Art urbain : La Relève – ArtPrice
L’expérimentation de l’espace urbain dès les années 60, avec des artistes tels que Daniel Buren, Allan Kaprow ou Ernest Pignon-Ernest, a dans un premier temps profondément modifié l’approche environnementale de l’art et ouvert la voie à un nouveau champ d’étude. Nouveau terrain de jeu de la création, l’espace de vie moderne voit naître à la fin des années 70, dans les rues de New York, une pratique fondamentale dans l’évolution de l’Art urbain : le Graffiti (1). Les tags de Jean-Michel Basquiat sous son pseudo SAMO (same old chit) ou encore ceux de Taki 183 inondent la Grande Pomme et contribuent largement à l’explosion du phénomène dans la décennie suivante. Contesté durant de nombreuses années, le caractère artistique de l’art urbain a acquis non sans difficulté sa reconnaissance actuelle. Les plus grandes institutions ne l’ont que récemment accueilli sur leurs cimaises, à l’exemple de la Tate Modern à Londres avec l’exposition Street Art en 2008 qui a fait date en matière de légitimation. Le marché de l’art n’a pas attendu le réveil des musées pour faire de l’œil à l’art urbain. Dès le début des années 2000, la Galerie Agnès B. Paris, en précurseur, se fait porte-drapeau de l’art urbain. Du côté des maisons de ventes, en juin 2007, Artcurial Paris propose déjà sa première vacation spécialisée avec succès. L’année suivante, en février 2008, Bonhams Londres suit la tendance et profite de l’effervescence autour de l’exposition à la Tate Modern pour ouvrir à son tour un département spécialisé. Depuis, les événements s’enchaînent pour célébrer cette tendance adulée par un large public. En 2011, durant Art Basel Miami, la ville américaine s’est transformée en théâtre incontournable de l’art urbain international en invitant pointures et artistes émergents à créer des dizaines de murs dans le quartier de Wynwood.
Face à cette scène d’une extraordinaire vitalité où la relève en est-elle ? Quels sont ses plus éminents représentants qui ont été révélés par le marché? Comme leurs pères, la rue est leur premier musée, leur toile. Grâce aux premiers instigateurs, le chemin vers cimaises et marteaux est plus aisé, voire tout tracé. De plus, la nouvelle génération maîtrise davantage les médias, ce qui la rend infiniment populaire. Dès qu’une œuvre fleurit dans la rue, elle est presque immédiatement accessible à une audience mondiale grâce au relais d’Internet. Visibilité accrue et popularité, ajoutées à l’intérêt de collectionneurs influents, des institutions et du marché, la relève évolue dans un environnement porteur ! L’analyse du classement par chiffre d’affaires des jeunes (3) artistes de la scène urbaine met en lumière l’omniprésence des créateurs originaires des zones géographiques historiques : les États-Unis, la France et la Grande-Bretagne. Ces nationalités raflent toujours l’essentiel des transactions du marché de l’art urbain. Néanmoins, le récent développement des scènes urbaines brésilienne et australienne commence à modifier la donne grâce à leurs représentants Os Gemeos (Brésil) et Anthony Lister (Austalie) qui réussissent à se glisser parmi les artistes urbains les plus vendus cette année. Derrière un Banksy adoubé par le marché avec 2 m€ de chiffre d’affaires cette année (4), il semble encore vain d’entrer en compétition. Ses ventes records distancent de plus de 1,8 m€ le chiffre d’affaires remporté par le duo brésilien Os Gemeos, avec 150 000 € de transactions enregistrées cette année (5). Icône de la jeune génération et très médiatisé de surcroît, Banksy domine de loin le marché de l’art urbain mais il est aussi l’artiste de moins de 40 ans le mieux vendu dans son pays (le Royaume-Uni) et le 3ème dans le monde (6) !
Royaume-Uni : quels artistes derrière la Banksy mania ?
