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L’Œil féminin sur le rap, Roxane Peyronnenc

Léa Mourait 10 janvier 2019
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NTM au Noise Festival © Roxane Peyronnenc

Cette jeune photographe parisienne commence à se faire une place dans le milieu. Déterminée et grande travailleuse, Roxane surprend avec ses photos. Sa première exposition « L’Œil féminin sur le milieu du rap » dépeint d’ores et déjà son univers doux et coloré.

Peux-tu te présenter en quelques mots ?

Alors moi c’est Roxane, j’ai 20 ans, j’habite à Paris et je suis une passionnée de rap et de photo… du coup, je fais de la photo dans le rap.

Depuis quand fais-tu de la photo ?

Depuis toujours, enfin quand j’étais petite je piquais l’appareil de ma maman. Je lui prenais pour faire des shootings (ridicules) avec mes copines. Donc j’en fais depuis toujours, mais je m’y suis vraiment remise en avril 2017.

Qu’est ce qui t’a poussée à te lancer, d’abord de façon amateure puis professionnellement ?

Comme je viens de le dire avant, au départ c’était juste pour m’amuser avec mes copines. Quand je m’y suis remise l’année dernière, j’étais en stage pour un média et il me fallait aller sur les événements partenaires. Un jour je me suis dit : « Tiens, pourquoi pas prendre des photos ça m’occupera ». J’ai donc emprunté l’appareil d’une copine et j’y suis allée. Le soir même je retouchais les photos, et j’ai adoré ça. C’est parti de là, j ’ai tout de suite été à fond. Je passais déjà les trois quarts de mon temps en concert alors pourquoi pas en faire quelque chose d’encore plus productif.
Lorsque j’ai commencé à avoir de bons retours sur mon travail, ça m’a donné envie de m’y mettre sérieusement. Pendant des mois je n’avais même pas mon propre matériel !

LTF à la Maroquinerie © Roxane Peyronnenc

Avec le temps, de plus en plus d’artistes se rapprochent de toi, dont des grands noms du rap français et international : c’est la preuve que tu gagnes en crédibilité dans le milieu de la photo. Est-ce que tu aurais une idée de comment tu as pu, en quelques années seulement, attiser la demande comme tu le fais aujourd’hui ?

C’est une question qu’on me pose souvent et qui me flatte parce que, selon moi ça n’est pas encore le cas.
Mais avec du recul et les retours que j’ai, il y a quelque chose qui ressort: la proximité. Quand je bosse avec des artistes c’est souvent à plusieurs reprises. Donc le lien se crée, on discute, on fait part de nos envies mutuelles etc, ça facilite la création. Par exemple avec LTF que je suis depuis le début de ma carrière : leurs fans me disent souvent que grâce à moi, ils rentrent un peu plus dans leur intimité. Je pense que j’arrive, quelques fois, à montrer une autre image d’eux.
Le truc c’est que c’est un milieu hyper compétitif, aujourd’hui tout le monde est “photographe”. En photo de concert c’est encore pire mais j’ai réussi à me faire ma toute petite place parce que j’essaye d’innover souvent, de faire des collages, des retouches parfois très différentes etc.

Au mois de juin tu as exposé pour la première fois à Paris au 4 éléments, avec ton projet « L’œil féminin sur le milieu du rap ». Qu’est-ce qui t’a fait réaliser qu’apporter ton point de vue sur cet univers était nécessaire ?

J’avais déjà exposé en juillet dernier grâce au collectif Nomad. Mais là, oui c’est la première exposition que j’organise.
Quand je dis « l’œil féminin sur le milieu du rap » : c’est tout d’abord parce que je suis une femme et que le rap reste quand même principalement un milieu de mecs. (Même si aujourd’hui beaucoup de femmes y entrent, en photo, en relation presse etc). Les artistes restent très souvent des hommes et malgré tout, le milieu reste stigmatisé. La plupart des gens qui écoutent du rap, ne serait-ce qu’un petit peu, n’ont pas de clichés. Mais quand tu parles de rap à des gens qui écoutent que de la techno par exemple, ils vont te dire “Ah mais tu ne te sens pas insulté dans leurs textes ?” Ou “Ah le rap… ouais wesh wesh land”… Il suffit voir la tête de ma mère au début quand j’ai dit que je bossais avec des rappeurs…
C’était important de montrer aux plus fans, comme à ceux qui n’y adhèrent pas du tout : MA vision de ce milieu, ce que moi je voyais de ces petits mecs.
Que ceux qui y voient seulement des stars, voient les humains avant tout. Et ceux qui y voient des racailles, se rendent compte de leur douceur, aussi.
Quand j’ai exposé avec le collectif Nomad, une petite mamie est passé devant une de mes photos : c’était Lasco, rigolant, tout heureux. Elle est passée et elle m’a dit « Oh bah ils ont l’air heureux tous ces rappeurs… ils n’ont plus l’air méchant comme à mon époque… » : et ça c’était une jolie victoire.

Cet été tu as également reçu des accréditations pour le MAMA festival et Rock en Seine, quel est ton meilleur souvenir ? Qu’est-ce que ces expériences t’ont apporté ?

