0 Shares 10269 Views

Décryptage – Les Cyprès, symbolique ou botanique ?

Emma Gontier 13 mars 2022
10269 Vues

Les Cyprès, 1889, Vincent Van Gogh (1853-1890)

On se retrouve dans Décryptage pour un petite analyse botanique… Pour parler d’un grand buisson appelé le “Cyprès”. Suivez-nous pour une plongée dans l’histoire de l’art avec comme objectif : comprendre pourquoi le Cyprès est un élément important dans beaucoup de tableaux.

C’est quoi, un Cyprès ?

Le Cyprès est un arbre de la famille des conifères (ceux qui ne perdent pas leurs aiguilles/feuilles l’hiver) très présents dans le monde méditerranéen, mais aussi très apprécié comme arbres d’ornement. Ils peuvent atteindre une hauteur de 5 à 40mètres de haut. Son bois est quasi-imputrescible, ça veut dire qu’il est très difficile de le voir pourrir et il dégage une odeur assez forte d’encens.

Arbre des cimetières depuis l’Antiquité, ils sont plantés près des sanctuaires et des lieux de repos des morts. Son symbole est en revanche très ambivalent. En effet, l’arbre reste vert, quelle que soit la saison, il est ainsi associé à la longévité et parfois même à la vie éternelle.

A l’opposé de cette symbolique, l’arbre est aussi symbole de la mort, du lien entre vivants et trépassés. Très grand et dressé vers le ciel, il est dans l’idéal chrétien, une échelle vers le ciel, le paradis, Dieu. C’est assez cocasse, je trouve que malgré la différence de culture et de religion entre Antiquité et chrétienté, le cyprès s’accorde dans la viabilité de sa présence près des morts…

Petit fun-fact l’arbre est utilisé pour faire les cercueils des haut-dignitaires civils et religieux dont le Pape.

Aux origines de la symbolique, le mythe de Cyparisse 

Dans les légendes Antiques liées, celle-ci est clairement aux origines de la symbolique de cet arbre. Appelé le mythe de Cyparisse, cette légende est rapportée par Ovide. Cyparisse est un jeune homme, descendant d’Hercule, dont plusieurs dieux et divinités sont amoureuses. Seul Apollon parvint cependant à se faire aimer de l’adolescent. Le Dieu donne alors à celui-ci un cerf sacré qui devient le fidèle compagnon du jeune homme, ainsi qu’une lance. Or un jour, Cyparisse tue par erreur son cher animal en chassant. L’adolescent effondré demande à Apollon de faire en sorte qu’il puisse pleurer pour toujours et le Dieu le changea en Cyprès, arbre de la tristesse et des défunts.
La métamorphose que lui accorde Apollon est aussi symboliquement une façon d’accorder à l’être aimé une forme d’éternité, loin des Enfers Antiques.

Pour la petite anecdote vous avez une statue de Cyparisse et de son cerf avant la tragédie au Château de Versailles.

Mais alors en peinture, ça donne quoi ? 

Pour illustrer le cyprès dans la peinture voici deux tableaux assez exceptionnels qui donnent matière à réflexion.

1- L’Ile des morts, 1880, Arnold Böcklin (1827-1901)

Böcklin Arnold (1827-1901). Allemagne, Leipzig, Museum der bildenden Künste. 563.

Il existe 5 versions de ce tableau, dont une avait été achetée par Hitler pour sa maison puis accroché dans la Chancellerie du Reich. Dans ce tableau magnifique, les cyprès trônent au milieu de la mystérieuse île des morts. Il faut d’abord signaler qu’ils sont gigantesques, un peu trop même ce qui donne un indice sur l’importance de cet élément pour le peintre.

Leur présence est peut-être aussi pour le public, en effet à cette période de l’histoire, les allemand idéalisent beaucoup le sud qu’ils n’ont que très peu vu, mais aussi le classicisme antique. Ces arbres très représentatifs de cette idée de sud, des ruines Antiques et de chaleur sont donc aussi un moyen pour l’artiste de trouver un écho dans les visiteurs.

2- Les Cyprès, 1889, Vincent Van Gogh

Les Cyprès, 1889, Vincent Van Gogh (1853-1890)

Ne nous mentons pas, quand vous avez lu : “cyprès et peinture” vous avez tout de suite pensé à un artiste : Van Gogh. C’est normal. Peut-être que c’était de mauvaise augure mais en effet, un des grands fans de ce joli buisson c’est notre ami Van Gogh qui l’a très souvent peint dans ses tableaux.

Chez l’artiste on pense que cette affection est ambivalente. D’abord il aimait très certainement la forme de l’arbre qui convient particulièrement bien à sa technique de peinture. Ensuite c’est sûrement sa symbolique mortuaire qui a séduit l’artiste qui était d’une personnalité (on peut le dire) légèrement mélancolique.

Propos de Emma Gontier 

Articles liés

Un week-end à l’Est… en plein Paris ! Édition 2024
Art
79 vues

Un week-end à l’Est… en plein Paris ! Édition 2024

Célébrant les cultures de certains pays d’Asie et d’Orient pour la huitième fois d’affilée, le festival Un week-end à l’Est a décidé de mettre à l’honneur cette année, Erevan, mais plus généralement, l’Arménie. A l’instar donc des éditions précédentes,...

“Travelling song”, le concert de musique de la Renaissance au Temple de Port-Royal
Agenda
50 vues

“Travelling song”, le concert de musique de la Renaissance au Temple de Port-Royal

Avec « Traveling Songs », nous proposons un voyage musical à travers l’Europe de la Renaissance, autour de pièces très célèbres de la fin du XVe siècle au début du XVIIe siècle, dont les mélodies ont été reprises et...

La compagnie de théâtre de masques Kulunka Teatro présente “Solitudes”
Agenda
54 vues

La compagnie de théâtre de masques Kulunka Teatro présente “Solitudes”

Après l’immense succès de André et Dorine, la formidable compagnie de théâtre de masque KULUNKA TEATRO, si habile à provoquer autant de rires que d’émotions intenses en se passant de mots, propose une nouvelle création dans la même veine poétique. Le...