L’artiste ghanéenne Awanle Ayiboro présente sa première exposition “The Abandoned Playground” à la galerie Mathilde Le Coz
Du 13 avril au 13 mai, Awanle Ayiboro Hawa Ali, peintre ghanéenne de 26 ans présente à la galerie Mathilde Le Coz ”The Abandoned Playground” (L’aire de jeux abandonnée) sa toute première exposition personnelle. Au travers d’une quinzaine d’œuvres inédites, l’artiste réécrit, sous le filtre bleu des rêves chargés de spleen et d’espérance, les histoires brisées de ces femmes mariées de force, mariées trop jeunes, mariées avant avoir pu vivre leur vie.
Partant d’une recherche basée sur la collecte de témoignages, l’artiste rembobine le film de la vie de ces femmes victimes de mariages infantiles forcés jusqu’au moment où tout a basculé. Awanle Ayiboro suspend l’action et les saisit de face. La peintre pause ainsi la scène pour que chacun.e puisse prendre conscience de ce qu’il s’y joue. Sous les traits de l’enfant qu’elles étaient autrefois, ce sont bien ces femmes qui nous fixent comme elles semblent s’observer. Ces vigies du passé avertissent en silence. Mais pas seulement : elles montrent la voie.
L’impression vaporeuse diffusée par le camaïeu de bleus et la touche fluide de l’artiste font flotter ces personnages dans un songe apaisant. Awanle Ayiboro répare le passé, reprenant le contrôle des histoires qu’on lui confie. Dans The Mother (2023) la fillette n’est pas donnée en mariage devant son école primaire, elle est raccompagnée chez elle par sa mère.
Dans The Playground (2023) si la petite fille tient bien le bonbon “goro” traditionnellement offert aux familles dans le nord du Ghana lorsqu’un mariage est arrangé, un panneau partiellement tronqué indique “Watch Children” (surveillez vos enfants) – l’artiste somme aux parents de la fillette de la protéger, les incite à arrêter les négociations en cours. Ses peintures stylisées, par la simplification des formes, le cerne noir et l’uniformisation des fonds – non sans rappeler certaines œuvres synthétiques – ont une portée universelle et facilitent l’identification des spectateur.rices. L’artiste s’adresse aux enfants comme à leurs parents, elle appelle la société toute entière à faire changer les mœurs et évoluer les mentalités. Dans sa série de petits formats Career Day Awanle Ayiboro portraiture des petites filles lors de la “journée carrière”, un évènement qui, à l’école primaire, prend la forme d’un jeu de rôle pendant lequel les enfants peuvent s’imaginer adulte dans le métier de leur rêve. Les toiles sont encadrées comme des photos de famille, une exhortation à laisser filles, sœurs, nièces choisir leur avenir.
Pour l’artiste, peindre est un acte d’émancipation, une affirmation de soi pour les autres femmes, l’expression d’une conviction profonde qu’elle espère faire raisonner au plus grand nombre. Elle doit son libre choix et son autodétermination à son pinceau et c’est avec lui qu’elle souhaite sensibiliser sur le problème des mariages forcés en Afrique et dans le monde. À l’inverse de nombreux peintres de la scène européenne de sa génération, le studio d’Awanle Ayiboro n’est pas une tour d’ivoire ou une chambre à soi, il est ancré au cœur de la société. Lessivant ses toiles de bleu, c’est tout un monde de préjugés qu’elle souhaite rincer de traditions inégalitaires et liberticides privant les femmes de vivre leur enfance et de choisir leur avenir, les spoliant d’un principe fondamental des droits humains : la liberté de choisir sa vie.
À propos de Awanle Ayiboro Hawa Ali
Née en 1997 à Nima, près d’Accra au Ghana, Awanle Ayiboro Hawa Ali s’initie à la peinture dans sa communauté et décide à 22 ans de se consacrer pleinement à son art, un art qui au-delà du studio lui permet de s’émanciper et de défendre les droits des femmes. The Abandoned Playground constitue la toute première exposition personnelle de la jeune peintre.
Awanle Ayiboro a déjà participé à de nombreuses expositions de groupe dans le monde entier. Elle fut ainsi présentée à Londres à la maison de vente Phillips lors d’un partenariat Phillips x Artemartis (2022), à Dubaï à la Emergeast Gallery (2022), au Texas (USA) à la Mitochondria Gallery (2022). Cette année, son travail était visible à Accra à Gallery 1957 (2023) et Los Angeles (USA) à Coates & Scarry (2023). L’artiste souhaite aussi développer sa pratique dans l’art de la performance, pour toucher une plus large audience, et participera en fin d’année à la résidence “The Crit Lab” à Tamale (Ghana). Ses œuvres ont intégré plusieurs collections notables : Yuichi Kawasaki (Japon), Lester Marks (USA) et Artemartis (Ghana). L’artiste vit et travaille à Accra (Ghana).
[Source : communiqué de presse]
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