LSNR, un artiste touche-à-tout
Lucas Saenger est un artiste d’origine française, basé à Montréal depuis 2013. Après quelques années à avoir exercé en tant que graphiste, il travaille maintenant en tant qu’artiste indépendant sur des projets variés : peintures, murs, collaborations, pochettes d’albums et autres illustrations.
Lucas, quelques mots sur toi et ton parcours ?
Mon nom est Lucas Saenger, je signe LSNR, contraction de mon prénom/nom. J’ai 32 ans et je suis installé à Montréal depuis 2013.
J’ai toujours un peu dessiné, mais je m’y suis mis sérieusement à la vingtaine, après deux années de fac qui ne me convenaient pas. J’ai fait un cursus dans une école d’art proche de Chambéry (Savoie) qui s’appelle l’ENAAI, et j’en suis sorti en 2011. J’ai travaillé un peu en graphisme en France et à Montréal, mais dès que mon visa me l’a permis, j’ai quitté mon boulot et je me suis lancé en tant qu’artiste freelance.
Comment as-tu commencé à faire du street art et pourquoi exprimer ton art dans la rue ?
J’ai commencé avec le graffiti dans mon adolescence, mais j’ai arrêté après avoir eu des petits problèmes quand je me suis fait prendre. Je n’étais pas assez “acharné” pour continuer à graffer et à prendre le risque de récidiver, alors j’ai commencé à passer plus de temps à dessiner sur papier.
Je ne m’identifie pas du tout au mouvement street art. Je n’aime pas trop ce terme en général. C’est, je trouve, un mot fourre-tout qui a trop été utilisé et récupéré. C’est aussi souvent assimilé à une marchandisation qui ne me plaît pas. Néanmoins je comprends qu’on puisse qualifier mon travail d’art de rue car je peins dans la rue… dur d’y échapper !
Dans l’idéal, je préfère simplement me considérer comme artiste.
Le fait d’aller peindre dans la rue vient en partie de l’égo : c’est cool de voir son travail en grand sur un mur, je ne vais pas le cacher. Il faut rendre son travail accessible pour qu’il soit vu, et la rue est un bon moyen de le faire.
Ensuite, avec le temps, je trouve ça de plus en plus intéressant de produire quelque chose dans la rue qui offre une expérience gratuite aux passants. Ça leur permettra de contempler quelque chose qu’ils ne s’attendaient pas forcément à voir, et les ouvrira peut être à quelque chose de nouveau, ou leur changera simplement les idées pendant un court moment.
L’action de peindre dans la rue s’accompagne toujours de rencontres et de discussions intéressantes, c’est à chaque fois différent. C’est un vrai plaisir d’être dehors avec ses canettes ou ses pinceaux, et de prendre son temps en travaillant sur une grande surface.
Par contre, c’est difficile de trouver un mur propre et lisse à Montréal, alors il faut faire avec les surfaces rugueuses !
En tout cas, je ne peins pas assez à l’extérieur ces derniers temps, il faut que je sorte plus souvent.
Tu fais aussi des illustrations, des toiles, des murs, des festivals, des expositions… Es-tu totalement libre dans tes créations ? Quelles sont les limites ?
Pour les expositions ça dépend vraiment de chaque projet. Certaines fois c’est un thème imposé, certaines fois c’est plus ouvert.
Quand je fais des projets de murs rémunérés, il faut souvent que je propose une esquisse au client, c’est très rare d’avoir carte blanche.
Parfois les clients sont très dirigistes, alors il faut leur expliquer qu’avoir une petite marge de manœuvre permet souvent d’avoir un bien meilleur résultat. Globalement, quand le projet est pro bono, il y a moins de contraintes que quand quelqu’un y met de l’argent.
Comment décrirais-tu ton style, ta technique ?
Je décrirais ma technique comme du dessin au trait : il est très rare que je dessine sans contours. J’essaye de m’entrainer à d’autres techniques de peinture, mais pour le moment je reste toujours très proche du dessin !
Pour ce qui est du style, j’ai du mal à le définir. Mais ça serait quelque chose entre la bd, le graffiti et l’illustration. J’aime essayer pas mal de trucs différents, selon mes envies, je suis un peu un “touche-à-tout, maître de rien”.
Je respecte vraiment les gens qui font une seule chose et qui le font très bien, mais ce n’est pas quelque chose que j’arrive à faire.
D’où viennent tes inspirations ?
J’ai lu beaucoup de livres et de BD (principalement SF et fantastique) quand j’étais jeune, ça a beaucoup marqué mon imaginaire.
J’ai découvert dans mon adolescence les films du studio Ghibli (de Miyazaki) qui m’ont aussi beaucoup marqué.
Quand j’ai commencé à m’intéresser au graffiti, j’épluchais pas mal les graffitis magazines, et particulièrement Graffiti All Stars, qui se concentrait plutôt sur les personnages que les lettrages. J’achetais à l’époque pas mal de bouquins là-dessus, et je continue à les feuilleter de temps en temps.
Dans ma vingtaine, j’ai découvert Moebius, et ça a été une grosse claque ! C’est un peu le maître du dessin au trait pour moi. J’essaye de m’en inspirer mais sans trop en abuser.
Pourquoi Montréal ?
J’ai presque toujours habité, fait mes études et travaillé à Chambéry, et je voulais voir autre chose. J’hésitais entre Berlin et Montréal, mais le Québec me semblait plus accessible, par le côté du langage ! Des amis à moi avaient déjà fait leurs études au Québec et m’en avaient parlé en bien, alors j’ai décidé d’essayer pendant un an pour commencer.
Finalement, j’ai eu des opportunités à Montréal que je n’aurais peut-être jamais eu en France, et j’y suis resté ! Je ne pense pas pouvoir retrouver ailleurs la même qualité de vie tout en travaillant à mon compte en tant qu’artiste.
Peux-tu nous parler un peu de tes projets futurs ?
Actuellement, je travaille beaucoup sur mon dessin pur. Pendant le confinement, je me suis pas mal remis au dessin d’observation, aux esquisses. J’essaye de reprendre une bonne discipline de dessin et une certaine technique.
J’ai aussi envie d’aborder des thèmes qui me sont plus chers, comme le rapport de l’homme avec la nature, ou l’absurdité de nos systèmes actuels. Un peu plus d’engagement donc, mais tout en essayant de garder une approche à la LSNR.
Pas mal de projets et de murs ont été mis en pause à cause de la pandémie, alors j’ai bien hâte de pouvoir les réaliser dès que ce sera possible !
J’ai toujours eu la musique en parallèle au dessin, alors j’ai également quelques projets musicaux en tête que j’aimerais réaliser.
Retrouvez LSNR sur son site et sur son compte Instagram
Propos recueillis par Lou Barbato
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