Lucien Hervé
A l’âge de 18 ans, après ses études secondaires à Budapest, Lucien Hervé part pour Vienne où il suit des études d”économie et, parallèlement, des cours de dessin aux Beaux-Arts. En 1929, il rejoint son frère à Paris et fréquente assidûment les musées. Il exerce plusieurs métiers, puis devient dessinateur de mode (Rochas, Lelong, Paquin, Worth, Schiaparelli, Lanvin, Chanel…) et travaille dès 1933 pour le couturier Jean Patou.
En 1935, il est renvoyé pour activités syndicales. Tois ans plus tard, il travaille comme journaliste chez Marianne Magazine (pour de raison de convenances, il utilise le nom Müller) et se lance dans la photographier pour illustrer ses articles. Son œil et sa technique de dessinateur, ainsi que son goût pour le cinéma (Eisenstein), marquent son approche de la photographie. Il reste très libre par rapport à cet outil qu’il aborde en autodidacte. Ses prises de vues sont des esquisses qu’il travaille par recadrage et interprétation au laboratoire.
La guerre éclate et il est mobilisé. Fait prisonnier en 1940 sur la plage de Dunkerque, il s’évade d’un camp de Hohenstein (Prusse Orientale) pour gagner la résistance le maquis du Vercors (près de Grenoble). C’est à cette époque que, dans la clandestinité, il choisit le pseudonyme de Lucien Hervé.
En 1947, il reprend son activité de photographe spécialisé dans les arts plastiques, notamment pour France illustration, Lilliput et Point de vue. Deux ans plus tard, il fait la connaissance du révérend père Couturier, dominicain directeur de la revue Art Sacré (et futur initiateur de la chapelle de Ronchamp), qui le présente à Matisse et qui lui suggère, en 1949, de photographier la Cité Radieuse de Le Corbusier alors en chantier à Marseille. Passionné par ce qu’il découvre, Hervé prend 650 photos en une journée et en envoie une sélection à l’architecte qui lui écrit aussitôt une lettre enthousiaste («vous avez l’âme d’un architecte et savez voir l’architecture»…). Ainsi débute une amitié et une collaboration qui durera jusqu’à la mort de Le Corbusier en 1965. Fort de cette réputation, Hervé travaille pour les plus grands architectes — Alvar Aalto, Marcel Breuer, Kenzo Tange, Richard Neutra, Oscar Niemeyer — ansi que pour de nombreux architectes français (Bernard Zehrfuss, Jean Balladur, Georges Candilis, Henri Pingusson, Michel Écochard…) et pour des constructeurs tels que Jean Prouvé.
En 1965, sa carrière est à son apogée lorsqu’il est frappé d’une sclérose en plaques qui le force à restreindre son activité. Il continue néanmoins de travailler sur ses archives et réalise collages et projets de livres. Il se remet progressivement à la photographie, et continue ses recherches sur l’abstraction commencées à la fin des années 1940.
Dans les années 80 et 90, Lucien Hervé reprend régulièrement son appareil photo en mains pour réaliser quelques commandes, et fixer des images de son quotidien (Visiteurs, L’Appartement…).
En 1999, une rétrospective est présentée aux rencontres d’Arles En 2000, Lucien Hervé reçoit le Grand Prix de la ville de Paris et le Kahitsukan, Musée d’art contemporain à Kyoto, fait l’achat d’une importante collection de son oeuvre. Une monographie parait en 2002 aux éditions du Seuil sous la direction de Gilles Mora. Une rétrospective de son oeuvre est présentée en janvier 2002 à l’Hôtel de Sully, Mission du patrimoine photographique. En 2006, un ensemble de photographies d’Hervé rentre dans les collections du Musée d’art moderne de la ville de Paris.
Lucien Hervé décéde à Paris le 26 juin 2007.
En 2010 – 2011, une salle lui est consacrée durant plusieurs mois dans les collections permanentes du Centre Pompidou, suite à la donation faite par Judith Hervé.
