En Réunion – Andrew Payne – Petit-Montparnasse
Stratton est fébrile. Sur le point de conclure de longues tractations sur un important contrat de licence, il doit assumer un inquiétant coup de fil de sa femme (on apprendra plus tard qu’elle et leur fille ont de graves problèmes psychologiques). Mais une autre très mauvaise nouvelle l’attend : Jack, l’homme avec qui il traitait depuis des mois, a été victime d’un burn out. Karine David va la remplacer mais, qui est-elle ? Et surtout, a-t-elle le pouvoir de signer ? On s’agite dans le bureau du si policé Stratton, Semblant en panique, ce cadre administratif prend cependant toujours sur lui pour arrondir les angles… tout au contraire de Cole, jeune créatif de génie à l’origine de la fameuse licence qui dit haut et fort ce qu’il pense sans jamais prendre de gants et cerne les personnalités mieux que personne sous ses airs de parfait autiste. Franck, le troisième larron, est leur supérieur. Calme, paraissant détaché de tout, paternaliste au possible, il manage son monde de main de maître. Au dessus d’eux, plane l’ombre du dixième étage, celui de la direction. Tous s’apprêtent à piéger Karine David, partie adverse s’il en est. Mais en fin de comptes, qui piégera qui ? Autour de cela, gravite la vie amoureuse de Stratton et de Cole, pas plus simple dans un cas que dans l’autre.
Dès les premiers instants, la tension est palpable. L’enjeu est immense pour cette équipe. Le spectre du licenciement plane Si ce contrat devait ne pas être signé, ce serait le coup d’arrêt de leurs carrières. Alors, tous les moyens sont bons… y compris les pires. Aussi allons nous assister à une machiavélique manipulation magnifiquement orchestrée, tant par l’auteur que par le metteur en scène et les comédiens. Ce qui est très fort, c’est que nous vivons les événements à la minute, au gré des ragots de couloirs, des informations distillées parcimonieusement par les uns ou les autres… qui ne nous rendront jamais complices de leurs intentions.
Construite comme un thriller, cette pièce nous révélera ce qu’il en est vraiment à la toute fin. La mise en scène de Patrice Kerbrat est, comme à son habitude, d’un extrême réalisme. Pour qui a travaillé dans une grosse boîte, impossible de ne pas reconnaître ici tous les codes et les personnages qui la composent. Sur scène, des comédiens confirmés, Patrice Kerbrat (Franck), Robert Plagnol (Stratton) et Anne Bouvier (Karine) -d’une remarquable précision et d’une toute aussi renversante force de persuasion- et le jeune Swann Arlaud qui n’a sans aucun doute pas fini de faire parler de lui tant il est joue à merveille ce trublion de Cole qui parvient à nous faire rire même quand la tension est à son paroxysme.
Extrêmement prenante, cette pièce démonte les rouages d’une société cynique dirigée par l’appât du gain, à laquelle participe des hommes et des femmes avides de pouvoir et de gloire. Elle fait froid dans le dos mais on en redemanderait !
Caroline Fabre
En Réunion
D’Andrew Payne
Adaptation de Robert Plagnol
Mise en scène de Patrice Kerbrat
Avec Patrice Kerbrat, Robert Plagnol, Anne Bouviers et Swann Arlaud
Depuis le 18 avril 2013
Du mardi au samedi à 20h30
Le dimanche à 15h30
Prix des places : 48€ / 44€ / 32€ / 18€
Durée : 1h50
Petit-Montparnasse
31, rue de la Gaîté
75014 Paris
M° Edgar Quinet
www.theatremontparnasse.com
[Photo : Lot]
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