La Serva Amorosa – Théâtre Hébertot
On a souvent comparé Goldoni à Molière, et il est vrai que l’intrigue aussi bien que le dynamisme de La Serva Amorosa rappellent les meilleures comédies du grand dramaturge français. Un jeune homme désargenté, une matrone cupide, un barbon dupé par sa femme, une jeune fille à marier… Goldoni reprend tous les éléments de la comédie classique pour nous faire rire – et cela fonctionne très bien.
Cette servante amoureuse, c’est Coraline, interprétée par Clémentine Célarié. Au centre de l’intrigue, c’est elle qui tire les ficelles, manipule ses maîtres, mais toujours pour la bonne cause. Nulle malice, nulle méchanceté derrière les plans qu’elle fomente pour parvenir à ses fins : elle qui aurait pu épouser son jeune maître, elle préfère rester au sein de sa classe sociale pour respecter les convenances et assurer l’avenir de Florindo. Elle ne cesse d’ailleurs de le répéter : elle est une honnête femme, et sa dignité est ce qu’elle a de plus cher au monde.
Face à elle, dans le rôle du vieux barbon pas si idiot qu’on voudrait bien le croire, Robert Hirsch est formidable. A 84 ans, il est aussi fringant que le reste de la distribution et se fait tyranniser par sa femme avec jubilation. Mais il est aussi touchant alors qu’il prend peu à peu conscience que son épouse adorée ne le supporte que pour toucher l’héritage. Il devient alors plus que le vieillard sénile qu’il jouait au début de la pièce : affirmant son autorité de pater familias, il reprend, alors que l’intrigue se dénoue, les choses en mains et permet un dénouement joyeux, aux côtés de Coraline.
Le tout dans une mise en scène enjouée et ludique, pleine de trouvailles comiques et d’énergie. L’ensemble de la distribution sert avec brio le texte de Goldoni, et semble se couler dans cette langue du XVIIIe siècle avec aisance.
Autour d’eux, le décor est intelligemment pensé, mêlant plusieurs espaces (la maison d’Ottavio, la chambre de Florindo…) sans confusion et sans donner d’impression de surcharge. D’autant plus qu’il permet aux acteurs de déployer leur énergie alors qu’ils gravissent des escaliers, se faufilent dans des trappes ou sautent d’un espace à l’autre. Si l’on ajoute les arrangements musicaux et les jeux de lumière, force est de constater que cette production est à l’image de la pièce : délicieuse.
Un bien agréable moment que cette Serva Amorosa : Christophe Lidon a su trouver le bon rythme pour que la pièce reste dynamique sans perdre son public. Une jolie réussite d’un metteur en scène familier de Goldoni, et que l’on découvrira avec un plaisir amusé.
Audrey Chaix
La Serva Amorosa
De Carlo Goldoni
Mise en scène de Christophe Lidon
Avec Clémentine Célarié, Robert Hirsch et Claire Nadeau
Jusqu’au 31 mars 2010
Réservations : 01.43.87.23.23
Durée : 2h
Théâtre Hébertot
78bis, boulevard des Batignolles
75017 Paris
M° Rome ou Villiers
Articles liés
“Chaque vie est une histoire” : une double exposition événement au Palais de la Porte Dorée
Depuis le 8 novembre, le Palais de la Porte Dorée accueille une double exposition inédite, “Chaque vie est une histoire”, qui investit pour la première fois l’ensemble du Palais, de ses espaces historiques au Musée national de l’histoire de...
“Les Imitatueurs” à retrouver au Théâtre des Deux Ânes
Tout le monde en prend pour son grade, à commencer par le couple Macron dans un sketch désormais culte, sans oublier Mélenchon, Le Pen, les médias (Laurent Ruquier & Léa Salamé, CNews…), le cinéma, la chanson française (Goldman, Sanson,...
La danseuse étoile Marie-Agnès Gillot dans “For Gods Only” au Théâtre du Rond Point
Le chorégraphe Olivier Dubois répond une nouvelle fois à l’appel du Sacre. Après l’opus conçu pour Germaine Acogny en 2014, il poursuit, avec For Gods Only, sa collection de Sacre(s) du printemps qu’il confie cette fois-ci à la danseuse...