C215 : “S’exprimer dans l’espace public engendre une responsabilité”
C215 de son vrai nom Christian Guemy est un street artist, portraitiste et pochoiriste. Son art figure comme un vecteur d’émotion et d’humanisme dans les rues. À travers ses pochoirs multicolores, C215 véhicule des valeurs positives et fédératrices dans l’espace public. Entretien avec l’artiste.
Comment êtes-vous arrivé dans le street art ?
J’ai pratiqué cette discipline lorsque j’avais à peu près 15 ans. Les bombes de peinture de l’époque ne me convenaient pas et ne permettaient pas d’obtenir un résultat satisfaisant selon moi. C’est pourquoi, je n’ai pas poursuivi. Puis en 2005, j’ai repris. Les outils sont apparus entre temps, l’évolution de la peinture a explosé. Cette dernière propose ainsi une qualité supérieure, avec une variété de couleur, laissant alors un libre choix dans la création. Dès mon plus jeune âge, j’ai toujours été captivé par le figuratif plutôt que le tag. Perfectionniste, ce qui m’attire dans le pochoir, c’est l’idée de contrôler le dessin.
Quels sont les lieux les plus insolites où nous pourrions contempler vos œuvres ?
J’ai créé des œuvres dans divers endroits improbables ou inhabituels comme par exemple dans une quinzaine de prisons en France ou bien dans le mémorial de Kigali en hommage au génocide des Tutsi du Rwanda de 1994. J’ai également peint dans un tunnel de métro désaffecté dans lequel personne ne va. Mais aussi sur un train, sur de très vielles voitures du début du 20e siècle… De plus, j’ai pu collaborer avec Ubisoft pour un projet dans lequel mes peintures murales apparaissent dans le jeu Far Cry 4.
Comment se déroule votre activité créative ?
Elle se déroule en fonction de mon quotidien, au fil de mes inspirations, de mes rencontres, de mes interactions avec la société, des projets qui me sont proposés et de mes voyages. Lors de mes excursions, je pars toujours avec des pochoirs créé par moi même. Dans ma pratique je ne choisis pas toujours mon endroit en amont. Je cherche un espace qui convient le mieux. Lorsque je ne connais pas le lieu en avance, je m’adapte complètement. Je vais chercher le support qui va être le plus adapté et approprié en dimensions. Puis, en fonction du lieu, je choisis les couleurs et le sujet le plus convenable. J’essaie de peindre que sur des objets ni valorisants ni entretenus. Ainsi, j’évite de dégrader l’environnement.
Dans vos œuvres on retrouve fréquemment l’idée de rendre hommage. C’est important pour vous de représenter des personnes marquantes par le biais du street art ?
Oui, car je peins le portrait des autres dans l’espace public. Au travers du portrait, je veux véhiculer des valeurs positives et fédératrices plutôt que de semer la distension. La plupart des œuvres représentent fréquemment le reflet de personnes que j’admire, qui m’évoque quelque chose. J’estime que s’exprimer dans l’espace public engendre une responsabilité. C’est pourquoi, mon art émet des ondes positives.
Pratiquez-vous d’autres disciplines artistiques ?
Oui je fais par exemple de la sculpture mais c’est le pochoir qui définit ma technique et ma reconnaissance.
Pendant la période de confinement, le 17 mars 2020 vous avez posté sur votre compte Instagram la dernière oeuvre de street-art évoquant l’amour au temps du le coronavirus. Quel est votre message véhiculé à travers cette œuvre ?
Concernant cette peinture, elle figure comme un marquage temporel. Plutôt de façon spontanée, j’ai retranscrit l’image qui exprimait le mieux ce que j’avais à dire par le biais de mon art. Figurant comme un tatouage pour se souvenir d’une forte angoisse, je savais qu’une chose importante allait se produire. Nous allions vivre une expérience collective inoubliable du fait de l’approche du confinement. Cela faisait plusieurs jours que je la préparais, puis le confinement a été annoncé et je l’ai donc peint juste avant. Elle m’a servi à lever des fonds pour la fondation des hôpitaux et j’ai récolté plus de 25 000 euros par le biais de la vente d’un tirage.
Maintenant le confinement terminé, quels sont vos projets à venir ?
Durant le confinement, je n’ai pas pu me présenter dans les prisons pour peindre donc je vais ré-intervenir dans celles-ci d’ici peu de temps. J’ai une exposition au château de la Maison Laffitte et la préparation d’une exposition au Musée de la Légion d’honneur et des ordres de chevalerie. Elle aura lieu prochainement.
Retrouvez plus d’œuvres de C215 sur sa page instagram.
Propos recueillis par Chloé Desvaux
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