Dismaland ou Disneyland revisité par Banksy
Dismaland De Banksy Tarif : £3 Du 22 août au 27 septembre 2015 Weston-super-Mare |
“La vie n’est pas toujours un conte de fée” : le post Instagram de Banksy donne d’emblée le ton. Dans ce parc d’attraction, les visiteurs devront laisser au placard robes de princesses pailletées et rêves enchanteurs. Ici, les Cendrillons, Aurore et princes charmants en herbe tomberont haut de leur tour d’ivoire sur le bitume d’une plus lugubre réalité. Parodie, satire, humour noir et corrosif, Banksy dévoile l’envers du décor de notre société du spectacle et de consommation. Les mois nécessaires à l’élaboration du parc ont vu se répandre des rumeurs parmi les fans de Banksy. Certains flairaient la supercherie. Le soi-disant tournage d’un thriller baptisé Grey Fox n’en avait guère l’allure. Pourtant, officiellement rien n’a filtré, le secret vaillamment gardé par les quelques rares personnes, dont quatre membres de la mairie, mises au parfum. Jusqu’à ce vendredi 21 août, date d’ouverture du parc, à Weston-super-Mare, un village de bord de mer, situé au sud-ouest de l’Angleterre. Dismaland provient d’un jeu de mot entre « Disneyland » et l’adjectif « dismal », utilisé pour qualifié une atmosphère lugubre. Entre le proclamé « bemusement parc », parc de « confusion », « trouble » ou « stupéfaction » et l’ « amusement parc », traditionnel parc d’attraction, la nuance est de taille.
L’artiste a investi un espace délaissé depuis quinze ans, une ancienne piscine populaire à ciel ouvert. 1000 mètres carré concentrent 18 attractions qui composent « un festival d’art, de distractions et d’anarchisme de base ». De nombreuses oeuvres inédites signées Banksy, dont des sculptures, sont également exposées. « La nouvelle attraction touristique la plus décevante de Grande-Bretagne », « parc à thème familial inapproprié pour les enfants », fait sensation.
Un espace de rencontre entre artistes contemporains Outre Banksy, de nombreux artistes internationaux exposent leurs oeuvres. Une soixantaine d’artistes avant-gardistes, de Damien Hirst, à Jenny Holze, Mike Ross ou encore Jimmy Cauty, ont rejoint l’aventure. Des concerts d’artistes actuels et engagés sont également programmés. Les rappeurs américains Run The Jewels se produiront le 5 septembre. Massive Attack et les Pussy Riot partageront l’affiche le 25 septembre. Sleaford Mods, Peanut Butter Wolf, le groupe Savages et Kate Tempest, sont également de la partie. Après ses interventions artistiques interpellant sur les situations à Gaza et en Syrie, le street artiste, plus engagé que jamais, livre ici une satire extrêmement féroce de notre société. En détournant et prenant le contre pied violent d’une des marques les plus populaires et mondialement connues, Disney, Banksy use du choc pour interpeller et piquer les conscience. Il dérange. Pour un reporter du journal The Independant, le « spectacle est d’autant plus déplaisant à contempler qu’il est difficile d’en détourner les yeux.» Au milieu du parc, trône un triste château délabré de Cendrillon. Une petite sirène défigurée semble nous inviter. À l’intérieur, un carrosse accidenté dont les corps des chevaux et celui de cendrillon gisent, inanimés, est entouré de reporters de guerre, paparazzi casqués. Et les images dévoyées, liées à l’actualité la plus noire défilent. Un canon à eau anti-émeutes, utilisé en Irlande du Nord, sert ici de toboggan pour enfants. Une sculpture composée de camions de transport de pétrole, en forme de « S » de dollar, qui évoque les pétrodollars, s’escalade de l’intérieur. Comme dans les kermesses, une pêche aux canards est proposée ; qui donc désire attraper un mignon petit caneton jaune maculé de mazout ? Dans un carrousel, tournent des chevaux. L’un d’entre eux est suspendu tête en bas comme à l’abattoir. Et un boucher assis sur des cartons de lasagne, apprête sa lame. Une autre œuvre expose des embarcations bondées de migrants aux visages fantomatiques. Un dispositif technique les empêche d’atteindre les plages anglaises. Des petits cadavres flottent. Le personnel du parc, affublé d’oreilles de Mickey, affiche une mine renfrognée, boudeuse. «J’espère que tous les gens de Weston vont profiter de l’occasion pour patauger en eau trouble en mangeant des frites froides au son des pleurs d’enfants», ricane le commissaire d’exposition. Anti-publicité par excellence, qui donne pourtant bien envie… [embedyt] https://www.youtube.com/watch?v=PTr9SZTtCHo[/embedyt] [Visuels : © Dismaland, © compte Instagram “Banksyny” ] |
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