L’innocence archaïque du Douanier Rousseau
Le Douanier Rousseau – L’innocence archaïque Jusqu’au 17 juillet 2016 Plein tarif : 12 € Musée d’Orsay M° Solférino |
Jusqu’au 17 juillet 2016 Véritable ovni de la planète “histoire de l’art”, le Douanier Rousseau a séduit, influencé, marqué les avant-gardes du début du XXe siècle. Le musée d’Orsay tente de percer le mystère de cet artiste autodidacte, nourri par la peinture académique mais qui a su imposer son trait à la fois naïf et maladroit comme une nouvelle voie à la modernité. Rien que ça ! Il va apprendre seul, en observant les peintres classiques, en analysant de façon descriptive les maîtres du musée du Louvre. Il ne regarde cependant pas du côté des avant-gardes, c’est comme si dans un premier temps il trace sa propre voie sans s’inspirer de la révolution artistique en marche. Lorsqu’un douanier rêve de la peinture académique Manet a déjà fait scandale quelques années auparavant avec son Olympia dévoilée au Salon de 1865, le groupe des Impressionnistes a bousculé à son tour le bon bourgeois de la IIIe République avec leur première exposition en 1874 et le néo-impressionnisme est en train de prendre le pas avec Georges Seurat, Paul Signac et Henri-Edmond Cross en tête.
Un “peintre du dimanche” ? Celui qui s’appelle encore Henri Rousseau (1844-1910) a traversé toutes ces années employé à l’octroi de Paris, d’où le surnom de “Douanier” que lui donnera son ami Alfred Jarry. Qualifié par certains biographes de “peintre du dimanche”, il est fasciné par la peinture académique dont il essaie de comprendre les codes, mais là n’est pas sa voie. Son premier biographe Wilhelm Uhde écrit dans sa monographie de 1911 : “Rousseau est en face de la nature comme un enfant. Pour lui, elle est chaque jour un événement nouveau dont il ignore les lois. Il y a à ses yeux derrière les phénomènes quelque chose d’invisible qui en est pour ainsi dire l’essentiel.” Naïveté Sa peinture en est toute empreinte, ce qui l’amène comme une évidence à peindre des jungles luxuriantes comme théâtre d’un paradis perdu ou tout simplement rêvé. Apollinaire écrira en 1914 : “Rousseau est sans aucun doute le plus étrange, le plus audacieux et le plus charmant des peintres de l’exotisme.” C’est comme s’il avait cultivé une sorte de maladresse pourtant bien contrôlée – toutes les proportions sont mesurées –, devenue son style, sa marque et qui a bouleversé des Picasso, Delaunay ou Léger, mais aussi les artistes de l’avant-garde italienne et allemande au premier rang desquels Kandinsky. Ils ne l’ont pas seulement admiré au point de s’en inspirer pour leur propre travail, mais l’ont collectionné. Une nouvelle voie pour la modernité Pourquoi ? Tout simplement parce qu’avec ses représentations à plat faisant fi de toutes les règles de la perspective, cette exactitude du détail presque chirurgicale, ces paysages figés comme hors du temps baignés par une atmosphère silencieuse répondaient à cette recherche que tous partageaient alors : réinventer la peinture. Le Douanier Rousseau figure ainsi comme celui qui ouvre la nouvelle voie de la modernité. Stéphanie Pioda [Photo le Douanier Rousseau : La Charmeuse de serpents, 1907, huile sur toile, musée d’Orsay, Paris © RMN-Grand Palais (musée d’Orsay) / Hervé Lewandowski / Les Représentants des puissances étrangères venant saluer la République en signe de paix, 1907, huile sur toile, musée Picasso, Paris © RMN-Grand Palais (musée Picasso de Paris) / René-Gabriel Ojéda / Portrait de femme, 1895, huile sur toile, musée Picasso, Paris © RMN-Grand Palais (musée Picasso de Paris) / René-Gabriel Ojéda / Le Rêve, 1910, huile sur toile, The Museum of Modern Art, New York © 2016. Digital image, The Museum of Modern Art, New York / Scala, Florence / La Guerre, 1894, huile sur toile, musée d’Orsay, Paris © musée d’Orsay, dist. RMN-Grand Palais / Patrice Schmidt / Pour toutes les photos © ADAGP, Paris 2016] |
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