A droite à gauche, valse politique au Théâtre des Variétés
A droite à gauche De Laurent Ruquier Mise en scène de Steve Suissa Avec Francis Huster, Régis Laspalès, François Berland, Odile Cohen, Jessé Rémond Lacroix, Olivier Dote Doévi Jusqu’au 3 janvier 2017 A 21 h du mardi au samedi, et 16h30 le samedi Tarifs de 25 à 56 euros Réservation au 01 42 33 09 92 Durée : 105 mn Théâtre des Variétés |
Jusqu’au 3 janvier 2017 Un prolo de droite et un bobo de gauche échangent sans complexes quant à leurs convictions politiques.Directs en leurs propos, ils provoquent des rires d’un bloc. La soirée est distrayante quoique tissée de clichés. Mais si cela prend aussi bien, n’est-ce pas que la politique elle-même devenue stéréotypée méritait bien cette cocasse surenchère ? Laurent Ruquier sait saisir toutes les répliques savoureuses qui fusent au quotidien, dans un café, chez un dentiste ou avec un plombier.Il attrape les caractères ambiants, il s’empare avec une franchise débonnaire des conversations qui sont dans l’air du temps. Lui-même devenu célèbre grâce à un parcours personnel méritant, il n’est pas dupe des combines idéologiques qui finissent par entraîner un pays sur des terrains risqués. Avec son humour sympathique et son expérience des inégalités sociales, sans méchanceté ni jugement, il répercute sous couvert du rire les énormités de la vie politique française, voire politicienne. Chacun sait aujourd’hui que droite et gauche sont sorties de leurs rails historiques et la démocratie heureusement encore là, permet de regarder le spectacle de la confusion avec amusement…en attendant le verdict des urnes.Pour cela, Laurent Ruquier met en scène un plombier venu réparer la chaudière d’un comédien célèbre.Le plombier, interprété par Régis Laspalès, est un employé au salaire proche du smic, tandis que le propriétaire de l’appartement, interprété par Francis Huster, est un acteur qui joue dans des films engagés, tesl que ceux des Frères Dardenne. Le premier bien sûr ne connait pas ce genre de cinéma, tandis que le second ne connait pas mieux le monde des artisans ou des travailleurs manuels. Brouillage des pistes Tout comme la chaudière dont le dysfonctionnement est problématique, les zones de convictions politiques volent en éclats. Le plombier, qui n’est pas à son compte, aurait de quoi exprimer sa colère. Au lieu de cela il s’assume volontiers conservateur et plutôt que de se rebeller, il se fait sur un ton affable le défenseur d’un ordre lui ménageant un confort modeste, mais aussi une forme de bonheur qu’il revendique, la notion de famille lui étant notamment cruciale. De son côté, l’acteur dont les revenus sont considérables prétend apporter aux défavorisés les lumières de la culture et éduquer leurs esprits frustres. La chaudière ne repartant pas, le temps passe et la réparation s’avère difficile, mais le plombier n’en a pas moins repéré que son hôte disposait d’une cave alléchante. Et à la grande surprise de l’acteur, il ne manque pas d’à-propos lorsqu’il s’agit de viser un grand crû. Tant et si bien que tous deux se retrouvent à disserter, chacun campant sur ses positions avec aplomb et surtout à travers des répliques drôles et un jeu tout aussi divertissant. On rit beaucoup aux dépens du bobo nettement en-dehors de certaines évidences sociales et on n’en rit pas moins face au tempérament placide du plombier aux airs revenus de tout et nullement prêt à croire aux mirages promis par la gauche, mirages qui d’ailleurs ne l’intéressent même pas. Une simplicité qui détend La salle s’amuse beaucoup, certains dialogues sont irrésistibles.La franchise bon-enfant du plombier est déconcertante et Régis Laspalès mène son personnage avec le talent qu’on lui connait et qui fonctionne là à plein régime. En face, l’acteur bobo, incarné par Francis Huster, est une caricature croustillante d’un nanti charmant et touchant mais enfermé dans sa bulle au fond assez triste. Il dispose de moyens financiers, de privilèges et d’une vie matérielle où rien ne pose problème, mais sa vie intime est affligeante. Son épouse est partie avec un producteur plus riche et son fils n’a aucun respect pour lui ni pour quiconque semble-t-il. Sur un propos basique, -les riches n’ont pas la richesse de l’amour et les pauvres ont des valeurs -, la pièce est amusante et le public s’y détend, les comédiens vedettes et leurs partenaires sont épatants, Laurent Ruquier propose un moment d’humour sans prétention, et si l’on n’est pas véritablement dans un registre théâtral on n’en glisse pas moins de droite à gauche et réciproquement avec entrain.
Emilie Darlier photo Christine Renaudie |
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