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Joan Miró, peintre poète – Fondation ING

23 avril 2011
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23-Page_de_couverture_FR

S’il est bien un qualificatif applicable à Miró, c’est : poète. Car qu’est ce que la poïesis en grec ? La technique artisanale. Or, qui peut se proclamer plus de l’artisanat que Miró, brillant Surréaliste, génial bricoleur des mots, des concepts et des sens, modeste amuseur public et profond créateur ? Son œuvre (souvent des compositions monumentales) est martelée de thèmes récurrents, simples et puissamment évocateurs : la femme, l’oiseau, la nuit, l’étoile… Joan Miró puise dans sa Catalogne natale, dans la couleur crue de l’Espagne, pour faire ressentir le mot qui suit le sentiment.

S’étant rapproché puis éloigné du groupe surréaliste (dont il n’oubliera jamais les leçons), l’artiste crée une nouvelle réalité facilement identifiable : le mouvement, la couleur, une géométrie tout à la fois organique et abstraite. Ce n’est pas un hasard si l’exposition est présentée en face du Musée Magritte : la technique diffère, mais les deux hommes avaient compris que la beauté naît de « la rencontre fortuite sur une table de dissection d’un parapluie et d’une machine à coudre » comme l’assurait Lautréamont. C’est de cet absurde que jaillit la poésie : rien de pesant, rien d’explicite, on est loin de la pesanteur hugolienne. Tout comme Apollinaire, Miró privilégie le mouvement pur, le trait calligraphique évoquant une silhouette furtive. Cette parenté entre le Catalan et l’auteur des Calligrammes est soulignée par un bloc à dessin rempli de poèmes et de prose poétique, réalisé de 1936 à 1939, alors que l’Espagne sombrait dans la guerre civile et que le peintre manquait de moyens de création.

30-Le_cheval_de_cirque_FRUne des premières œuvres marquantes est la série « Portaits de Miró » : déjà une collaboration, en 1938, entre l’artiste et Louis Marcoussis. L’évolution des différentes œuvres de cette série tend à montrer une forte imprégnation progressive du sujet. Le chaos créatif envahit peu à peu le premier élément épuré avant de devenir au final, le vrai sujet de l’œuvre.

Le visiteur est ensuite invité à tourner autour d’une ronde de sculptures observables sous toutes les coutures. Parmi elles, l’étrange Les Trois cheveux magnétiques de la belle blonde attirant les papillons, une sorte d’oiseau comique, dépenaillé (1969).

L’un des temps forts de l’exposition réside certainement dans la présentation de la série « Constellations », mystérieuses métaphores graphiques accompagnées de textes d’André Breton, lithographies aux titres énigmatiques : Personnages guidés dans la nuit par les traces phosphorescentes des escargots, Le Crépuscule rose caresse le sexe des femmes et des oiseaux… Comme dans les jeux « point à point » où nous reliions différents numéros dans notre enfance, le dessein de l’artiste apparaît peu à peu, au sein de « cette obscure clarté qui tombe des étoiles », constituée de spires, étoiles, soleils, yeux, échelles, araignées…

Les bibliophiles seront également comblés par les planches originales de Parler seul, un livre réalisé en collaboration avec Tristan Tzara en 1950. L’édition originale était illustrée de 72 lithographies en noirs et en couleurs, avec un tirage limité à 253 exemplaires signés par l’auteur et l’illustrateur. Les textes du père du Dadaïsme sont absolument splendides. Un peu plus loin, on découvre les haïkus illustrés par Miró, qui sonnent comme une évidence : en mettant sa création au service de ce court exercice de style, l’artiste renouvelait ses exigences de liberté dans la rigueur.

La dernière partie de l’exposition invite à découvrir une partie méconnue de son oeuvre, notamment son travail sur le textile. En effet, Miró renoue en 1970 avec l’art du tissage et du tressage qu’il avait déjà appréhendé. Il trouve dans cet art, qu’il considère comme l’un des plus vieux de l’humanité, un moyen d’expression naturel, encore vivace dans sa Catalogne natale.

Au sous-sol, un énorme atelier pédagogique initie les petits et les grands à la création vivante et métaphorique de Miró, par le biais d’outils plastiques (glaise collage, peinture), mais aussi de théâtres de marionnettes, livres, photos…

Mathilde de Beaune

Joan Miró, peintre poète

Du 24 mars 2011 au 19 juin 2011

Tous les jours, de 10h à 18h
Nocturne jusqu’à 21 h le mercredi

Tarifs à partir de 8€ consultables sur le site

Espace culturel ING
Mont des Arts/Place Royale 6
B-1000 Bruxelles
M° ligne 2 (arrêt Porte de Namur)

www.ing.be

[Visuels : en haut, Joan Miró, Page de couverture de la série Constellations, 1959, lithograpie, copyright Successió Miró 2011/ SEBAM Belgium 2011. En bas : Joan Miró, Le Cheval de cirque, 1927, huile sur toile, copyright Successió Miró 2011/ SEBAM Belgium 2011]

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