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Laurence Pustetto : “La création est la noblesse de notre humanité”

21 juin 2021
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Laurence Pustetto © Marine Foni

Entretien avec Laurence Pustetto, galeriste à la Maison Galerie Laurence Pustetto à Libourne, en région bordelaise. Grande passionnée, collectionneuse depuis ses 16 ans, elle ne peut vivre sans art et a décidé d’ouvrir en janvier 2020 sa galerie d’art pour défendre ces artistes qu’elle aime tant. Elle nous parle ici de cette maison galerie, carrefour des arts plastiques entre sculpture, peinture et artisanat d’art, valorisés par une mise en scène intime et réfléchie. 

Pouvez-vous vous présenter ? 

Je m’appelle Laurence Pustetto. Je suis autodidacte et j’ai fait mes premiers pas professionnels dans le milieu du théâtre, de la danse et de l’opéra, du côté de la scénographie et du design costume. J’ai 30 ans d’activité pour le luxe, toujours du côté de la scénographie événementielle, de l’architecture d’intérieur et du design d’objet.
Je suis une “petite” collectionneuse mais une vraie collectionneuse dans le sens où j’ai un vrai besoin de vivre avec l’art et d’en être entourée. Je ne sais pas comment on fait pour vivre sans. J’ai vécu 17 ans dans une maison que nous n’avons jamais fini de restaurer, il n’y avait pas de cuisine aménagée, pas de chauffage central mais dès que possible, nous achetions des œuvres d’art. Je préférais ne pas avoir de chauffage que de manquer d’œuvres d’art ! L’art nourrit, c’est un concentré d’énergie qui nous est renvoyé en permanence. C’est fascinant.

Pouvez-vous présenter votre galerie d’art ?

C’est une maison galerie. J’ai choisi de faire intervenir la mise en scène des œuvres dans un espace quotidien, pour que cela puisse évoquer au visiteur un espace familier. C’est une maison girondine dans laquelle sont présentées des oeuvres d’art qui ne pourraient pas co-exister dans une galerie traditionnelle. Celles-ci sont mises en scène comme le ferait un collectionneur, éclectique dans ses choix. Cela permet aussi de visualiser comment on peut vivre avec des œuvres d’art dans une maison.

Maison Galerie Laurence Pustetto
© Marie Houssay

Pourquoi avoir ouvert une galerie d’art, après 30 ans dans le luxe ? 

Parce que je suis fascinée par les artistes. Je trouve que ce sont des héros. La création est la noblesse de notre humanité, des artisans d’art aux artistes. J’avais envie de me nourrir de cette noblesse là et de la partager. Il a fallu du temps pour mettre ce projet en exécution. C’était aussi une suite logique des métiers que j’ai fait, de mon parcours. C’est un lieu qui rassemble tout ce que j’aime : l’architecture, la façon dont on habille et habite un intérieur, et l’art.

Quel type d’art présentez-vous ?

Je fais des choix très éclectiques. L’art est une histoire de rencontres et d’émotions.
J’aime énormément le travail de Claire Espanel avec son univers fantasmagorique et de Chris Pillot avec ses œuvres hypnotiques, qui sont toutes les deux exposées à la Maison Galerie, alors que leurs expressions sont sans point commun. Ce sont ces oppositions qui sont intéressantes. Dans tous les cas, cela nous parle du processus créatif et de l’imaginaire, de nous.
En fait, je n’ai pas de ligne artistique au sens strict. Pour moi, ça va être un mélange d’émotions et d’admiration sur une technique, sur un univers… Je présente de la sculpture, de la peinture, des métiers d’art, bref, tout ce qui allie un savoir-faire et de la création à une certaine qualité artistique.

Comment avez-vous été sensibilisée à l’art ? 