Expositions personnelles
- 1951 : Una Città, due architetture, Domus, Milan
- 1958 : Image de l’architecture, architecture de l’image, centre Kodak, Paris
- 1963 : Langage de l’architecture, Musée des Arts Décoratifs, Paris
- 1964 : Architecture paysanne, antique et moderne, Bibliothèque Nationale, Paris
- 1966 : Le Corbusier, Musée des Arts Décoratifs, Paris
- 1967 : Le Beau court la Rue, Maison de la culture, Amiens
- 1969 : Le Beau court la Rue, Abbaye de Royaumont
- 1980 : Les Hongrois, Espace Canon, Paris
- 1985 : Lucien Hervé, Galerie municipale du Château d’eau, Toulouse
- 1985 : La perception de l’architecture, Rencontres Internationales de la photographie, Musée Réattu, Arles
- 1988 : Rétrospective Lucien Hervé, Grande halle de la Villette, Mois de la Photo, Paris
- 1989 : La tour Eiffel, Musée de l’Élysée, Lausanne
- 1991 : Lucien Hervé : Le Paris de l’après-guerre. Galeries de la FNAC, Paris, Bruxelles…
- 1992 : Essence du fragment. Institut Néerlandais d’Architecture, Rotterdam
- 1993 : Le Corbusier : ombre et lumière, Galerie Camera Obscura, Paris
- 1994 : Lucien Hervé – Capitales d’empires, Galerie Camera Obscura, Paris
- 1997 : 1938 – 1962 Tirages d’époque, Galerie Camera Obscura, Paris
- 1998 : Lucien Hervé, Gallery 292, New York
- 1998 : Le Corbusier by Lucien Hervé, Michael Hoppen Photography, Londres
- 1999 : Lucien Hervé – Architecture de l’ombre / Le beau court la rue
- Rencontres Internationales de la photographie, Abbaye de Montmajour, Arles
- 2000 : PSQF .Galerie Camera Obscura, Paris
- L’appartement. Galerie du Jour Agnès B, Paris
- 2002 : Lucien Hervé – Rétrospective à l’Hôtel de Sully, Mission du patrimoine photographique.
- «Less is more» De l’épure à l’abstraction, tirages d’époque.Galerie Camera Obscura
- 2003 : Lucien Hervé – haus der photographie, Hambourg, Allemagne
- 2005 : Lucien Hervé, l’oeil de l’architecte – CIVA, Bruxelles
- 2007 : Lucien Hervé + Le Corbusier, Galerie Taisei, Tokyo
- Le Corbusier – Lucien Hervé, Construction / Composition .Fondation Le Corbusier, Paris
- Lucien Hervé, Rétrospective .Galerie Camera Obscura, Paris
- 2010 : Donation Lucien Hervé. Centre Georges Pompidou
- Il aurait cent ans et quelle modernité .Galerie Agnès B, Paris.
- Lucien Hervé 100 . Musée des Beaux-Arts, Budapest, Hongrie
- 2011 : Lucien Hervé / VIVANTS, Maison Robert Doisneau, Gentilly
- Contacts – Galerie Camera Obscura
Récompenses et titres
- 1985 : médaille de la ville d’Arles
- 1988 : Mention spéciale du jury du mois de la photo à Paris.
- 1992 : Chevalier de la Légion d’honneur
- 1993 : Médaille des Arts Plastiques
- 1994 : Chevalier des Arts et des Lettres
- 2000 : Grand Prix de photographie de la Ville de Paris
- 2001 : Membre de l’Académie des Arts et des Lettres « Széchenyi »
[Visuel : Portrait de Lucien Hervé. Auteur : Lucien Hervé © Judith Elkan. Licence Creative Commons Paternité – Partage des conditions initiales à l’identique 3.0 Unported, 2.5 Générique, 2.0 Générique et 1.0 Générique]
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