L’Ennemi de la classe – drame de Rok Bicek
L’Ennemi de la classe De Rok Bicek Avec Igor Samobor, Natasa Barbara Gracner et Tjasa Zeleznik Durée : 112 min. |
Sortie le 4 mars 2015 L’ennemi de la classe : quand l’école devient un champ de bataille. À l’arrivée de leur professeur principal remplaçant, une classe de sympathiques lycéens se trouve confrontée à une discipline accrue et à un enseignement plus austère. Ce professeur d’allemand concentre vite toutes les critiques. Les élèves mènent ouvertement la fronde. La tension monte, et quand une jeune fille de la classe se suicide, la responsabilité du professeur parait indiscutable aux yeux de ses camarades. L’escalade des provocations ne fait alors que commencer, laissant les autres enseignants dépassés par les événements et les élèves face à toutes leurs violentes contradictions. [embedyt] https://www.youtube.com/watch?v=Mambwt9I6U0[/embedyt] Entretien avec Rok Bicek Cette histoire s’inspire d’événements réels dont j’ai été le témoin au lycée, quand une élève de terminale s’est suicidée. S’en est suivi une révolte spontanée de ses camarades contre le système éducatif et contre les professeurs. Tout est retombé après une semaine. Les lycéens rebelles n’avaient pas d’adversaire clairement défini, car il n’y avait personne à accuser directement de la mort de leur camarade. Les bougies dans les escaliers de l’établissement, la lecture d’un manifeste à la radio du lycée et le boycott des cours étaient devenus le moyen de laisser libre cours à toutes leurs frustrations personnelles. C’est cet épisode qui m’a inspiré, dix ans après. En faisant des recherches plus précises sur ces événements, j’ai découvert beaucoup de choses sur les relations entre les protagonistes, sur les tensions qui existaient entre eux à l’époque. Cela m’adonné un cadre solide pour l’histoire que je voulais raconter, ainsi qu’un matériau de base pour la plupart des scènes du film. Une rébellion La véritable raison pour laquelle la jeune fille met fin à ses jours ne m’intéresse pas. Ce n’est qu’un élément déclencheur qui lance toute l’histoire. Ce qui m’intéresse, c’est le fonctionnement des relations entre les élèves, leur façon d’instrumentaliser une tragédie personnelle pour faire monter leur rébellion, et la facilité avec laquelle ils accusent un professeur. Les élèves de la classe s’unissent, ils se constituent en groupe autour d’une seule idée, mais quand le système vacille, ils se mettent à se disputer entre eux. C’est un scénario habituel dans les révolutions, qui ont besoin d’un ennemi commun pour souder le groupe. Dès que l’ennemi est dominé et le but atteint, le groupe se disloque. Personnages et interprètes Le personnage du professeur est inspiré de mon prof de maths au lycée. Il était très exigeant et, naturellement, particulièrement détesté parmi les élèves. Pourtant, quand je parle de lui avec mes anciens camarades de classe, la plupart d’entre nous le jugeons positivement. Ce que je sais en mathématiques, je le tiens en grande partie de lui, quand il nous expliquait que ce qui détermine un graphique, c’est avant tout sa fonction. «Si vous êtes chirurgien aux urgences, nous disait-il, vous devez très rapidement déduire, à partir de quelques symptômes, ce qui va mal chez le patient, avant de le mettre sur une table d’opération et de lui ouvrir le ventre». Ce prof de maths n’était pas de ceux qui se montrent autoritaires sans raison. Au contraire, comme le personnage de Robert Zupan, il voulait nous enseigner comment réfléchir et nous préparer à la vie. Un long processus J’ai souvent discuté de l’histoire avec les jeunes comédiens. J’écoutais leurs points de vue, d’abord sur les grands sujets qu’évoque le film. Et puis on a parlé de nos expériences vécues. Ils ont alors commencé à prendre position vis-à-vis de leur personnage. J’avais envie que nous explorions toutes les relations personnelles de nos neuf personnages entre eux. En commençant par ce qu’ils pensaient des autres, ce qu’ils en disaient ou ce qu’ils décidaient de taire. En répétition, il était nécessaire que chacun sache bien tous les sentiments et de tous les souvenirs qu’il avait refoulé. Si vous voulez que