Par mon père. Il était sculpteur de formation et architecte pour nourrir sa famille. Il n’était pas collectionneur mais il était hypersensible à l’art. Cela a commencé très doucement, il me laissait dessiner dans son bureau et m’emmenait aux cours de modelage. À 16 ans, mes parents m’ont emmenée en Hollande, mon père m’a fait découvrir les primitifs flamands qui le fascinaient. J’ai acheté ma première œuvre sur un marché d’Amsterdam. Ce n’était pas une grande œuvre mais c’était ma première œuvre ! Et ensuite il y a eu des rencontres, l’éducation de l’œil, mon désir de me cultiver… J’ai évolué dans ce monde.

Laurence Pustetto avec une œuvre de Marc Perez
© Eva Sanz

Pourquoi un artiste devrait -il passer par une galerie d’art ?

Un artiste tout seul ne peut être dans son atelier et s’occuper de la promotion, de la presse, des collectionneurs. Être artiste c’est un sacerdoce qui engage tout : l’âme, le corps et l’esprit. C’est un métier qui se réfléchit sans cesse. La création est à temps plein. C’est un métier d’une exigence colossale. On ne peut pas être artiste de 8h à 12h uniquement. C’est pour ça que les galeries sont là, pour défendre et soutenir des artistes sur plusieurs années. Elles permettent aussi de construire un discours, de transmettre, parce qu’un artiste est rarement la bonne personne pour parler de son travail. Bien sûr il y a des exceptions, comme Picasso qui était très bon commercialement mais surtout soutenu par de très bons marchands.

À quoi ressemblent vos journées en tant que galeriste ?

Bureau, bureau, bureau ! Malgré tout, les journées ne se ressemblent pas : il faut s’occuper de l’accrochage et le changer régulièrement pour renouveler la curiosité, recevoir le public, rencontrer de nouveaux artistes et visiter leurs ateliers, écrire des textes, préparer les expos suivantes, contacter la presse, solliciter les collectionneurs, communiquer, et bien d’autres choses ! Mais il y a aussi beaucoup d’administratif qui prend un temps infini. Il faut y croire très fort, c’est un métier incertain et passionnant.

Quel conseil donneriez-vous à quelqu’un qui souhaiterait ouvrir une galerie ?

Ce n’est pas vraiment un conseil mais il faut qu’il soit conscient que c’est un temps plein, que ce n’est pas un modèle économique très simple. C’est presque comme un artiste, il n’y a pas d’horaires précis, on y pense de jour et de nuit, tout est tourné vers cela. Il y a besoin de beaucoup de finances aussi et surtout de la passion. Mais c’est un engagement qui n’enlève pas le plaisir !

Laurence Pustetto et le sculpteur Marc Petit
© Marie Houssay

Avec l’essor de la vente d’art en ligne, pensez-vous que les galeries physiques sont amenées à disparaître ?  

Je pense que c’est comme pour les livres. À l’arrivée des tablettes, on pensait que les livres disparaîtraient mais ce n’est pas le cas. Une œuvre d’art, on doit la voir, la ressentir. La vente numérique ne peut pas remplacer une galerie d’art. D’ailleurs, l’un ne remplace pas l’autre. Par expérience, je sais que les visiteurs préfèrent quand la galeriste fait la visite pour avoir des clés de compréhension. Il y a donc un rapport à la connaissance qui est très important et que l’on ne retrouve pas dans la vente en ligne.

En 3 mots, comment définiriez-vous votre Maison Galerie ?

Je dirais qualité, accueil et éclectisme.

 

Retrouvez la Maison Galerie Laurence Pustetto sur son site web, Instagram, Facebook et Twitter.

Les expositions en cours et à venir :

  • Jusqu’au 30 juin : Exposition Indigo
  • Du 26 juin au 1er août : Exposition 21 grammes
  • Du 17 septembre au 30 octobre : Exposition Comédies Humaines
  • Du 18 novembre au 10 janvier : Exposition Vibrations

 

Propos recueillis par Marie Houssay

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