Tudi Deligne expose “Chorégraphie d’un monde disjoint” à la galerie By Lara Sedbon
Quel est le rôle de l’image quand la réalité semble soumise à des mouvements toujours croissants de déconstruction ? Comment traduire ce chaos tout en proposant une échappatoire ? Autant de questionnements que Tudi Deligne fouille sans relâche pour obtenir un dessin qui soit à la fois un reflet du présent et un projet tourné vers un autre espace-temps.
Au fusain, au graphite ou au pastel, en couleurs ou en noir et blanc, l’artiste franco-suisse télescope les techniques pour mieux démultiplier les possibilités. Les sources initiales d’imagerie sont, elles aussi, très variées. Dessins d’enfant, œuvres de grands maitres – comme le Caravage ou Rubens -, peintures pariétales, bandes dessinées, illustrations populaires : un maelstrom de formes est propulsé au sein d’une image unique. Dans le dessin fnal, il n’est pas aisé de distinguer ces impulsions premières qui se détachent plus ou moins visiblement. Des corps ressortent cependant, quasiment toujours, de la composition, qui s’incarne d’emblée. Le retour de la figure, même évanescente ou allusive, rappelle l’importance de l’humain dans le corpus de Tudi Deligne, qui pratique également la danse à haut niveau.
Dans cette exposition, l’artiste teste la résistance des formes et s’intéresse à ce moment précis où l’abstraction s’impose à elles. Comme si l’absurdité du monde l’emportait subitement sur tous les paradigmes, archétypes et histoires déjà pourtant installées. Cette nouvelle image qui propose une réarticulation des contenus s’ofre tout en poésie. Elle développe un langage inconnu, qui présente des cohésions étranges mais fonctionnelles, des dissonances résolues, comme dans la chorégraphie d’un monde disjoint.
Les lignes spontanées qui ponctuent ce monde imaginaire viennent signifier qu’il s’agit réellement d’une construction, d’un entre-deux entre réalité et fiction, ou même d’un arrêt sur image centré sur la pensée picturale en mouvement. La question de la temporalité de cette création de l’esprit suit la même logique de travail. Aucun repère n’est figé et des zones très travaillées rencontrent des parties tout juste esquissées. Jusqu’où peut-on penser l’intelligibilité et faut-il, simplement, en sortir ? L’exposition de Tudi Deligne brasse autant de références connues que d’images nouvelles dans lesquelles vient se glisser un dialogue avec l’intelligence artificielle. Un prolongement logique de son travail tant la machine est un interlocuteur de choix quant à la cognition humaine, alors qu’elle imite et combine aveuglément les langages, sans même pouvoir les comprendre comme tel. La gestion de l’infinité des possibles s’adresse alors à l’artiste dont l’image produite reflète la quantité d’informations que le cerveau contemporain est amené à traiter.
L’exposition compose donc un cheminement où la virtuosité technique rencontre l’esthétique au cœur d’une réflexion sociétale traduite formellement. Particulièrement d’actualité, l’exposition en appelle donc à l’imaginaire pour reconquérir une liberté d’esprit menacée.
[Source : communiqué de presse]
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