Diplomatie – Théâtre de la Madeleine
Le suspens est de courte durée : chacun sait que le général von Choltitz a refusé de suivre l’ordre donné et que Paris est restée debout. Cyril Gely, auteur de Diplomatie, choisit le parti de la fiction pour sa pièce : il ne prétend à aucune vérité historique, mais à relater la négociation entre le gouverneur de Paris, interprété magistralement par Niels Arestrup, et le Consul général de Suède, Raoul Nording, campé par André Dussollier, plus roublard que jamais. Les deux acteurs, dont le talent n’est plus à prouver, incarnent avec force et justesse deux personnages historiques que tout oppose.
Si l’interprétation est remarquable, le texte, lui, manque d’ambition : en effet, à la lecture du programme, le spectateur s’attend à une joute verbale enflammée, enchaînant argumentation et figures rhétoriques étourdissantes. Hélas, Cyril Gely joue la carte d’un réalisme historique qui se marie mal avec sa revendication fictionnelle. Si l’arrivée de Nording dans le bureau de von Choltitz par un ingénieux passage secret est surprenante et bien ficelée, le reste de la négociation pour sauver Paris paraît bien lisse et terne au regard de l’enjeu.
Si von Choltitz se rebiffe d’abord en agitant vainement son revolver, il se radoucit vite et semble tout à fait disposé à écouter les arguments de Nording – qui n’en présente d’ailleurs qu’un seul, auquel von Choltitz résiste jusqu’à une bien pauvre pirouette. On s’attendait à une âpre négociation, à un choc langagier qui remette en question le destin de Paris et ne donne pas l’impression que la partie était jouée d’avance : la confrontation tourne trop rapidemet à l’aimable conversation autour d’un verre de whisky, et le sort de la capitale n’est, à aucun moment, vraiment inquiétant.
Malgré ces réserves, Arestrup et Dussollier forment un duo parfaitement crédible, qui évite les clichés avec maestria – pourtant, l’écueil est souvent difficile à éviter lorsque l’on parle d’officiers nazis. Arestrup nuance son jeu avec sobriété, et l’on finit presque par oublier son statut de bourreau de Paris. Dussollier oscille entre gravité et malice, et l’on se prend vite d’affection pour ce consul suédois qui outrepasse ses fonctions pour tenter de sauver le peuple de Paris.
Ainsi, la direction de Stephan Meldegg et le jeu des comédiens permettent de transcender un texte qui manque d’ambition, et qui aurait gagné à s’éloigner encore plus de l’Hisoire pour devenir une véritable histoire, qui prenne aux tripes et fasse oublier les faits.
Audrey Chaix
enjoy the theatre
A découvrir sur Artistik Rezo :
– les pièces de théâtre jouées à Paris pendant les vacances de Noël 2011
Diplomatie
De Cyril Gely
Mise en scène de Stephan Meldegg
Avec Niels Arestrup, André Dussollier, Romain Kané, Olivier Sabin et Marc Voisin
Du 18 janvier au 11 avril 2011
Du mardi au samedi à 21h, 18h le samedi, 15h le dimanche
Tarifs : de 15 à 42€, 10€ pour les moins de 26 ans du mardi au jeudi
Théâtre de la Madeleine
19, rue de Surène
75008 Paris
M° Madeleine
[Visuels : © Dunnara Meas]
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