Parmi les meilleurs chiffres d’affaires de l’année écoulée, l’anglais D*Face, aka. Dean Stockton, tire son épingle du jeu avec neufs lots passés en vente pour plus de 63 000 € de recettes. Originaire de Londres, D*Face découvre très jeune le graffiti. Il puise son inspiration dans le graphisme du skate qu’il pratique avec passion, et dans celui de la publicité, des comics et des couvertures d’albums de musique punk-rock. Très inspirées de la culture américaine, ses œuvres satyriques aux accents de Pop art désacralisent sans complexe icônes, célébrités et société de consommation grâce à une pincée de symboles morbides (crâne, os…). La légende raconte que sa première exposition individuelle La mort et la gloire à la galerie Stolenspace Londres aurait fait carton plein en 2006. Mais c’est en 2008 que D*Face débute en salles, lors de la première vente spécialisée en art urbain de Bonhams (Londres, le 5 février 2008). Parmi les deux œuvres proposées, une toile Pop Tart Collage et une estampe Her Royal Hideous triplent d’emblée leurs estimations hautes en trouvant respectivement preneur à près de 6 400 € et de 8 600 €, soit une belle entrée en matière ! Quelques mois plus tard, le 23 octobre 2008, Bonhams récidive avec une nouvelle vente spécialisée qui confirme les résultats précédents. Les estimations sont revues à la hausse et une toile similaire à Pop Tart Collage, mais aux dimensions doublées (130 x 130 cm contre 56 x 56 cm pour Pop Tart Collage), Pop Tart, s’adjuge plus de 19 000 €. Elle restera d’ailleurs, jusqu’en avril 2012, le record de vente de l’artiste ! Bien qu’il soit de la même nationalité et de la même génération que Banksy, D*Face ne connaît pas la même envolée de prix. En 2012, D*Face révise enfin son record grâce à l’adjudication d’une peinture récente, Drowning in Sorrow (2011), pour 21 500 € (7). Ce résultat tombe peu de temps après que deux peintures murales de style similaire à Drowning in Sorrow avaient envahi les rues de Soho et Brooklyn à New York (8) (Love Her, Hate Him, Handle With Care et Grim Tales).
En dehors de Banksy et D*Face, la scène urbaine londonienne c’est encore et toujours Adam Neate (né en 1977), Anthony Micallef (né en 1975) et Cyclops (né en 1975) qui comptabilisent chacun un chiffre d’affaires annuel proche de 20 000 €. Néanmoins, leurs récents résultats sont loin derrière leurs premières adjudications réalisées en 2007. Anthony Micallef signait alors son entrée aux enchères avec l’adjudication pour 30 000 € d’une toile sans titre, triplant l’estimation haute (Sotheby’s Londres, le 7 février 2007). En 2007 toujours, Suicide Bomber d’Adam Neate déchaînait les enchérisseurs et s’envolait au-delà de 90 000 €, soit plus de quatre fois l’estimation haute (Sotheby’s Londres, le 12 décembre) ! Mais, ces années marquées par un marché de l’art international hautement spéculatif ont fait face à la crise. La contraction du marché a entraîné une réévaluation à la baisse de leurs résultats alors que ceux de Banksy ont été confirmés. Aujourd’hui, acquérir en salles une œuvre originale d’Adam Neate, d’Anthony Micallef ou de Cyclops est encore possible à moins de 6 000 € lorsque les estampes les plus recherchées de Banksy comme Kate Moss frôlent les 30 000 €. Difficile donc de se frayer un chemin dans un marché axé sur l’anonyme le plus célèbre au monde. La Banksy mania est tenace !
Un boom pour l’art urbain brésilien ?
Avec seulement deux coups de marteaux, l’année 2011/2012 confirme la montée en puissance du duo d’artistes brésiliens Os Gemeos (nés en 1974). Loin derrière Banksy (qui dégage 1,8 m€ de plus), le nombre de transactions effectuées par les frères jumeaux (9) distance largement ceux des Américains Kaws et Faile. En effet, si Kaws talonne de près Os Gemeos avec seulement 190 € d’écart, son chiffre d’affaires annuel rassemble six lots là où celui des jumeaux tient en deux adjudications. Originaires de São Paulo, Octavio et Gustavo Pandolfo baignent dès leur adolescence dans la culture hip hop américaine qui émerge au Brésil à la fin des années 80. D’abord breakdancers, ils se tournent naturellement vers le graffiti. Après des premiers pas dans un style new-yorkais assumé, ils se rapprochent de leurs racines et s’inspirent de leur propre culture, de son folklore et de son histoire de l’art avec le mouvement Pixação (10). De là naissent leurs fameux géants jaunes, figures humaines au style naïf et à la peau jaunie, qui font aujourd’hui leur renommée. Leurs immenses fresques