Entretien avec la peintre Claire Nicolet
Claire Nicolet nous invite dans une déambulation poétique et paisible à travers des paysages aux couleurs chatoyantes. Réinterprétation de grands classiques, réflexion sur le vide, la mémoire et le temps, l’artiste nous fait découvrir l’univers de ses peintures et tout particulièrement deux de ses séries, D’après et Topoï.
Claire, tu transformes les paysages, tu entraînes les spectateurs dans un espace onirique où tout semble éternel. Qu’est-ce qui t’anime dans cette production artistique ? Pourquoi avoir choisi ce thème ?
Ça peut être plein de choses ! Il y a deux aspects je pense, soit un intérêt particulier pour une forme absurde ou dérisoire observée dans la rue, soit une sorte d’illumination – comme une lumière ou une ombre portée – qui provoque une nécessité chez moi de produire. Pour les paysages en particulier, je pense qu’il y a quelque chose à voir avec l’ici et maintenant qui me touche.
C’est un bleu franc et éclatant que l’on retrouve souvent dans tes peintures. Un bleu qui se mue aussi dans l’ombre de ce qu’il figure. Cette couleur de prédilection porte-t-elle une signification particulière ?
Je ne sais pas s’il y a une signification particulière mais une affection c’est sûr. En fait, j’avais beaucoup aimé un cycle des chemins de la philosophie (France culture) sur Miyazaki dans lequel il parlait de l’espace idéal et élémentaire du bleu du ciel et de la mer. Ça avait pas mal résonné en moi parce que j’utilise un bleu très franc, donc c’est peut-être quelque chose du même ordre qui m’intéresse.
Dans ta série D’après, tu reprends des œuvres de grands maîtres tels que Fra Angelico ou Leonard de Vinci, pourquoi avoir supprimé toutes les figures de ces peintures ?
Il y a plusieurs raisons, ma réflexion s’est construite progressivement. J’avais eu cette idée, il y a cinq ans, quand je venais de sortir de l’école, mais sans jamais l’exploiter. Puis, j’y ai repensé l’année dernière et j’ai commencé à vraiment m’intéresser à la perspective : à son invention au XVe siècle dans la Renaissance italienne et à sa signification d’un point de vu sacré, indépendamment de la présence des personnages. Sans être dans la religion c’est aussi l’histoire et l’intérêt d’un vide habité, cette chose assez simple et primaire, se tenir là et voir le monde qui se trouve autour.
Tu as créé une série sans fin du nom de Topoï dans laquelle tu exprimes une réflexion sur le temps et la mémoire. Pourquoi avoir choisi un format de bande dessinée ?
C’est un format bande dessinée et pour autant il n’y a pas de narration. C’était le côté collection dans une même page qui m’intéressait ou alors, à une autre échelle, la possibilité de regrouper certaines planches pour créer des connexions dans la série, des associations d’idées. C’est chronologique donc d’une certaine manière il y a un aspect autobiographique, par les lieux, dans lesquels on peut retrouver un rêve ou un souvenir.
Justement, les éditions Trainailleur ont réalisé des volumes thématiques de ta série Topoï, tu peux m’en dire un peu plus ?
Oui, c’est Julien Mortimer des éditions Trainailleur qui a eu envie de les faire, ça l’intéressait depuis un moment. Il a eu l’idée de regrouper les dessins et d’en faire une sélection par thèmes récurrents. En tout, il y a trois albums comportant chacun vingt dessins par thématique : la végétation, l’eau et l’architecture. Il y en a deux nouveaux qui vont sortir début 2021 sur le soleil et l’imaginaire. Mais la série est antérieure à l’édition, les cinq portfolios représentent 100 dessins sur un ensemble beaucoup plus vaste.
Quels sont tes projets à venir ?
Ces derniers temps, je travaille sur un ensemble de peintures pour une exposition qui aura lieu en février à la galerie Sabine Bayasli avec pour commissaire d’exposition Marianne Dollo qui gère le cabinet Yellow Over Purple. Ce sont des paysages de 120 par 80 cm, presque mon plus grand format. Et en ce moment même, je travaille sur une de ces peintures qui s’appelle Les confins du monde, c’est un petit morceau de paysage de la coulée verte qui se trouve à moins d’1km de chez moi. Manifestement, la réflexion c’est que le monde est immense même à proximité !
Retrouvez les œuvres de Claire Nicolet sur Instagram et sur son site internet dès maintenant !
Interview réalisée par Hélène de Montalembert
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