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La Tour LUMA, un projet controversé

Léopold Bret 30 décembre 2022
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La Tour Luma © Adrian Deweerdt

Depuis plus d’un an maintenant, la ville d’Arles a vu s’ajouter à son panorama un nouveau bâtiment des plus particuliers : la Tour LUMA. Associé à la fondation du même nom, ce centre culturel et artistique accueille des expositions, des conférences, du spectacle vivant, ainsi que des résidences d’artistes. Même si bien accueilli par le monde de l’art, ce bâtiment ne fait en réalité pas l’unanimité. 

Une tour par comme les autres

En 2004, Maja Hoffmann crée la fondation LUMA à Zurich, en Suisse, qui a pour ambition de promouvoir la création artistique visuelle comme la photographie ou encore les films documentaires. Ce n’est qu’en 2013 que la fondation s’implante au Parc des Ateliers à Arles, ville notamment réputée pour son école de photographie et son festival, Les Rencontres de la photographie d’Arles. Le Parc des Ateliers, ancienne friche ferroviaire d’environ 11 hectares, abrite plusieurs infrastructures liées à la vie culturelle et la Tour LUMA a pour volonté de faire dialoguer ces différents acteurs. En effet, l’ambition de Maja Hoffmann était de créer un complexe interdisciplinaire de l’art, une sorte de lieu vivant dans lequel viendraient dialoguer toutes les formes d’expression artistique. Après 7 ans de travaux, la tour est inaugurée au début de l’été 2021.

                             “S’il y a une image, une métaphore pour cette institution du 21ᵉ siècle, c’est celle d’un organisme vivant. Là où la question n’est plus de savoir si les espaces sont ouverts ou fermés mais sur quel mode ils fonctionnent à l’instant présent : là où toujours, quelque part, quelque chose se passe. Un archipel biologique…” Maja Hoffmann

Un projet ambitieux

Bien qu’intrigante, la tour LUMA demeure finalement assez classique dans ses activités. Ce qui la démarque des autres fondations, c’est que le projet a été conçu non seulement avec une certaine volonté de s’impliquer localement – c’est-à-dire participer à la vie des arlésiens et arlésiennes, et non pas s’adresser uniquement aux étudiants de l’école de photographie qui se situe juste en face ou aux amateurs d’art contemporain – mais aussi avec une conscience écologique : construction avec des matériaux responsables comme des biocarburants locaux ou encore l’utilisation de panneaux solaires. C’est donc une institution consciente de son environnement et de son impact que le projet LUMA désire incarner.

Prenons l’exemple du bâtiment lui-même. Son architecte, Frank Gehry, a décidé de créer une forme originale, comprenant 10 étages tous différents les uns des autres, recouverts de blocs d’acier inoxydable et de nombreuses verrières en forme de niches, situées tout autour du bâtiment. Inspiré de la région camarguaise dans laquelle se situe Arles, Gehry tente de recréer une sorte de bâtiment vivant, d’organisme artistique, tout en reprenant des formes rappelant les arènes romaines ou les blocs rocheux des Alpilles.

Le Parc des Ateliers et son arrangement © D.R.

Un projet qui semble manquer sa cible

Malgré toute cette bonne volonté, la tour ne fait pas l’unanimité, en particulier auprès des habitants de la ville. Tout d’abord pour des raisons purement esthétiques, bon nombre d’arlésiens et arlésiennes trouvent que l’architecture du bâtiment dénote avec celle de la ville. L’architecte de renom Frank Gehry choisit une esthétique moins accessible que l’architecture classique du reste de la ville. La “modernité” de la tour laisse les habitants perplexes, qui se sentent exclus de ce monde culturel. Nombre d’entre eux considèrent que les professionnels et amateurs du monde de l’art sont les seuls à pouvoir apprécier ce bâtiment et qu’il ne leur est pas destiné. Avec ses 56 mètres de hauteur, la tour d’inox s’impose largement dans le panorama de la ville, où elle dépasse le reste des constructions et demeure visible de presque partout.

Vue extérieure de La Tour imaginée par Frank Gehry, mai 2021 © Adrian Deweerdt

Mais les critiques ne s’arrêtent pas là ; plusieurs journalistes d’Arles rappellent que plus d’un arlésien sur trois ne se sent pas concerné par les activités culturelles de la ville. Ce que la tour symbolise, c’est en réalité la fracture sociale entre les locaux et le monde de l’art, deux mondes parallèles qui habitent la même ville mais ne se mélangent pas. La tour, malgré son discours incluant, a été conçue pour la deuxième population et perpétue une exclusion sociale et culturelle de la première. Se voulant un lieu d’innovation et de changement, elle répète des schémas préétablis, que ce soit dans son architecture ou encore dans sa programmation – les artistes exposés étant déjà bien établis dans le monde de l’art, à l’instar d’un Olafur Eliasson.

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