global et systémique sur la société ; avoir des réflexions poreuses entre elles et surtout prendre position. Dans ma vision de l’art, c’est aujourd’hui ce qui est le plus important : prendre position et raconter des histoires.
Qu’est-ce qui t’inspire ?
La démarche de l’architecture nourrit ma pratique d’artiste pluridisciplinaire mais il y a des artistes qui vont nourrir mes créations comme par exemple Paul McCarthy, Tracey Emin, Joseph Beuys, ou encore des auteurs comme Michel Houellebecq, André Breton, mais aussi la musique trap. Je m’inspire de personnages liés à des faits politiques, de notre scène actuelle, des réseaux sociaux. Il y a tout un mélange de strates qui constituent notre culture contemporaine, qui inspire mes productions et mon travail.
Quel est ton processus de création ?
C’est très variable, il n’y a pas vraiment de processus routinier. Ça peut être inspiré d’un fait d’actualité. C’est très intuitif, je vais comme régurgiter une idée ou une information soit par le dessin, soit par la capture digitale ou l’écriture. Il y a un dialogue permanent entre toutes ces disciplines et les idées, à l’image de notre société qui est en mouvement constant. J’ai l’impression que notre mémoire contemporaine se construit de cette manière, elle est influencée par une quantité de flux différents, que ce soit des flux d’images, des flux virtuels ou physiques. Il y a tellement d’axes par lesquels l’information passe, par lesquels on capture des instants. Et la manière dont je raconte, dont je commence à produire, elle est un peu à l’image de cette société.
Peux-tu nous parler d’une œuvre que tu as réalisée et qui t’a marquée ?
Il y a une œuvre que j’ai réalisée au mois de mars qui a été particulière. C’est une vidéo qui s’appelle Sublime, qui s’est faite sur plusieurs temps. Elle est issue d’un texte que j’ai écrit en 2018, j’ai ensuite demandé à une artiste qui s’appelle Molpé de l’interpréter et de mettre en musique ce texte. Elle a réussi à faire un travail très beau autour de ça. Et à mon tour je l’ai mis en image à partir d’une application sur téléphone qui fait du dessin digital 3D, et il en est ressorti cette vidéo.
Que souhaites-tu transmettre grâce à ton art ?
Peut-être un questionnement. J’aime bien l’idée qu’une personne qui se retrouve face à mon travail en ressorte un peu chamboulée et qu’elle se pose des questions, de l’étrange, ou en tout cas des questions par rapport au monde dans lequel on évolue.
Tu as créé un lieu appelé “Encore le lieu” à Biarritz. Peux-tu nous en parler ?
À Biarritz, j’ai la chance d’avoir un très bel espace de travail. C’est un atelier que j’aimerais pouvoir partager avec d’autres artistes et le faire vivre en proposant des événements artistiques, des expositions, et en accueillant des artistes pour des expositions collectives. Donc ce lieu qui est mon atelier s’appelle “Encore le lieu”. Ce projet est né pendant le confinement de mars dernier. J’ai commencé par lancer un appel à projets sur les réseaux sociaux destiné aux artistes, aux plasticiens, aux performeurs… à des artistes qui étaient en train de produire pendant cette période particulière. Je voulais donc faire une exposition collective et accueillir ces artistes sélectionnés au mois d’octobre 2020. Malheureusement avec le deuxième confinement, l’événement a été décalé plusieurs fois et on a finalement dû l’annuler. Mais ce lieu reste voué et destiné à accueillir des expositions d’artistes situés sur le territoire français et en Nouvelle-Aquitaine, dès que ce sera possible. Pourquoi pas en faire un lieu collaboratif où j’accueillerais des artistes peut-être en continu ou en résidence, qui donneraient sans doute lieu à une exposition.
As-tu trouvé un plan B suite à cette pause dans ce projet ?
Je n’étais pas pour organiser une exposition virtuelle parce que ça me tient à cœur de défendre l’ouverture physique des lieux d’exposition. Je me suis donc tournée vers un projet d’édition autour des productions des projets que les artistes avaient proposés pour l’expo. Mais le temps fait que ce projet est remis en question, il n’est plus vraiment certain. Pour le moment il est mis de côté car finalement je pense qu’exposer ces artistes serait beaucoup plus fort et plus important que de les mettre sur papier. C’est le contexte qui veut ça, de remettre les projets en question. J’espère que ce lieu pourra vraiment prendre forme dans les mois à venir.
Plus d’informations sur le compte Instagram de Margaux Henry-Thieullent.
Propos recueillis par Eva Bellanger
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