les acteurs réagissent avec justesse, il faut qu’ils aient conscience de ces sentiments et de ces expériences. Il était donc primordial d’établir une grande confiance à l’intérieur du groupe. Les souvenirs personnels qu’ils ont partagés avec moi m’ont permis de susciter chez eux les réactions dont j’avais besoin pendant le tournage. Plusieurs parmi eux m’ont détesté pour ça ! Ils n’auraient pas accepté s’ils avaient su ce que je leur réservais. Un fossé entre les générations Je crois que le cinéma doit traiter de sujets de société qui parlent à la fois du local et du monde au sens large. Dans L’Ennemi de la classe, on a le microcosme d’une classe d’élèves de lycée, un âge où on est particulièrement vulnérable. Ils sont alors, consciemment ou pas, très sensibles à tout ce qu’il leur arrive, à tout ce qui se passe autour d’eux. Cette révolte d’élèves contre le système scolaire incarné par un prof sévère, c’est le miroir d’une insatisfaction plus générale dans toute une société qui encourage les gens à prendre n’importe quelle raison, justifiée ou pas, pour se rebeller contre les normes sociales établies. Dans ces conditions extrêmes, le film met le doigt sur un fossé entre générations. Les circonstances tragiques exacerbent ce fossé. Il y a rupture de communication. En fait, Robert Zupan propose quelque chose d’extraordinaire : il va analyser la tragédie que vit sa classe par le sujet de son cours. Tout son propos se base sur la vie et les écrits de Thomas Mann. Il choisit le sujet du devoir très méticuleusement. Il sait bien que la réaction des élèves ne sera sans doute pas favorable, mais il tente le coup, parce qu’il espère stimuler et réveiller quelque chose chez ses élèves. Et ça marche : Mojca le comprend bien. Il n’y a pas que les lycéens d’aujourd’hui qui ont changé. Les professeurs aussi ne sont plus comme ceux d’avant. En préparant le tournage, j’ai fait l’expérience de ce que c’est que d’être de l’autre côté. Pendant deux ans j’ai enseigné dans un collège slovène, où j’étais considéré comme un des professeurs les plus exigeants. Je n’étais pas comme Robert Zupan, je ne permettais pas de parole démocratique en classe, jusqu’à un certain point. Nous avions des cours de pratique cinématographique, tournage et montage, dans des studios modernes. Dans de telles conditions pratiques, on pouvait tout faire. Mais on n’arrivait qu’à produire un bulletin météo. Je ne savais pas comment les motiver. Je leur demandais ce qui les intéressait. Je n’arrêtais pas de leur dire qu’ils avaient à leur disposition du matériel bien meilleur que celui que j’avais dans mon école de cinéma. Je leur disais que moi, au collège, personne ne s’intéressait à ce que j’avais envie de faire… Bref, je me suis surpris à leur parler comme Robert Zupan. Contexte Toutes les nations qui ont été occupées, à un moment ou à un autre, par les Allemands et qui ont des problèmes avec leur jeunesse peuvent se retrouver dans l’Ennemi de la classe. J’ai l’impression que tous les professeurs d’allemand de ces pays-là ont sans doute été traités d’Hitler au moins une fois dans leur carrière… Si Zupan n’avait pas enseigné l’allemand, on ne l’aurait pas comparé à un nazi. Ses cours n’auraient pas été interprétés de la sorte. Ses mots sont pleins de sagesse, mais comme il parle en allemand, il convoque une mémoire ancienne en nous. Le fait qu’il soit professeur de langue nous donne aussi, dans le scénario, beaucoup de possibilités : on peut parler de littérature, de héros de romans, et faire des parallèles. Par sa vie et par son œuvre, Thomas Mann est un choix logique pour le professeur Zupan. Espace Le lycée représente un espace de tension entre l’intime et le collectif, entre l’individu et la société. Et en même temps, les élèves sont réunis dans une classe, qui fonctionne ici comme un protagoniste dans la lutte contre le professeur détesté, celui qui, selon les lycéens, est coupable du suicide de leur camarade. Cette bataille entre la classe et l’enseignant ne peut exister que dans cette arène-là : l’école. [Source texte et visuel : dossier de presse] A découvrir sur Artistik Rezo : |
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