Raymond Hains – Galerie Albert Benamou et galerie de l’Exil
La Galerie Albert Benamou
« Le nouveau réalisme pour moi c’est à présent ma nouvelle réalité, la perte de mes chers amis. […] Raymond était un ami joyeux et bedonnant à l’ironie mordante et au cœur déchiré. J’ai partagé son goût pour les jeux de langage, le calembour métaphysique, Raymond Roussel et Alfred Jarry, les pochettes d’allumettes dans les bistrots, les ivresses tardives de la rue de Seine et parfois même ses colères sourdes. Avec sa façon poétique de transcender le quotidien et la banalité du réel, il avait une manière à lui de créer sa mythologie personnelle, de réinventer chaque moment, de transformer à sa guise les lieux et les gens. Alourdi par sa bedaine, il marchait lentement en soufflant, pourtant circulait partout, voyait chaque événement tout en restant “le ministre de sa propre culture”.
Le monde est un collage infini et le décollage la volonté de s’approprier des instants de mémoire […]. Jamais tribun mais souvent prophète, il ponctue sa déambulation sur le réel d’images et de mots; il enchaîne, des affiches aux palissades, aux délices de Lapalisse (un entremet) au chevalier de la malice. Il brasse des histoires, des détournements, des associations, mélange sa vie avec son art et comme son copain Ben amuse et déconcerte. C’est le privilège des gens très impliqués, très intelligents que de pouvoir ainsi confondre et associer, sans hiérarchie, sans limites, leur vie et leurs réflexions et d’en faire tout un art.
Il s’engage de la même manière avec fidélité avec ses amis proches, galeristes et conservateurs, critiques ou artistes : Jacques de la Villeglé, François Dufresne, Lara Vincy, Colette Alendy, Daniel Abadie à qui il consacre son temps et des expositions. Mais avant tout, ses rencontres sont avec le hasard et ce poète de la rue a laissé toute sa trace invisible mais récurrente dans chaque rue que je traverse. C’est pour ces souvenirs et cette tendresse que cette exposition a lieu ».
Albert Benamou – Véronique Maxé
La galerie de l’Exil
Généralement associé au Nouveau Réalisme, dont la déclaration constitutive en 1960 sous la houlette de Pierre Restany, regroupait Yves Klein, César, Villéglé, Arman, Tinguely…ou encore Martial Raysse, Raymond Hains est principalement connu du grand public pour ses affiches lacérées, réalisées dès 1949.
Ce nouveau mode d’appropriation du réel initié par Raymond Hains en collaboration avec Jacques Villéglé, qui s’est ensuite étendu aux palissades, aux tôles puis aux sculptures de trottoir dans les années 90, s’inscrit dans une vision plus globale du monde, celle révélée, dès 1945, par la photographie. Raymond Hains est en effet un capteur d’images autant qu’un « dragueur de murs » (Restany) : « Prendre une affiche dans la rue est peut-être un geste de photographe » dit-il.
Né en 1926 à Saint-Brieuc, Raymond Hains a fondé son œuvre sur la photographie auprès d’Emmanuel Sougez à France-Illustration (Paris), en produisant plus d’une vingtaine de photographies hypnagogiques entre 1947 et 1951, à l’aide de verres cannelés déformants. Dès les années 40, il découvre également, grâce à l’écrivain briochin Roland de Coatgourden, Max Jacob, Céline, Giono, l’ésotérisme, la philosophie de l’Inde et du Tibet…Dès lors, le livre tient une place centrale dans la constitution de l’univers Hains, où l’artiste puise une connaissance d’érudit qui lui permet de développer sa « langue de cheval » (allusion à la langue cryptée des résistants), sur le modèle de la toile d’araignée qui tisse des liens entre les références les plus savantes, les lieux, les personnes et les faits de la vie ordinaire. « Je travaille à une sorte de Web » dit-il aujourd’hui, curieux de l’univers d’Internet.
Entre 1949 (année où il décolle sa première affiche) et 1954, Hains réalise de nombreuses affiches lacérées et s’intéresse de près au film. Il réalise avec Jacques Villéglé le film inachevé Pénélope (1950-54), film abstrait en couleur réalisé grâce à l’ « hypnagogoscope » caméra munie de verres cannelés – un « bain de couleurs » qui évoque « les reflets des eaux dormantes » et qui ne sera monté qu’en 1980.
[…] A partir de 1959, les spéculations langagières prennent progressivement le pas sur les affiches, avec notamment la découverte des Entremets de la Palissade (« une avalanche de crème pâtissière contenue par une palissade de biscuits à la cuillère ») puis du Seigneur de la Palice et de la ville de Lapalisse dans l’Allier.
En 1961, Hains expose à la Galerie J les fameuses affiches de la « France déchirée », une vingtaine d’affiches politiques lacérées par le passant anonyme, qui font allusion aux événements de l’Algérie.
En 1964, débute la période « italienne » de Hains qui se rend à Milan et s’installe à Venise jusqu’en 1971. Il participe à sa manière à la Biennale éclatée et inaugure le cycle des artistes SEITA et SAFFA (régies françaises et italiennes de tabac) qui produisent des pochettes d’allumettes géantes, montrées à Paris par Iris Clert en 1955.
En 1970, Hains réalise l’œuvre sonore Disque bleu pour Saffa (45 tours), une sorte de « disque obole » offert « par-dessus le marché de la peinture » où la voix de l’artiste se déforme en échos »
Jacques Mauguin
Raymond Hains – Hainsoumis, Hainsolent, Hainsinuation, Hainsouciant
Exposition du 15 octobre au 10 novembre 2009
Vernissage le jeudi 15 octobre 2009 de 17h à 21h
Galerie Albert Benamou
24, rue de Penthièvre – 75008 Paris
M° Miromesnil
www.benamou.net
Galerie de l’Exil
18, avenue Matignon – 75008 Paris
M° Franklin Roosevelt, Champs Elysées, Clémenceau
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