Deligne : “Le rire est le meilleur moyen de se prouver qu’on est encore vivant”
Né en 1962, Frédéric Deligne est dessinateur et caricaturiste. Parmi ses collaborations dans la presse : La Croix, Nice-Matin, La Montagne. Il est l’auteur d’albums parus chez Glénat, Iconovox, Le Cherche Midi, Éditions Alphée. Il réalise des dessins en direct dans la Revue de Presse sur Paris-Première.
Vous vous définissez comme « dessinateur de presse et d’ailleurs ». C’est-à-dire ?
Je travaille pour la presse et je me définis comme journaliste, mais il m’arrive de dessiner en direct dans des conférences ou de travailler avec des agences de communication.
Pourquoi le coronavirus vous inspire-t-il autant ?
Parce qu’on ne parle que de ça et que je suis dépendant de l’actualité. Mais je préfèrerais qu’on passe à autre chose. L’intérêt de ce métier, c’est de pouvoir passer d’un sujet à un autre et de ne pas savoir le matin sur quoi on va travailler dans la journée.
D’habitude, quels sont vos sujets de prédilection ?
Je m’intéresse à tout, même les sujets auxquels je ne pige rien. Parfois un regard extérieur permet aux spécialistes d’appréhender différemment leurs problématiques.
Vous avez détourné l’autorisation de sortie afin de réglementer le rire pour « motif de santé » ou « familial impérieux » ! L’humour est un bon antidépresseur ?
J’ai effectivement mis en ligne une autorisation de rire afin de pouvoir pouffer en toute légalité : « Trop d’abus ont été constatés, je vous rappelle qu’un rire franc et massif peut projeter des gouttelettes à plus d’un mètre. C’est pourquoi le gouvernement a décidé de renforcer la réglementation sur le rire en recommandant de respecter les gestes barrières : rire sous cape ; rire dans son coude ; rire en coin ; rire dans sa barbe. Un seul rire par jour et par personne sera autorisé alors choisissez bien votre moment pour vous esclaffer. Vive le Rire public, Vive la France !
Dessiner est avant tout une thérapie pour me permettre d’affronter la dureté du monde qui nous entoure. Et tant mieux si on me paye pour en faire profiter les autres !
Vous collaborez pour plusieurs titres de la presse médicale (Alternative Santé, Le Généraliste, Infirmières Magazine). Vous y prenez des gants ?
J’ai tellement dessiné pour le milieu médical qu’on peut me confier une opération à cœur ouvert. Je crois que j’arriverai à me débrouiller.
Outre les contraintes du confinement et les conséquences sur notre quotidien, vous évoquez d’autres sujets graves (cause des femmes, racisme…). Et vous n’hésitez pas à traiter de sujets qui fâchent, comme le scandale d’entrepôt du marché de Rungis (voir ici) ou encore la Guerre des masques (voir aussi Les Masques arrivent de Chine). La pandémie révèle-t-elle les failles du système ?
On peut rire de tout. Les dessins ne sont jamais horribles : ils ne sont qu’un reflet de l’horreur de la réalité. Mais, s’ils grossissent l’absurdité de certaines situations, afin de donner à réfléchir, les dessinateurs ne sont pas des donneurs de leçons.
Vous ne ménagez ni les hommes politiques (le préfet Lallement), ni le quidam (comme les réactions de voisins d’une infirmière). Que pensez-vous de la situation ?
Le confinement est une situation intéressante parce qu’il fait ressortir, chez les gens, le pire et le meilleur d’eux-mêmes. Je souligne les travers de notre époque, mais je me défends de tout cynisme. Quand on veut faire rire les autres, il faut savoir rire de soi-même. Et dans tous les personnages que je dessine, je sais qu’il y a un peu de moi.
Sur Twitter, vous dites : « Je veux regarder la réalité en face ; alors faites-moi signe quand elle fera demi-tour ». Pas de volte-face ?
J’espère bien que non ! Je continue à regarder le monde de manière décalée, car le rire est encore le meilleur moyen de se prouver qu’on est encore vivant.
Vous avez consacré un ouvrage à l’impact des réseaux sociaux sur nos vies (Les Zéros sociaux, #TousConnectés ; voir aussi notamment Le Selfie à travers les arts). Pourtant, ils nous aident, en cette période particulière ! Serait-ce un piège ?
Les réseaux sociaux ont démontré leur efficacité, depuis le Printemps Arabe. Ils nous permettent de rester connectés, tout en étant isolés. Mais, il y a effectivement un revers de la médaille : en scannant tous nos comportements, nos goûts, nos pensées, l’outil peut se retourner contre nous.
Propos recueillis par Sarah Meneghello
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