L’Italienne à Alger de Rossini
La mise en scène très fantaisiste d’Andrei Serban de 1998 fonctionne à merveille. Elle emporte gaiement dans un Orient de pacotille, vivant, drôle et rythmé. C’est un tour de force réussi car tout paraît simple et plein de folie. Le jeu et l’interprétation très subtils des chanteurs créent une véritable dynamique de plateau.
La salle a ovationné le ténor Lawrence Brownlee, très attendu. Le duo, Isabelle et le jeune premier espiègle, a pu être assuré malgré un “refroidissement permanent” de la très véloce et délicieuse Vivica Genaux, annoncé à l’entracte. Très femme fatale, physiquement très Monica Bellucci, elle sait jouer de ses atouts et dupe habilement le crédule Mustapha. Marco Vinco, véritable loup dans la bergerie, fat à souhait – dédaignant son épouse, l’excellente Jaël Azzaretti – très pop star et extrêmement drôle, a conquis l’auditoire, tout à son plat de pâtes, assis dans les airs, sur son trône tenu par deux câbles ! En écho du Bourgeois gentilhomme, le barbon vient d’être intronisé “Pappataci”, ce qui signifie littéralement “Mange et tais-toi !”
Voilà pour la véritable satire sociale ! Un Turc à Alger ou un italien en Turquie ? N’oublions pas que Rossini avait deux passions : la musique et l’art culinaire !
Andrei Serban et Marina Draghici multiplient les clins d’œil et mélangent les genres : Une peau de lion détournée des tableaux de Delacroix, devient un moment d’érotisme entre Isabelle et Mustapha, un gorille (King Kong ?) bienveillant poursuit l’amoureux transi, personnage de Bande dessinée. Un immense bateau coule à pic, le Titanic surgit !
Le chœur s’est aussi prêté à ce jeu de folie, tantôt en Turcs, au bain, dont l’enveloppe charnelle dégouline à loisir, en mafieux siciliens, en malabars sautillants ou bien en athlètes italiens. Le canapé rouge désir en forme de bouche est l’occasion de l’extraordinaire scène finale du premier acte. Les personnages réduits à l’état d’automates articulent avec peine un texte qui ne veut plus rien dire.
L’orchestration magistrale de cette scène mérite le déplacement. L’Opéra de Paris, une fois de plus, remplit sa mission d’émerveillement et d’éblouissement.
Marie Torrès
© Opéra national de Paris/ Mirco Magliocca
L’Italienne à Alger
DRAMMA GIOCOSO EN DEUX ACTES (1813)
MUSIQUE DE GIOACCHINO ROSSINI (1792-1868)
LIVRET D’ANGELO ANELLI
Maurizio Benini, Direction Musicale
Andrei Serban, Mise en scène
Marina Draghici, Décors et costumes
Guido Levi, Lumières
Niky Wolcz, Chorégraphie
Alessandro Di Stefano, Chef de Choeur
Orchestre et Choeur de l’Opéra national de Paris
En langue italienne
10 représentations du 11 septembre au 8 octobre 2010
Tarifs : 180€, 140€, 115€, 70€, 45€, 25€, 10€
Informations et réservations : 08 92 89 90 90 (0,337€ la minute)
Internet :
Guichets : au Palais Garnier et à l’Opéra Bastille tous les jours de 10h30 à 18h30 sauf dimanches et jours fériés
Palais Garnier
Place de l’Opéra
Métro Opéra (ligne 3, 7 et 8)
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