Laget81 : “’Le sport, la mode et la basket sont mes sources d’inspiration”
Ancien footballeur professionnel, Laget81 développe depuis deux ans et demi un art engagé, inspiré du pop art. Il expose actuellement à la Champop Galerie à Paris et chaque été, à la Galerie Palmer de Saint-Tropez. Pour lui, l’art est chargé d’émotion et porteur d’un message, aussi bien positif que négatif.
Peux-tu te présenter en quelques mots ?
Je m’appelle Gaël Laget, j’ai 38 ans. Je suis de Martigues, à côté de Marseille. J’ai joué en deuxième division comme footballeur professionnel. C’est à la suite d’une blessure, à l’âge de 28 ans, que j’ai commencé à préparer ma reconversion. Je me suis tourné vers l’aéronautique, chez Airbus. Cela m’a permis d’avoir plus de temps pour mettre en pratique mon autre passion, l’art.
Qu’est-ce qui t’a donné l’envie de créer ?
J’ai eu la chance de pas mal voyager. À New York, j’ai visité le MoMA. Découvrir en vrai les œuvres que j’avais pu voir dans les livres, a éveillé en moi un désir de créativité. J’ai été touché par l’art contemporain. Mon grand frère m’a aussi fait découvrir de grands artistes, en particulier Jackson Pollock. Ce dernier représentait pour moi une conception nouvelle de création, avec ses toiles posées sur le sol, sur lesquelles il projette de la peinture, en tournant autour d’elles. J’aime également le street art.
Tu as réalisé différents tableaux autour de la basket. Pourquoi ce choix ?
Depuis tout petit, mon univers c’est le sport, avec des idoles comme Michael Jordan. Quand j’ai voulu créer, le sport, la mode et la basket étaient mes sources d’inspiration. La basket occupe aujourd’hui une grande place dans les défilés de mode comme ceux de Louis Vuitton, Dior, Chanel… Un réel marché de collectionneurs se développe depuis plusieurs années.
Le soldat en plastique est le point central de ton travail aujourd’hui. Que signifie-t-il pour toi ?
Les petits soldats en plastique étaient le jouet de mon enfance. Je choisis de les peindre selon ce que je souhaite représenter. Je les colle, les assemble, pour leur donner la forme désirée sur une toile. Pour moi, l’art c’est l’émotion. Mes soldats, la perspective et le relief donnent un aspect vivant à l’œuvre. Quand je partage un tableau, c’est une part de moi-même que je laisse. J’utilise entre 400 et 500 soldats pour une basket Jordan et jusqu’à 4 000 soldats pour un maillot.
Une démarche ludique “Où est Charlie ?” ressort de tes tableaux. Peux-tu nous en dire plus ?
Quand on regarde mes toiles dans leur ensemble, si l’on observe bien, on découvre parmi tous les soldats, un soldat unique, caché. Ce dernier est porteur d’un message. Prenons l’un de mes tableaux. La basket Nike devient ici l’image d’une grosse entreprise, dans laquelle une multitude de soldats s’acharnent au travail. Parmi ces soldats, se cache un espion au sein de l’entreprise. Il s’agit de montrer que dans chaque entreprise plus ou moins grosse, un espion d’une marque concurrente cherche à récupérer des informations. Le “Charlie” ici, est le soldat qui porte une paire d’Adidas au pied, ce qui permet de le distinguer de la marque Nike qui représente l’entreprise. Je travaille chez Airbus, où l’espionnage est en effet une réalité. Le soldat peut aussi être un clin d’œil. Quand j’ai créé le maillot du basketteur Michael Jordan, le soldat unique porte la tenue de baseball qu’il avait lorsqu’il jouait dans l’équipe des White Sox de Chicago. Quasiment personne ne sait qu’il a aussi été joueur de baseball.
Quel lien fais-tu entre tes soldats, tes baskets et tes maillots ?
La première chose qu’on fait avant de sortir, c’est de mettre ses baskets, ses chaussures, pour aller combattre la vie. J’ai voulu exprimer ce combat qu’on mène pour garder la santé, l’amour et son travail. Pour mes maillots, il s’agissait de représenter la mentalité française, et plus particulièrement l’image que certaines personnes se font de la réussite, souvent synonyme de jalousie en France. Le travail réalisé en amont pour y arriver est oublié. La multitude de soldats est le symbole d’un travail acharné avant d’atteindre la réussite.
Peux-tu nous parler de l’un de tes derniers projets ?
Je viens de terminer un projet qui rend hommage à de grands artistes qui m’inspirent, comme Jean-Michel Basquiat, Keith Haring, Banksy, Jeff Koons, ou encore Andy Warhol. Ma toile centrale représente la Statue de la Liberté, avec un bout de carton sur lequel est écrit “HELP”. Fan des États-Unis, je me suis imprégné du monde dans lequel nous vivons actuellement, en prenant une image forte, symbole de la liberté, pour exprimer que nous ne sommes pas libres. Aujourd’hui, quand quelqu’un veut transmettre un message, il descend dans la rue avec un carton sur lequel est inscrit son propos. J’ai choisi d’enlever sa flamme, pour dire que c’est la liberté qui demande de l’aide.
Certaines de tes œuvres ont été vendues aux enchères caritatives. Est-ce quelque chose qui te tient à cœur ?
Un jour, le PSG m’a contacté pour le Gala de la fondation. C’était une soirée chargée d’émotion, le foot était relié à mon autre passion, l’art. Donner un tableau pour les bénéfices d’une association œuvrant pour les enfants défavorisés était important pour moi. J’ai réalisé pour eux un maillot de Michael Jordan. J’étais très ému, de la création jusqu’à la mise en vente. L’œuvre a été adjugée 160 000 euros, à un collectionneur.
Comment as-tu vécu cette période de confinement ?
La seule chose qui a changé pour moi avec le confinement, c’est le manque de matériel. Ma vie n’a quant à elle pas changé car je travaille. À un moment, j’ai eu besoin de l’exprimer. J’ai choisi de réaliser Marianne, avec un masque. J’ai voulu représenter le symbole de notre France, du réel combat que nous vivons aujourd’hui. On n’est rien sur terre. Il suffit de quelque chose d’invisible, d’un virus qui peut anéantir, pour nous faire sentir impuissant. Pour cela, il faut réagir. Pour moi, c’est un message d’espoir.
Plus d’informations sur ses pages Facebook et Instagram.
Propos recueillis par Anastasia Le Goff.
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