Le Mama Festival est un festival que j’ai couvert deux années de suite, avec chaque année avec un média différents. Rien de bien fou. Il y a deux ans j’y étais seulement bénévole, à faire des tâches de merde… C’est une sacrée fierté d’être passé du bénévolat, à journaliste photo l’année d’après. Donc c’est un festival qui me fait plaisir parce que c’est une période qui me sert de repère pour me dire : « ah tu peux être fière de toi ».
Mon meilleur souvenir se passe à Rock en Seine. J’étais envoyé par un média, mais on me l’avait un peu mis à l’envers pour les accréditations photo. J’avais un pass média les premiers jours pas d’accès au crash-test devant… donc les deux premiers jours, j’ai lâché l’affaire et j’ai juste profité.
Et le 3e jour j’ai réussi à passer avec mon matos en disant qu’un copain à moi jouait et m’autorisait à prendre des photos (Merci Lord). Et c’était une super belle journée durant laquelle j’ai pu photographié Lord Esperenza et Post Malone, qui jouait ensuite. C’est un artiste que j’adore mais que je n’avais encore jamais vu.
Je me suis retrouvée tout devant, dans le public, c’était totalement la merde : Je n’arrivais pas à prendre de photos je ne me sentais pas bien, hyper angoissée avec la foule, je suis sortie de l’attroupement, hyper triste, hyper frustrée.
Puis au lieu de lâcher je me suis mis un coup de pied au cul en me disant que je ne pouvais pas louper cette occasion. J’ai donc fait le tour de la foule, malgré mon angoisse. J’ai trouvé une place, LA place, et j’ai pu shooter tout le show. J’en suis très fière.

LORD ESPERANZA à Rock en Seine © Roxane Peyronnenc

Quel est ton meilleur souvenir de shooting durant cette dernière année ?

C’est la question la plus dure pour une photographe ahah… Bon je vais un peu tricher et t’en citer deux : un concert et un shooting.
Pour le concert : $uicideboy$ à la Maroquinerie en 2017. C’était un sacré rêve de pouvoir bosser avec un de mes groupe préféré… Je m’étais retrouvée sur scène avec eux alors que l’accès backstage était réservé aux membres de l’équipe et du staff. C’était mon premier vrai concert avec des artistes internationaux, je n’y croyais pas.
À la fin du show leur équipe m’a carrément proposé d’enchainer et de les suivre sur leur autre concert après, mais j’ai dû partir travailler : le regret de ma vie. C’était mon premier GROS souvenir en tant que professionnelle en tout cas.  Une jolie concrétisation. Récemment j’ai bossé sur le show de Pouya et des Flatbush Zombies… Même chose, c’était comme un rêve.

Pour le shooting hors concert c’est sur le tournage d’un clip. Celui de La Loge (Sheldon, 1spire et M le Maudit) mais ce sont particulièrement les photos de Sheldon qui m’ont marqué.
Premièrement parce que Sheldon est un artiste que j’admire, vraiment, autant pour son art que pour sa personne. Et ensuite parce que pour le coup, il n’a pas beaucoup… voire pas du tout de photo de lui.
Après ce tournage j’ai transféré les photos toutes simples. Mais je voulais marquer le coup. C’était un artiste important à mes yeux qui méritait quelques choses à la hauteur de ce qu’il nous donne musicalement. Alors j’ai commencé à faire des collages, des test… Je voulais me faire plaisir et lui faire plaisir. Il bossait autour d’un projet avec le mot Lune dedans… Ce qui a donné les photos de Sheldon et la lune. Je crois que c’est le premier shoot où j’ai vraiment eu beaucoup de retours positifs. Des gens m’envoyaient des captures d’écran des photos en fond d’écran de leur téléphone. C’est un très bon souvenir pour une très belle personne.

SHELDON : copyright © Roxane Peyronnenc

Mais en dehors de ça, tous les moments avec mon équipe : LTF / ATL4S sont mes meilleurs souvenirs. Déjà parce que ce sont les premiers à avoir soutenus mon travail et qu’aujourd’hui ils sont devenus des amis.

A ce jour, quelles sont tes ambitions professionnelles ?

Honnêtement, je rêverais d’être photographe à temps plein. Mais c’est compliqué de gagner sa vie exclusivement grâce à cette activité… Mais surtout j’aime toucher à pleins de choses. En fait, mon ambition est simplement de n’avoir aucun métier précis.

Je veux pouvoir être libre de m’exprimer de n’importe quelle façon. Toujours dans le milieu musical, et du rap particulièrement. Actuellement, j’étudie encore. Je suis en école de médiation et production culturelle, ce qui veux dire que je peux faire un maximum de chose.
Demain je peux être directrice de salle, comme manageuse d’artiste… Ou encore journaliste. Alors pourquoi pas être tout ça à la fois…

As-tu de nouveaux projets en préparation ?

J’ai toujours pleins de projets, ça maintient l’esprit en vie. Mais le principal et le plus important à mes yeux : c’est que je prépare pour avril/mai 2019 : une grosse exposition avec beaucoup de surprises. Des DJ sets, des shows d’artistes avec qui j’ai travaillé etc. Je l’organise pour célébrer mes 2 ans en tant que petite photographe dans ce milieu. Ça va être une grande soirée, mais j’ai encore beaucoup de choses à préparer avant d’annoncer tout ça… mais ça arrive.

Pour suivre l’actualité de Roxane : @roxanepeyronnenc

 

© Roxane Peyronnenc

Léa Mourait

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