aux couleurs carnavalesques sont devenues un véritable phénomène et ont rapidement envahi les murs du monde entier. Leur reconnaissance institutionnelle ne s’est pas fait attendre puisqu’en 2008 lors de l’exposition Street Art, la Tate Modern Londres les invite à créer une œuvre sur une façade du musée. L’année suivante, c’est au tour de leur pays natal d’organiser leur première exposition muséale (11). Nommée Vertigem, elle crée l’émulation et fait date pour la reconnaissance de l’art urbain au Brésil. De son côté, le marché de l’art s’intéresse au duo dès 2007 : deux premiers lots sont mis en vente et trouvent aussitôt preneurs au-dessus des estimations hautes (12) (Phillips de Pury & Company, New York). En 2008, la même maison de ventes frappe, à Londres cette fois-ci, une adjudication à plus de 22 000 € pour la toile Carregadores de Piano. Les plus belles œuvres, pour la plupart des toiles, s’échangent entre 14 000 € et 34 000 € les deux années suivantes mais les prix s’enflamment en 2011. D’abord et toujours chez Phillips de Pury & Company Londres où une toile (13) trouve acquéreur à plus de 61 000 € (le 18 février 2011). Puis Christie’s New York prend le train en marche et propose pour la première fois une œuvre du duo, Carnavale, qui s’envole à plus de 79 000 €, soit près du double de son estimation haute (le 10 mars 2011) ! Depuis, tous les lots ont trouvé preneur au-dessus de 40 000 € ! Une tendance confirmée par les deux résultats au-dessus de 70 000 € signés en 2012 qui offrent au duo la 2ème place au classement des artistes urbains les mieux vendus dans le monde. En tenant compte, en prime, de leur première exposition personnelle aux États-Unis, IAC Boston, cette année, les jumeaux brésiliens n’ont pas fini de faire parler d’eux !
L’impulsion donnée par Os Gemeos à l’art urbain brésilien a ouvert la voie vers un art de la rue proche des traditions du pays aussi bien dans les thèmes que dans la forme. Le jeune Nunca, aka. Francisco Rodriguès (né en 1983 à São Paulo), est un bel exemple de cette mouvance. Ses fresques figuratives traitées en aplat évoquent sans détours des masques tribaux faisant référence aux civilisations indigènes brésiliennes. Déjà présenté sur les murs de la Tate Modern en 2008 aux côtés de ses compatriotes Os Gemeos, il signe déjà des premiers pas prometteurs en salles avec l’adjudication en 2012 de Show to your Friends pour 11 000 € (Artcurial, Paris, le 15 février).
L’art urbain brésilien a de beaux jours devant lui tout comme l’art contemporain de cette nation en pleine effervescence.
Les États-Unis, toujours au rendez-vous
Avec Kaws (né en 1974), le collectif Faile (nés en 1975 et 1976) et José Parla (né en1973), les États-Unis démontrent qu’ils sont toujours le berceau d’artistes talentueux et influents sur le marché de l’art urbain international. Entre Art Toys et Pop Art, l’univers de Kaws, aka. Brian Donelly, doit beaucoup à sa collaboration avec les Studios Disney. Son style rappelle sans équivoque le monde du dessin animé. Il insère d’ailleurs dans ses œuvres de nombreux motifs du célèbre studio d’animation tels que le corps de Mickey ou les mains à gants blancs typiques de l’imagerie Disney ! Avec des moyens de production à grande échelle, Kaws décline son bestiaire (14) sur t-shirts, sérigraphies et œuvres originales. Kaws entre en salles en 2008 enregistrant d’emblée treize ventes à son compteur. Jusqu’en 2010, ses œuvres dépassent rarement les 3 000 € et sa plus belle enchère d’alors est de 7 500 € (pour l’estampe Running Chum, Phillips de Pury & Company, Londres, le 25 avril 2009). En 2010, il franchit timidement le seuil des 10 000 € (Thirteen Works: Untitled, près de 11 500 €, Phillips de Pury & Company, Londres, le 13 février). Puis en 2011, ses résultats sont bouleversés par la vente inopinée à plus de 112 000 € de l’acrylique Kawsbob enters the strange forest (le 9 novembre 2011, Christie’s New York). Hybridation entre une fleur de Murakami et la tête de Bob l’éponge, Kawsbob enters the strange forest, décuple presque son précédent record frappé à plus de 12 000 € (Phillips de Pury & Company, Londres, le 14 octobre 2010). Ce résultat étant un cas isolé, il est difficile pour l’heure de parler d’une véritable envolée de sa cote mais Kaws – surnommé le Murakami américain – a trouvé avec la galerie Perrotin une superbe tribune. Emmanuel Perrotin a inauguré son nouvel espace à Hong Kong avec Kaws et l’expose à Paris en novembre 2012. L’invasion est lancée !
