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Benjamin Fondane – Un inconnu au Mémorial de la Shoah

26 octobre 2009
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Mémorial de la Shoah

« C’est à vous que je parle, homme des antipodes, / Je parle d’homme à homme, / avec le peu en moi qui demeure de l’homme / avec le peu de voix qui me reste au gosier, / mon sang est sur les routes, puisse-t-il, puisse-t-il / ne pas crier vengeance ! ». Ces premiers vers de la Préface en prose à L’Exode écrit en 1942, placés en exergue de l’exposition et porte ouverte sur cette dernière, conduisent immédiatement les visiteurs à saisir la portée et la force de ce poète, philosophe, essayiste et critique juif d’origine roumaine dont l’œuvre et la vie furent brutalement interrompues par l’Histoire. Un nom et un prénom méconnus, identité d’une figure essentielle du début du XXe siècle qui a offert à ses contemporains une œuvre multiforme que le Mémorial de la Shoah propose dans toute sa splendeur, sa profondeur et sa variété à ses visiteurs.

Richesse, poétique et lucidité

L’exposition s’ouvre sur les années roumaines de Benjamin Fondane et présente au visiteur son quotidien à Jassy d’abord puis à Bucarest, où il participe activement aux groupes d’avant-garde qu’il côtoya jusqu’à son départ pour Paris en 1923, à l’âge de 25 ans. Suivent les années passées à Paris, qu’il ne quittera que pour des voyages – en Argentine notamment – et qu’il retrouvera toujours, uniquement arraché à sa ville et à son pays d’adoption par la déportation : en 1944, il est envoyé à Auschwitz, par l’avant-dernier convoi parti de Drancy. Près de 20 années passées dans la capitale aux côtés des plus grands, fécondes en travaux divers et variés, présentés par une scénographie sobre et lumineuse qui met véritablement en exergue la richesse, la poétique et la lucidité de l’oeuvre de Benjamin Fondane. « Demain, dans les camps de concentration, il sera trop tard. » écrit-il, déjà, en 1933.

Découverte au détour de lettres échangées de son amitié avec Tristan Tzara, récit d’un questionnement philosophique élaboré avec Léon Chestov, refus du surréalisme d’André Breton : Benjamin Fondane était tout cela et plus encore. Il dialogua avec les plus grands penseurs et artistes de son temps, un échange et des rencontres qui prirent également corps sous les pinceaux et les crayons de Brancusi et Brauner, et sur la pellicule de Man Ray, instants suspendus de cette exposition.

Un œuvre révolté

C’est bien là la force de ce dernier, dont les œuvres, laissant de côté la pédagogie et le didactisme auxquels le Mémorial de la Shoah avait habitué ses visiteurs, confèrent au lieu une indéniable dimension artistico-culturelle. Si les trois noms qui composent le sous-titre de l’exposition, « Roumanie – Paris – Auschwitz », résonnent dans l’esprit tout au long de la visite et rappellent à tout instant la fin tragique de Benjamin Fondane, on peut penser qu’il aura fallu ce lien avec la Shoah pour que l’oeuvre révoltée du poète, défense passionnée de l’individu, soit enfin présentée quelque part. Sans cela, une autre institution aurait-elle fait le pari de consacrer une exposition à cette figure pourtant si fascinante de finesse et de lucidité ?

Soixante-cinq ans après l’assassinat de Benjamin Fondane dans une chambre à gaz à Auschwitz, le Mémorial de la Shoah lui offre la tribune qui lui avait été refusée depuis sa mort. Une exposition dont la richesse et la profondeur n’ont d’égal que la puissance évocatrice de son œuvre.

Solène Zores

Benjamin Fondane : Poète, essayiste, cinéaste et philosophe
Roumanie – Paris – Auschwitz, 1898-1944

Du 14 octobre 2009 au 31 janvier 2010
Tous les jours sauf le samedi, de 10 h à 18 h.
Nocturne le jeudi jusqu’à 22h.

Entrée libre

Le Mémorial propose certains jeudis, en nocturne, des visites guidées gratuites de l’exposition Benjamin Fondane, en présence d’un guide du service pédagogique : le 5 novembre, le 17 novembre et le 17 décembre 2009, à 19h30

Mémorial de la Shoah
17, rue Geoffroy-l’Asnier
75004 Paris
M° Saint-Paul, Hôtel-de-Ville ou Pont-Marie

www.memorialdelashoah.org

[Visuel : Mémorial de la Shoah, à Paris dans le Marais. 16 janvier 2009. Photographie de Djampa. Licence Creative Commons]

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