Christian Boltanski – MAC/VAL
Assurément ce second volet de Monumenta s’inscrit dans une suite logique et reprend l’idée déjà expérimenté en 1970 pour l’exposition à la Galerie Templon, Local 1, Local 2 en collaboration avec Jean Le Gac : deux lieux, deux temps, deux actes, pour une œuvre globale.
L’Installation du Mac-Val
Entrons dans le cœur même de l’exposition : passé le rideau d’un visage anonyme, nous voilà plongés dans un univers autre, sombre, chaud, silencieux, non pas effrayant, juste différent. Avec « Après », Boltanski nous projette dans un fantasme communément universel, celui de l’après mort ou de l’après vie. Nous voilà donc errant dans les couloirs labyrinthiques que dessinent des éléments architecturaux géométriques, noirs et pleins, métaphores de nos mémoires compactées, qu’anime un souffle de vent à peine perceptible. Un entre-deux monde où la perte de repères est quasi immédiate. Au détour d’un chemin, des personnages énigmatiques, anges ou sentinelles nous interrogent sur le comment de notre mort. « Dis-moi, as-tu souffert ?, étais-tu conscient ?, Voulais-tu que cela finisse ?, était-ce brutal ?… ». La présence sur un mur de miroirs noirs symbolisant notre absence, renvoient à notre fragile existence temporelle. Et le feu clignotant des néons, affichant « Après », semble être le seul vestige perceptible d’un battement qui fut un temps celui de notre cœur vivant.
L’Œuvre en question
La plupart des éléments formels constitutifs de l’œuvre de Christian Boltanski sont là. On se souvient de ces personnages de néons recouverts d’un manteau, référant à « l’homme qui marche » d’Alberto Giacometti, déjà présents en 2005 chez Marian Goodman lors de l’exposition « Prendre la Parole ». En 1997 également, les miroirs noirs, vision déformée de nous-même à l’instar des photographies jaunies, floutées par le temps, marquaient l’installation « nightfall » à la Galerie Anthony d’Offray à Londres.
Si tout fait sens dans l’exposition du Grand Palais, la pertinence de « Après » nous semble cependant moins évidente. En effet, l’exposition du Mac-Val paraît davantage questionner le passage entre la vie et la mort plutôt que l’Après proprement dit. De cet « Après » justement, nous ne savons rien et c’est tant mieux. Les religions, les mythes et autres croyances ont de tout temps veillé à circonscrire nos doutes et nos peurs, canalisant ainsi notre questionnement sur un possible après. A la question de savoir s’il croyait à une vie après la mort Andy Warhol répondait non sans humour : « Je crois à la mort après la mort » ! L’heure n’est certes plus aux questions existentielles ! Et celles posées par ces pantins de néon ne semblent dès lors plus justifiées.
Inconnu fantasmagorique
L’Exposition « Personnes » n’était donc pas une fin en soi. « Enfer » d’une mort inéluctable et cruelle dans ce qu’elle a de plus aléatoire, elle appelait un « Après » à l’instar de Dante dans La Divine Comédie, ces Limbes dans lesquels errent les âmes. Faut-il s’attendre dans un troisième volet, à découvrir le Paradis ?!
Prudence cependant. Pour être universel et toucher le cœur du plus grand nombre comme s’applique à le faire Boltanski, il serait erroné de voir dans le travail de l’artiste un lien direct avec une religion précise. C’est de spiritualité dont il s’agit, une grande déférence envers l’humanité qui se cherche et se questionne sur son passé, son présent, son devenir au-delà de toute temporalité à échelle d’homme.
Quoiqu’il en soit, reste de cette installation au Mac-Val, la sensation étrange d’avoir pénétré dans un univers autre. Un inconnu fantasmagorique heureusement réversible, pour tous ceux du moins qui partagerons l’expérience supra humaine que nous invite à vivre Christian Boltanski !
Karine Marquet
A lire sur Artistik Rezo :
– le dossier Monumenta 2010
Après
Du 15 janvier au 28 mrs 2010
MAC/VAL, Musée d’art contemporain du Val-de-Marne
Place de la libération
94400 Vitry-sur-Seine
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