Marek et Emma Missal : une famille d’artistes
Marek et Emma Missal sont père et fille : Marek réalise des sculptures-peintures originales et Emma fait des photographies et des collages qui nous emmènent dans l’univers des rêves. Tous les deux, avec leur art, incitent le public à s’évader en créant son propre monde.
Pouvez-vous expliquer votre parcours ? D’où vient votre passion pour l’art ?
Emma : J’ai fait les Beaux-Arts de Biarritz et ensuite je me suis dirigée vers un cursus lié à l’art mais un peu plus ciblé : je suis maintenant en cinquième année de l’ICART, école des arts et de la culture. Quand j’étais petite je dessinais beaucoup mais après je me suis vite intéressée à la photo et aux collages.
J’ai été entourée depuis toujours par l’art de mon père qui est sculpteur, et cela doit sans doute m’avoir influencée. Je pense qu’on a une pratique différente mais un procédé commun, on récolte et superpositionne tous les deux. Il y a une racine commune.
Marek : Ça fait à-peu-près quarante ans que je travaille dans ce domaine. J’ai fait l’école des Beaux-Arts à Varsovie, que j’ai dû interrompre à cause de la guerre civile. Avant mon bac, j’ai été arrêté pour avoir peint dans la rue, on faisait du graphisme, mais avec les instruments qu’on avait à disposition à l’époque. C’était une période magnifique, on sentait le besoin de travailler collectivement.
Plus tard, j’ai collaboré avec des musiciens pour lesquels j’ai réalisé des pochettes en style cubiste et pop art. J’ai eu plusieurs périodes, j’ai fait de la peinture académique, celle qu’on apprend à l’école et ensuite j’ai travaillé avec le bois, ainsi que le moulage de bronze et de plâtre pendant que je travaillais au ministère de la Culture à Varsovie.
Quelle est votre démarche artistique ?
Emma : En général, je fais plus de la photo car c’est évidemment plus immédiat que de créer des collages, mais je trouve que les deux se répondent beaucoup.
Par exemple, dans ma pratique de la photographie, je m’attarde sur les paysages quotidiens recherchant les détails. Dans mon travail, je poursuis les ombres et les reflets récurrents, créant la disparation d’un élément pour en faire naître un nouveau. Les fenêtres sont aussi très présentes, elles traduisent une ouverture sur une nouvelle création, la fenêtre perd alors son aspect premier. Cette pratique photographique offre à chaque fois une nouvelle image.
Pour les collages c’est pareil, je fais tous mes collages à la main. Je récolte des magazines que je trie et je sélectionne les éléments qui m’intéressent, créant un autre monde. L’idée est que la personne qui regarde puisse se défaire de la réalité en créant sa propre vision à travers des éléments qu’on connait, qui font partie de la vie quotidienne, mais qui ont été retravaillés. C’est une désorientation qui offre une nouvelle localisation et qui apporte une dimension onirique, surréaliste. Ce côté de superposition, d’accumulation, qu’on voit aussi dans mes photos, est toujours présente dans mes collages.
Marek : Aujourd’hui, les tableaux classiques m’ennuient donc je mélange la peinture avec plusieurs couches de matériaux différents que je récupère. Je finis souvent avec une dernière couche de peinture. D’une certaine façon, je veux rentrer et en même temps sortir du tableau et je fais ça à l’aide les matériaux que j’utilise. Dans toutes mes sculptures récentes il y a toujours deux matières dominantes : le polyester et le bois.
Ajouter sur la toile plusieurs couches donne la perspective de la liberté et de l’espace. Ça donne une impression de 3D. Nous sommes au XXème siècle : il faut oublier tout ce qui a déjà été fait.
Mes œuvres, sculptures-peintures, n’ont jamais de titre : lors de ma dernière exposition par exemple j’ai demandé aux gens de donner les titres eux-mêmes et c’était très intéressant de voir la une perception de chacun. J’aime que les gens soient libres et ce sont eux qui me donnent souvent des nouvelles idées pour la suite.
Quelle sont vos sources d’inspirations ?
Emma : Les artistes qui m’inspirent sont Boris Mikhaïlov pour la photo et les collages. André Kertész pour le travail de l’ombre. J’adore Luigi Ghirri et Robert Rauschenberg également. Enfin, bien évidement la nature et tout ce qui nous entoure !
Marek : Les inspirations sont partout. Négatives et positives. Pendant le confinement, par exemple, je suis parti de l’idée du binôme négatif-positif comme les neutrons pour créer une œuvre.
Emma a exposé au DOC B de Pantin au mois de mars, Marek à la Maison du Développement Culturel de Gennevilliers de janvier à mars. Quels sont vos projets pour le futur ?
Emma : Mon exposition au Doc B prévue jusqu’à avril a dû fermer à cause de la crise sanitaire, mais mon travail y sera toujours exposé à la réouverture. Un jour j’aimerais beaucoup réaliser des collages de grandes dimensions. Faire des collaborations m’intéresse aussi, tout comme faire des pochettes de disques.
Marek : Plus d’expositions, collectives et en solo. J’avais beaucoup de projets de prévus avant le confinement : une exposition en Angleterre, une autre privée, entre autres. Il faut donner plus de place à l’art, de toutes les façons, et s’entraider entre artistes.
Découvrez l’Instagram d’Emma et celui de Marek.
Propos recueillis par Violagemma Migliorini
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