Les Enfants du soleil de Maxime Gorki, mis en scène par Côme de Bellescize au Théâtre 13
Seize personnages et autant de trajectoires : le scientifique expérimente et délaisse sa femme que son peintre d’ami d’enfance tente de séduire. Son ouvrier bat la sienne, finalement emportée par le choléra. Le vétérinaire soigne les bêtes qui valent mieux que les hommes et, puisque la sœur quasi schizophrène du chimiste ne veut pas l’épouser, il se résout à ce qu’Hamlet n’est pas parvenu à accomplir seul. La domestique échappe au trottoir en épousant un vieillard, la vieille bonne regrette avec entêtement le monde de la générale, et le propriétaire capitalise.
Note d’auteur
La société que dessine Gorki n’est paradoxalement pas structurée par une opposition de classe traditionnelle. Chacun vit enfermé dans une bulle. La relation du chimiste et de son ouvrier résume cette ambiguïté : ils sont les plus lointains et pourtant seuls à se reconnaître. Protassov est un révolutionnaire de la pensée et un incapable des relations humaines et sociales. Lorsque l’on attend un soulèvement aux revendications sociales, on assiste à une émeute grotesque et sauvage.
Gorki brouille les pistes de lecture des Enfants du soleil. La pièce est politique tout en ne résidant pas dans la confrontation sociale mais dans un propos métaphorique ; elle s’ouvre sur une expérience qui déborde lorsqu’elle est en ébullition, et se résume dans cette image : les propos poétiques et politiques sont indissociables, et la scène met l’humanité à l’expérience.
Note de mise en scène
Rumeur de pandémie, tensions sociales… les parallèles entre Les Enfants du soleil et l’actualité sont si évidents qu’il nous paraît nécessaire, impératif d’interroger notre monde avec cette pièce. A tous les niveaux, politique, social et philosophique, Les Enfants du soleil nous poussent à poser la question inépuisable, la question mère du théâtre : Qu’est-ce que ça veut dire de vivre ensemble ?
J’entends souvent des comparaisons entre Gorki et Tchekhov. Mais si les univers des deux auteurs se ressemblent, la structure, le ton et les modes de relation des Enfants di soleil sont radicalement différents de ce que l’on trouve dans les pièces de Tchekhov.
Brutalité, confrontation, urgence : à l’image de Protssov le chimiste, qui travaille sur l’acide cyanhydrique, si Tchekhov est dans l’érosion, Gorki est dans le corrosif.
Les Enfants du soleil
Dès le 3 novembre 2009
Avec : Michel Baladi, Sabrina Bus, Jonathan Fussi, Vincent Joncquez, Eléonore Joncquez-Simon, Gaël Marhic, Sydney Ali Mehelleb, Teddy Melis, Alix Poisson, Nathalie Radot, Colette Venhard
Mise en scène : Côme de Bellescize
Assistante à la mise en scène : Louise Loubrieu
Scénographe : Sigolène de Chassy
Création lumière : Thomas Costerg
Compositeur : Yannick Paget
Théâtre 13
103A Boulevard Auguste Blanqui
75013 Paris
Réservations au 01 45 88 62 22
Métro : Glacière
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