Liquid Ox : “Je vois constamment l’inspiration, je la modèle à l’image du sujet”
Ne passons pas à côté de tant de créativité : Océane, jeune artiste bordelaise, nous dévoile sa vision artistique et ses futures expositions.
D’où te vient ta passion pour l’art ?
Je ne parlerai pas de passion mais d’épanouissement. Dans ma vie, j’ai eu plusieurs aventures qui ont toutes fait le tour du “cercle des émotions”. J’ai eu un déclic en mars 2019 où je voulais mettre en réel mes émotions, les manifester. En fait, ce que je ne peux pas dire ou expliquer, je le peins. J’ai d’abord commencé sur toile, puis j’ai recherché un objet qui, pour moi, symbolise la persévérance et la destruction. J’ai eu l’idée du skateboard, avec qui j’ai eu de base une relation durant mon adolescence. C’est un objet qui me fascine, d’une part par sa forme et de l’autre, par ce qui le caractérise.
Tu diversifies tes créations en réalisant des toiles, des collages – street art, mais aussi des montages numériques. Peux-tu nous en dire plus sur ton univers ?
Au départ je m’exprimais seulement avec la peinture. Puis je me suis rendu compte qu’il existait beaucoup plus d’outils qui me permettraient d’être pointilleuse sur certains sujets. Je suis constamment à la recherche de nouveauté, c’est ce qui m’a amené à découvrir d’autres univers artistiques.
Quelle est ta démarche artistique ? Plutôt spontanée ou réfléchie ?
Je conduis mon raisonnement d’une façon particulière. Je pioche dans mon cerveau ce que je souhaite exprimer.
Soit je cogite des jours, soit ça vient spontanément ; tout dépend du sujet. J’ai toujours une ligne directive par rapport à une collection, la plupart du temps le fil conducteur reste mais je viens souvent rajouter, enlever ou déformer des idées. Je vois constamment l’inspiration, je la modèle à l’image du sujet.
Quelle technique utilises-tu pour la réalisation de tes skates ?
Pour les skates, comme pour d’autres supports, j’utilise plusieurs techniques ; le pouring et le dripping. Ces techniques sont à base d’acrylique, je fabrique moi-même ma peinture en y rajoutant des ingrédients (classés top secret). J’ai mis longtemps à perfectionner mes recettes.
J’adore cette technique, elle me surprend par sa maniabilité comme par son énergie. Je peux la laisser travailler seule mais je préfère l’accompagner et lui donner une trajectoire, un but.
Sur ton travail sur planche, ton style tend parfois vers des estampes japonaises, as-tu eu des inspirations / influences particulières ?
Sur ma dernière collection j’identifie chaque planche à un mythe. Qu’il soit asiatique, antique ou divin, j’aime la magie des vieilles histoires. Avec beaucoup de pudeur je m’applique à garder une part de mystère. Pourquoi ? Car j’ai pour vocation de laisser l’imagination percevoir les émotions.
Tu associes régulièrement des descriptions à tes œuvres comme “Ô, Rita, épouse admirable du crucifié qui te fit don d’une des épines de sa couronne, aide-moi à bien vivre et à bien mourir”, d’où cela vient-il ?
Je puise mes descriptions dans mes connaissances personnelles. La plupart du temps, je jongle avec les mots afin de rester subtile et pudique dans l’interprétation de l’œuvre. Là, il s’agit d’une phrase tirée d’une prière destinée à Sainte Rita, la sainte des causes désespérées. Elle résume parfaitement l’œuvre à mes yeux.
Tu as déjà été exposé à neuf reprises dont à Darwin, au Hangar FL, au OG shop coffee skate, aux Vivres de l’art…. Quelles seront tes prochaines aventures ?
J’ai eu énormément de chance de pouvoir exposer si tôt. Je tiens à remercier tout particulièrement l’Astrodome avec Pierre Alexis Mengual et son équipe, qui m’ont fait confiance pour ma première exposition à Darwin. Puis le café Petit Grain, le OG shop de Libourne, le Hangar FL, les Vibrations Urbaines, le Crédit Mutuel de Pessac, les Vivres de l’art, le collectif SoundRising, le collectif Fugitiv et le CVLV PSR. J’aurai la chance de pouvoir exposer le 13 juillet avec le collectif Demain Kollectiv, le 04/05 septembre au festival Millesime de la Réole, puis en octobre aux Vivres de l’art avec le collectif Multiverse. Merci encore à eux de me faire confiance.
On observe un certain intérêt de ta part pour la cause de la femme notamment à travers FEM O ou encore Femme grisonne, peux-tu nous en dire plus ?
Ces œuvres-là font partie de la collection « ASPHYXIE ». Sombre, je démontre la misogynie, le respect perdu, le mépris, l’étouffement accablant de ces hommes ; ceux qui arrachent le cœur, ceux qui frappent, ceux qui violent, ceux qui dénigrent. J’y ai mis énormément de colère, de rancœur et de peine.
Dans cette collection je suis passée par une transition artistique où je trouve important d’utiliser autre chose que la peinture, j’avais besoin d’assembler pour construire le futur. Parce que c’est mon but de crier au monde la beauté la plus obscure.
Tu tends vers une démarche écoresponsable en faisant de l’upcycling, rencontres-tu des difficultés particulières ?
Au contraire, dès le début j’ai pu trouver des planches via mes amis. Puis après avoir contacté le OG Shop de Libourne, ce skate shop est devenu ma référence pour me fournir en plateaux. Je suis heureuse de donner une vie éternelle à cet objet qui me tient à cœur.
Que penses-tu de la place de l’art dans la société actuelle ?
Comme dans toutes les sociétés passées ou futures je pense que l’art est un moyen de synthétiser le présent. Que ce soit politique ou personnel, c’est une histoire que chacun raconte à sa manière, ce qui rend l’art unique et temporel.
Cherches-tu à véhiculer quelque chose en particulier à travers tes œuvres ? Leur donnes-tu un sens précis ?
Chaque collection a une histoire autour d’un seul sujet. Donc chaque œuvre est une page d’un univers, je ne cherche pas à faire passer un message ou à militer. J’exprime ma perception et ma vision de la beauté, mon but étant de laisser s’évader l’imaginaire d’une personne tout en la guidant.
Pour finir, quel est ton souhait le plus précieux ?
Mon souhait le plus précieux a déjà été réalisé et continue à l’être. C’est de savoir qu’une personne possède une œuvre, accrochée dans un salon à Saint-Martin-de-Sescas, au-dessus d’un lit à Paris, ou qu’une personne fait un kick flip à Toulouse avec l’une de mes planches. Je laisse des fragments de mon existence un peu partout en France, cela me remplit de fierté.
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Propos recueillis par Elise Marchal
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