Rencontre avec March Mallow à l’occasion de la sortie de leur nouvel album “The Silence”
Si la musique de March Mallow sonne rétro, elle rend aussi hommage à Saint-Germain-des-Prés hanté par Boris Vian, Jean Paul Sartre et Juliette Gréco.
Ce nouvel album gorgé d’un souffle rafraîchissant ainsi que d’une haute musicalité est un véritable voyage dans le temps.
Qu’est-ce qui vous a donné envie de faire de la musique ensemble ?
Nous sommes des musiciens de la même région et nous nous connaissons très bien. Par exemple, le pianiste Christian d’Asfeld a participé à plusieurs albums de Tue-Loup avec le guitariste Éric Doboka qui est aussi le bassiste de ce groupe sarthois. Un des points communs à tous, est le souhait de se retrouver dans une musique authentique et sensible. Dans laquelle l’émotion tient une grande place. Chercher à se mettre en condition pour cueillir l’instant.
Quels sont vos artistes de référence ? Ceux qui vous ont influencés ?
Sur ce projet, ce sont clairement Nat King Cole et Billie Holiday qui nous ont guidés tout au long de notre recherche de son et d’identité. On pourrait également citer Nina Simone. Ces trois artistes ont ce point commun de jouer un jazz où l’émotion tient une grande place. C’est ce qui nous a attirés. On pourrait même avancer qu’ils sont les précurseurs de la pop d’aujourd’hui.
Votre musique est un véritable melting pot d’influences : jazz, soul et blues. Comment définissez-vous votre musique ?
À l’origine, nous souhaitions tout d’abord interpréter des chansons empreintes de jazz et de blues. Puis, après un album et quelques résidences de créations, notre musique s’est ouverte vers la soul également. Mais nous avions déjà défini notre identité. À partir de là, tout était possible.
Comment composez-vous vos morceaux ? C’est la musique qui arrive en premier ou les paroles ?
Nous organisons des temps de créations sur plusieurs jours. Chacun apporte des idées de riffs, de suites d’accords ou bien même des mélodies, puis on élabore ensemble les compositions. Ensuite, Astrid Veigne écrit les textes. On laisse un peu mûrir et on se retrouve à nouveau pour aboutir les morceaux.
Votre musique a une dynamique très spontanée. Est-ce que l’improvisation a une place importante dans votre manière de travailler ?
La spontanéité de notre musique vient du fait que l’on enregistre en live et à l’ancienne sans aucune retouche. On peut dire qu’il y a une petite part d’improvisation dans les enregistrements car chaque version est sensiblement différente.
On choisira la plus inspirée. Nous respectons toutefois le plus possible l’arrangement musical que nous avons mis en place.
Vous avez enregistré ce nouvel album “à l’ancienne” avec un micro à ruban. Pouvez-vous nous en dire un peu plus ?
Comme je le disais précédemment, nous avons enregistré en live et à l’ancienne. C’est un peu le point fort du projet. Capter toutes les nuances musicales et la fragilité du moment. Les défauts font partie de la musique et lui donne du caractère.
C’est le son du trio de Nat King Cole qui nous a amenés à utiliser les techniques d’enregistrement des années 40 et 50. Un micro à ruban stéréo qui va capter l’ensemble du groupe à la manière d’un orchestre classique. Le placement est central et les musiciens disposés dans la salle en fonction de leur volume sonore. Le mixage se fait donc à la prise. Un deuxième micro mono est utilisé pour le chant. Le micro à ruban confère un son incroyablement naturel et subjectivement chaud. Il faut surtout du temps et de l’inspiration pour faire une bonne prise.
Le trio original a évolué vers une formule plus étoffée. Pourquoi et comment s’est passée cette mutation ?
Le projet a démarré à trois mais le premier album s’est fait à quatre musiciens. Thomas Plès a rejoint le groupe à la contrebasse. Puis il a continué avec nous. March Mallow est donc un quartet à la base. Ce que nous proposons d’ailleurs sur scène. Jean Pierre Derouard a posé des trompettes sur le premier album.
Pour le deuxième album on s’est laissé la liberté d’aller jusqu’au bout de nos inspirations. Sans rien se refuser. Jean Pierre est présent à la trompette mais aussi à la caisse claire sur quelques titres. Alexandre Berton a joué des batteries sur les titres à consonance blues et soul. Cédric Thimon a quant à lui apporté une couleur plus moderne au saxophone avec des interventions proche du free jazz. Et enfin le quatuor à cordes Yüle originaire de Poitier est venu magnifier le titre The Silence et Mr Bojangles.
Vous reprenez deux morceaux : I Put a Spell on You de Screaming Jay Hawkins et Mr Bojangles écrit par Jeff Walker et immortalisées par Nina Simone. Pourquoi avez-vous choisi ces deux morceaux ?
Ce sont deux titres que nous jouons depuis longtemps, voir même depuis le début pour Mr Bojangles.
Des chansons dans lesquelles on s’investit énormément. Peut-être est-ce le retour du public, très souvent touché lorsqu’on les joue, qui nous a convaincus de les enregistrer.
Votre univers musical et esthétique est très rétro. Qu’est-ce que cette époque des années 40 – 50 vous inspire ? Peut-on dire que votre musique a une dimension cinématographique ?
L’image pour nous est très importante. On pourrait, lorsque l’on joue, fermer les yeux et recréer le contexte dans notre imagination. Mais nous souhaitions vraiment donner au public plus que ce que la musique évoque. C’est pourquoi notre habillement, les instruments, les micros ont une grande importance.
Effectivement, on pourrait parler de dimension cinématographique. Lorsque nous avons tourner le clip de Summertime réalisé par Léo Doboka (le fils du guitariste), l’esthétique noir et blanc de Jim Jarmusch n’était pas très loin. Mais également les polars des années 40-50 quand le jazz et le blues enfumaient les bars clandestins.
Avec ce nouvel album quelles sont vos ambitions ?
Nous avons fait le premier album pour nous construire une identité musicale. Une personnalité riche et solide. Mais aussi pour nous faire connaître. Avec ce deuxième album constitué principalement de compositions originales, nous lui espérons un rayonnement plus important. Au moins national voire international. Cet album nous a demandé beaucoup de temps pour le sortir. Alors nous allons prendre le temps de le défendre.
Retrouvez March Mallow en concert ce jeudi 23 mai au Sunset ! Plus d’infos ici
Interview réalisée par Juliette Labati
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