Les Enfants du Paradis – La Cinémathèque
La façade du théâtre des Funambules, où trône la silhouette de Deburau, est reconstruite. De la caméra de Marcel Carné aux dessins d’Alexandre Trauner, en passant par les costumes du film, les tableaux de Kisling et Van Dongen, les gouaches de Mayo, les affiches et les photographies de tournage, laissez-vous entraîner dans le Paris Romantique de Prévert et Carné…
Ce triomphe de la grande « qualité française » – avant que celle-ci ne s’étiole et ne soit remplacée par la Nouvelle vague – est un film sur l’amour fou, les rapports entre le théâtre et le cinéma, la scène et la rue. Bon nombre de séquences mythiques sont gravées dans la mémoire collective. « Je donnerai tous mes films pour avoir réalisé Les Enfants du Paradis », aurait dit François Truffaut.
Un chef-d’oeuvre romantique
Ce chef-d’oeuvre romantique est d’abord une création personnelle : celle d’un poète, Jacques Prévert, amoureux du vieux Paris, du théâtre et du boulevard du Crime. Puis Les Enfants du Paradis est devenu une oeuvre collective, réalisée par une équipe technique et artistique hors pair : Marcel Carné (le « Karajan de l’écran » selon Arletty) aux commandes, Roger Hubert à la caméra, Alexandre Trauner et Léon Barsacq aux décors, Joseph Kosma et Maurice Thiriet à la musique (orchestrée par Charles Munch), le peintre Mayo aux costumes…
D’inoubliables interprètes incarnent des personnages à la puissante personnalité : Arletty – « On m’appelle Garance… » – trouve là son meilleur rôle au cinéma, malgré les difficultés personnelles qu’elle rencontre alors. Jean-Louis Barrault, qui exerce la pantomime depuis les années 1930, fait revivre magnifiquement Deburau. Doté de la même truculence et appétit de vivre que l’original, Pierre Brasseur incarne l’acteur Frédérick Lemaître. Maria Casarès fait ses débuts en tremblant, terrifiée par Marcel Carné qui la tyrannise. Tous les autres comédiens brillent, de Gaston Modot à Louis Salou, en passant par Pierre Renoir, Fabien Loris et Jane Marken. Prévert a ciselé pour eux des répliques étincelantes qui fusent comme des feux d’artifice. Lacenaire, interprété par Marcel Herrand avec une ressemblance saisissante, est d’ailleurs un miroir du scénariste : il confie par exemple qu’il est en train d’écrire « un petit acte plein de gaieté et de mélancolie.
Deux êtres qui s’aiment, se perdent, se retrouvent et se perdent à nouveau » – c’est exactement l’histoire des Enfants du Paradis.
Un tournage complexe
La réalisation de cette oeuvre majeure, à la fois populaire et raffinée, s’est faite en pleine Occupation et dans les plus grandes difficultés. André Paulvé produit le film, du moins à ses débuts. Le tournage, long, ruineux et complexe, mené en plusieurs endroits différents (aux studios de la Victorine à Nice, aux studios Pathé de Paris et de Joinville), s’interrompt brutalement en septembre 1943, en raison du départ des premiers financiers italiens. Les immenses décors de Trauner et Barsacq construits à la Victorine, représentant le boulevard du Temple, sont laissés à l’abandon. En octobre 1943, la société Pathé reprend heureusement la production. Mais Carné fait durer le tournage, espérant sortir son film à la Libération. De toute façon, le travail est ralenti par les circonstances : alertes aériennes, pénurie d’électricité et de matière première… La pellicule, denrée rare, provient parfois du marché noir. Certains intervenants juifs et anti-vichystes (Trauner, Kosma) travaillent dans la clandestinité. L’acteur halluciné Robert Le Vigan, antisémite notoire, s’enfuit. Le tournage, originellement, devait durer quatre mois : Les Enfants du Paradis aura finalement engendré deux ans de travail et englouti un budget colossal. Il est présenté en deux époques le 9 mars 1945 dans une France libérée. Le film est un triomphe et son succès ne s’est jamais démenti depuis.
Des documents remarquables sur le film La Cinémathèque française a la chance de posséder dans ses collections un ensemble remarquable de documents sur ce chef-d’oeuvre. Ce fonds a été constitué dès les années 1940, grâce à l’amitié qui liait les frères Jacques et Pierre Prévert et Henri Langlois. Il a été enrichi en 2009 par l’acquisition de la collection personnelle de Marcel Carné et par le don en 2010, par Eugénie Bachelot-Prévert, du scénario original manuscrit de Jacques Prévert.
La Fondation Jérôme Seydoux-Pathé conserve de son côté un vaste fonds d’archives et de documents précieux : affiches, dessins, photographies, matériels publicitaires, costumes, appareils, scénarios, correspondances, maquettes, rushes, ainsi que des archives de production. Pathé a restauré avec soin, tout récemment, ce film culte. Il est donc possible, aujourd’hui, de retracer pour la première fois dans une exposition la genèse et l’aventure de ce film universel. Le rideau s’ouvre sur le boulevard du Crime à Paris, vers les années 1830… La façade du théâtre des Funambules, où trône la silhouette de Deburau, est reconstruite. De la caméra de Marcel Carné aux dessins de Trauner, en passant par les costumes du film, les tableaux de Kisling et Van Dongen, les gouaches de Mayo, les affiches et les photographies de tournage, laissez-vous entraîner dans le Paris Romantique de Prévert et Carné…
Laurent Mannoni et Marianne de Fleury
Les Enfants du Paradis
Du 24 octobre 2012 au 27 janvier 2013
Du lundi au samedi (sauf fermeture mardi) : de 12h à 19h, nocturne le jeudi jusqu’à 22h.
Dimanche : de 10h à 20h
Tarifs : 10€* – Tarif Réduit 8€* – Moins de 18 ans : 5€* – Forfait Atout Prix ou Carte Cinétudiant : 7€ – Libre Pass Accès libre
* Bénéficiaires tarifs réduits moins de 26 ans, demandeurs d’emplois, retraités, Rmistes
Visite guidée tous les samedis et dimanches à 16h : 12€* – Visite LSF un dimanche par mois à 11h30 : 5€50
Une nouvelle balade architecturale « Du boulevard du Crime au Grand Paris » : deux dimanches par mois
Grâce au soutien de la Fondation Pierre Bergé – Yves Saint Laurent, mécène de l’exposition et de Neuflize OBC et Groupama, Grands mécènes de la Cinémathèque française.
Une exposition produite par La Cinémathèque française.
Réalisée en partenariat avec la Fondation Jérôme Seydoux-Pathé et Pathé.
La Cinémathèque française
51, rue de Bercy
75012 Paris
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