Débat « Existe-t-il un modèle culturel français ; existe-t-il un boulet culturel français ? »
Cette petite synthèse qui ne se veut pas exhaustive reprend quelques unes des idées relevées lors de la réunion.
A. Les réussites et les échecs de la politique culturelle française
1. Des réussites
– Christophe Beaux : le cinéma français — avec son système d’avance sur recette — est l’un des rares en Europe à s’exporter dans le monde. Les salles sont remplies, le cinéma est extrêmement vivant et riche… Ce secteur peut servir de modèle à d’autres filières culturelles.
– Antoine Baduel : l’univers de la musique électronique rayonne dans le monde entier. Le succès des artistes bien établis (David Guetta, Daft Punk…) permet aux plus jeunes d’émerger dans des conditions propices.
– Jean-Claude Wallach : le Centre Pompidou-Metz est un véritable enjeu de politique culturel au niveau international, national et local. Depuis ce projet, l’urbanisme a été profondément modifié à Metz.
– Public : la danse s’exporte très bien (Pina Bausch, l’Opéra de Paris…).
2. Des échecs
– Marin de Viry : avec le festival d’Avignon, on a atteint les limites de l’intelligibilité. On a voulu entrer dans un système d’avant-gardisme et de mimétisme au niveau international, une tendance contraire à celle de l’exception culturelle française.
– Christophe Beaux : le concept d’ « exemption culturelle » n’est pas bien compris par les Français. Très chauvins, ils l’entendent souvent à l’envers, c’est-à-dire comme « culture exceptionnelle ». Si on décompose le concept, morceau par morceau, on se rend compte qu’on retrouve les mêmes idées dans les autres pays. Si on arrivait à faire un sort à cette notion, on ferait un grand pas et on pourrait ensuite parler des éléments qui constituent la politique culturelle et les soupeser à l’aulne de leur efficacité.
– Antoine Baduel : on a créé une loi pour défendre la chanson française, les stations de radio sont tenues de diffuser une certaine proportion de chansons francophones. Aujourd’hui, cette loi est devenue obsolète, « has been ». Les artistes qui rayonnent à travers le monde ne chantent pas (musique électro) et par conséquent ne sont pas assez diffusés. Cela porte atteinte à la jeune génération française qui ne bénéficie pas de la visibilité des grands noms à l’international. Il faudrait trouver un habillage pour les radios qui mettent en avant les jeunes talents.
– Public : France Télévision a une mission de service public, or les séries françaises ne sont pas assez soutenues ; ceci à l’inverse de ce qui se passe sur Canal+ et TF1. D’une part, les chaines ne veulent pas entrer en concurrence avec les fictions américaines et d’autre part, France Télévision néglige le secteur de la recherche et développement.
– Public : l’Opéra Bastille a été construit pour être populaire, or il ne l’a jamais été. Il faudrait ouvrir à tous les portes de ce lieu.
– Public : la France traite la culture comme ses entreprises. Elle ne sait pas favoriser les PME, à l’inverse de l’Allemagne, et n’encourage que les gros groupes. Dans le champ de la culture, elle privilégie les gros événements.
B. Que favoriser ? La culture populaire, la culture élitiste ? Toutes les cultures ?
– Marin de Viry : actuellement, on distingue aisément de grosses différences culturelles entre les classes populaires, moyennes et les élites. On a plusieurs langages et formes d’expression. L’exception culturelle revient au désir républicain de former des citoyens.
– Jean-Claude Wallach : depuis les Lumières, l’idée de Culture est indissociable de celle de Progrès social. Mais plus la mondialisation avance, plus on retrouve une affirmation des différences. La culture divise autant que l’art et il faut assumer les différences.
Public : est-ce que ce ne sont pas les intellectuels qui posent problème ? Et peut-on définir la culture populaire (David Guetta, Le Fabuleux Destin d’Amélie Poulain…) comme de la Culture ?
– Christophe Beaux : il faut arrêter les clivages entre la culture populaire et celle des élites. Est-ce qu’il ne faut pas emmener les jeunes voir du théâtre contemporain sous prétexte qu’ils n’ont pas encore étudier les classiques ? Il faut laisser les gens partir d’un point qui n’est pas forcément celui que les élites souhaiteraient. Les jeunes doivent commencer à partir de ce qui les entoure.
– Jean-Claude Wallach : il faut des outils de régulation publics puissants, pouvant donner de la place aux œuvres qui titillent les sensibilités de nos contemporains. A son époque, Malraux a su mettre en avant la place centrale de l’art (le ministère de la Culture a la « mission de rendre accessibles les œuvres capitales de l’humanité, et d’abord de la France, au plus grand nombre possible de Français », décret du 24 juillet 1959).
C. Des référentiels culturels de gauche et de droite ?
– Marin de Viry : Non, il n’y a pas vraiment de débats. La droite complexe souvent face à la gauche dans le domaine culturel. Mais, on remarque que la droite est à l’aise dans la création d’événements, tout comme l’a été la gauche à l’époque de Jack Lang.
– Christophe Beaux : Non, il n”y a pas de politique culturelle de droite et de gauche, il y en a juste qui sont efficaces et d’autres qui ne le sont pas. Pour disposer d’une politique culturelle qui fonctionne, il faut voir ce qu’il est possible d’avoir avec les moyens dont on dispose, en mesurer l’efficacité et prôner l’égalité pour évoluer dans le bon sens.
Une convention sur la Culture sera organisée par l’UMP le 27 septembre
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