Contrairement à Kaws, les ventes du collectif Faile (15) sont sur une pente descendante depuis 2010. Reconnus à la fin des années 90, ces virtuoses du stencil (16) du du pasting (17) semblent moins attirer les collectionneurs. Leurs mélanges de peinture et d’affichage habillent pourtant les murs des plus grandes villes depuis une dizaine d’années. Rapidement encensés par la critique, ils débutent en salles sur les chapeaux de roue grâce aux ventes record le 15 octobre 2007 de deux toiles chez Sotheby’s Londres : Savage World London Stencil et Studio B Test in Black in Blue #3 s’envolent à près de 43 000 € et 46 000 € soit plus de trois fois leurs estimations hautes ! Deux mois plus tard, en décembre 2007, Sotheby’s Londres signe un nouveau record avec l’adjudication d’Agony à plus de 47 000 €. L’année suivante, en 2008, les résultats ne cessent de croître et cinq oeuvres dépassent les 47 000 € du record d’Agony entre avril et juillet. Parmi ces nouveaux records, l’œuvre Shangaï 18 se classe en tête avec un prix au marteau à plus de 107 000 € (Phillips de Pury & Company, Londres, le 29 juin 2008). En pleine frénésie du marché, l’offre explose avec soixante-huit lots proposés pour la seule année 2008 (18) ! Cependant, le marché s’est quelque peu essoufflé et, face à une demande amoindrie, il est désormais possible d’acquérir une œuvre originale de petites dimensions (moins d’un mètre) pour moins de 5 000 € (19).
Compositions calligraphiques complexes et minutieuses sont les maîtres mots de José Parla. Aujourd’hui new-yorkais, il est né de parents cubains et a grandi à Miami où il laisse ses premières traces sur les murs de la ville au début des années 80. Dans ses grandes abstractions, il s’inspire d’environnements allant des paysages urbains aux grands espaces naturels. Ses calligraphies sophistiquées et poétiques baignées de spiritualité mélangent avec force art classique, action painting et graffiti. Ce n’est qu’en 2008 que le monde des enchères s’intéresse à son travail. Si nul n’est prophète en son pays, Bonhams le prouve et ouvre le bal en Grande-Bretagne en même temps que sa première exposition personnelle Adaptation/ translation organisée elle aussi à Londres à la galerie Elms Lester (10 octobre – 8 novembre 2008). Le dessin Erase trouve alors preneur au-dessus de son estimation haute à plus de 7 600 € (Bonhams, le 23 octobre). Il faut attendre l’année suivante, en 2009, pour voir sa première enchère frappée dans son pays natal : Sotheby’s New York signe d’emblée un record, toujours d’actualité, avec la vente à plus de 32 000 € de Marked by Inkstains (le 10 mars). Après un passage à vide entre septembre 2009 et septembre 2010 avec six invendus sur les sept œuvres proposées, son marché prend un nouveau départ fin 2010 et on se dispute toutes ses œuvres, sans exception, jusqu’en mai 2012. Avec une offre plus soignée et une demande accrue, sa cote se stabilise. Le fonctionnement de la demande agissant de paire avec l’actualité artistique, il pourrait pousser des ailes à José Parla s’il renouvelle des collaborations aussi fortes que son binôme avec JR durant la 11ème biennale à la Havane (20) !
La France résiste et l’Australie s’éveille
Avec une scène toujours aussi dynamique, les Frenchies résistent et signent : C215 (1973), Zevs (1977), Fenx (1974) raflent des adjudications honorables. Clairement dominée par le milieu du street art parisien, la scène française l’est aussi pas son marché essentiellement national, à l’exemple de Fenx qui, depuis ses débuts en 2009, réalise 100% de ses ventes aux enchères en France. Néanmoins, grâce aux vacations spécialisées en art urbain à l’exemple d’Artcurial et Cornette de Saint Cyr à Paris ou encore de Leclere à Marseille, la cote des Frenchies se porte bien. La relève connaît une nette évolution à l’image de Fenx et C215 qui signent leur arrivée dans de nouvelles sphères de prix. Représentées par la galerie Opéra, les œuvres de Fenx ont connu cette année un certain succès en salles. Non seulement les collectionneurs ont fait une razzia sur ses ventes aux enchères en 2012, mais il signe aussi son nouveau record à plus de 10 000 € avec l’adjudication à 13 000 € de All I do is thinking about him (Artcurial, Paris, le 15 février 2012). Ses œuvres, qui combinent le graffiti à des inspirations allant de la bande dessinée aux grandes figures de l’histoire de l’art, sont au goût du jour ! Il en est de même pour C215 dont les visages travaillés aux pochoirs signent leur plus belle année aux enchères. C215 n’avait jamais, avant l’année 2012, dépassé les 1 400 € d’adjudication de Helmet Boy (Arcturial, le 22 mars 2010). En seulement quatre mois, entre février et juin 2012, il enregistre quatre résultats entre 5 000 € et 11 000 €. Le bal commence le 15 février 2012 lorsqu’Artcurial frappe à Paris sa première vente à 5 000 € pour une œuvre sur boîte aux lettres, Metropolitain. S’en suivent deux résultats à plus de 5 000 € pour des œuvres du même acabit (21), puis Cornette de Saint Cyr enregistre son record avec une peinture sur porte, Looking aside, adjugée 11 000 € (Paris, le 5 avril 2012).
