Alex Majoli met en lumière des “Scènes” au BAL
Le BAL, qui a pour préoccupation majeure d’exposer la photographie du réel, présente une exposition entièrement dédiée au photographe italien Alex Majoli. Une exposition incontournable en ce début de printemps.
Un photographe hors pair
Alex Majoli, photographe, photojournaliste et professeur italien, a commencé, dès ses 15 ans, par être apprenti dans un studio photo spécialisé dans le portrait à Ravenne, en Italie. Il poursuit ensuite par des études aux Beaux-Arts en Italie et devient ensuite membre de l’agence mondialement reconnue Magnum. Il a parcouru le globe pendant 8 ans pour photographier des événements (et des non-événements), pour créer, inlassablement.
Ce sont des peintures classiques, amenées au studio où il était apprenti, qui ont éveillé sa curiosité artistique. Alex Majoli a été grandement influencé par les peintres italiens de la Renaissance, tels que Le Caravage, Giotto ou encore l’auteur Luigi Pirandello. Dans une société du “tout photographiable”, cet artiste n’aura de cesse de mettre notre monde en lumière.
Procédés
Dès 2006, il a débuté son projet Scène, qui a pris de plus en plus d’ampleur au fil du temps. L’artiste est profondément attaché à la démarche de Peter Brook, dont l’ouvrage L’Espace vide l’a inspiré. “Comment faire de n’importe quel espace une scène ?” : le concept fascine.
Alex Majoli désigne alors une scène, dans un lieu, en plein jour, et s’installe, accompagné ou non d’un assistant, avec ses 2 ou 3 flashs sur pied. Ce processus est indispensable afin de pouvoir capter des images mettant chacune de 20 minutes à 1 heure pour être réalisées, grâce à des micro-étincelles puissantes qui plongent la scène dans une sorte de pénombre. Pour un meilleur rendu de son travail et pour sa conservation, il crée ensuite un glacis (15 minutieuses reprises), ce qui assure une certaine matérialité de l’image.
Pourquoi ce lieu plutôt qu’un autre, lui demande-t-on ? “Nous nous installons au gré des découvertes ou des événements importants”, nous répond Alex Majoli. Comment réagissent les personnes autour de ce studio éphémère ? “J’essaie d’être oublié en étant présent.”
Sujets
En sillonnant l’exposition, nous retrouvons le parcours du photographe, entre l’Europe, l’Asie, le Brésil et le Congo. L’exposition est rythmée par des moments de la vie quotidienne ou des scènes particulières, comme des juges dans un tribunal, des événements sportifs. Mais Alex Majoli prend un tout autre parti que les clichés trop souvent véhiculés dans les médias.
L’artiste montre le chaos, tout en illuminant ce qui reste de vie, car il reste toujours “une part qui nous échappe” précise l’artiste. Son dispositif lumineux unique nous renvoie à des scènes presque théâtrales, où les personnes deviennent personnages, un peu comme sur scène. Sublimés par le grain de la peau, les visages ressortent nettement. Une beauté se dégage de ces photographies, dignes des atmosphères d’Edward Hopper. Nous pensons à des moments suspendus comme cinématographiques.
Toutes les scènes sont au même format, au même niveau, sans hiérarchie d’importance. L’artiste évoque l’idée de reconstituer un récit. Entre ces scènes ayant diverses provenances, une narration s’esquisse. Pour exposer ses tirages, l’artiste a essayé de nombreux formats, avant de trouver celui qui convient le mieux : un accrochage horizontal et en grille, pour les grandes œuvres encadrées de bois.
Cette exposition est organisée en collaboration avec le Musée d’Art de la ville de Ravenne et Magnum Photos, avec le soutien de l’Institut Culturel Italien de Paris et de la Howard Greenberg Gallery. Des visites de l’exposition sont proposées gratuitement sur présentation du billet d’entrée. Le BAL a pensé un cycle complet avec six spectacles autour de cette exposition, mêlant théâtre, danse, conférences, performances. Un livre coédité par le BAL et Mack, Alex Majoli – SCENE, est publié à l’occasion de l’exposition.
Mona Dortindeguey
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