Quant à Zevs (22), il a fait un premier pas concluant sur le second marché américain avec la vente pour près de 9 000 € de Liquidated Chanel (Phillips de Pury & Company, New York, le 23 septembre 2011). Zevs (23) se fait connaître dans les années 90 via un mini collectif avec Space Invaders : les @nonymous. L’artiste bombe alors les murs de son blason constitué d’éclairs d’où surgit son pseudo, puis en redessine les ombres portées du mobilier urbain. Ses fameux Liquidated logos – œuvres où il fait dégouliner les logos de grandes marques – représentent l’essentiel de son marché, dont un record récemment frappé à 16 000 € (Liquidated apple,Artcurial, Paris, le 15 février 2012). JR (né en 1984) est étrangement absent du classement malgré une année riche en événements. Mais l’offre particulièrement chiche, avec un marché essentiellement tourné vers des estampes (11 lots sur 12 mis en vente) explique ses petites recettes annuelles (la vente des œuvres de JR comptabilise 8 800 € de chiffre d’affaires annuel pour 12 lots proposés).
Après des débuts en salles au Royaume-Uni (24) puis aux États-Unis peu concluants, l’Australien Anthony Lister signe l’année suivante, en 2009, sa première vente en Australie avec l’adjudication de Monkey Drink à plus de 6 700 € (Deutscher & Menzies, Malvern, Australie, le 25 mars 2009). Né à Brisbane, l’artiste vit depuis 2003 à New York et pourtant son marché actuel est presque exclusivement australien (25). Deux de ses œuvres, parodies de la société contemporaine peuplées de super héros de son enfance, se sont envolées cette année au-dessus de 8 000 € : In transit #5 adjugée à plus de 8 400 € (Menzies Art Brands, Kensington, Australie, le 8 décembre 2012) et Spider Woman cédée à plus de 12 400 € (Lawson Menzies, Sydney, le 23 février 2012). Avec ces deux nouveaux records, la cote de cet artiste australien est à suivre de près d’autant qu’elle bénéficie de l’émulation de la zone Asie.
La tendance en faveur de l’art urbain ne semble pas prête de s’arrêter en si bonne marche… quid par exemple des scènes du Moyen-Orient, de la Russie, de l’Europe du Nord et de l’Asie? Cette analyse met en lumière une relève bien présente qui jongle avec un naturel déconcertant entre rues et white cube, et maîtrise parfaitement les médias. Néanmoins, loin de s’essouffler, la Banksy mania laisse encore peu de place sur le marché haut de gamme aux autres artistes. Il faudra viser haut et juste, entre projets médiatiques et discours percutants pour pouvoir détrôner l’anonyme le plus célèbre du monde. Loin des assertions pertinentes et de l’humour corrosif de Banksy, certains comme Kaws pourront compter sur le soutien de mastodontes tels que la galerie Perrotin pour enflammer leurs enchères. L’attrait des collectionneurs pour les scènes émergentes ajouté au style très personnel des Brésiliens Os Gemeos pourrait continuer d’afficher de beaux résultats ! Les calligraphies poétiques de l’Américain José Parla ou encore l’humour de l’Anglais Cyclops sont à suivre de près, sans oublier le retour de JR et l’arrivée en salles des ventes des plus jeunes tels que Nunca (1983) ou Vhils (1987)…
Extrait du Rapport du marché de l’art contemporain 2011/2012 d’Artprice
Cf. l’intégralité du rapport : web.artprice.com
Notes
(1) Fort des frontières poreuses de la scène urbaine, ce bilan annuel ne dissocie pas la scène graffiti et la scène Street Art.
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