L’art contemporain en Afrique : une nouvelle cartographie des espaces
L’art contemporain en Afrique : une nouvelle cartographie des espaces Le 2 juillet 2014
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Le 2 juillet 2014
À la fin de l’année 2013, le musée de Ouidah a ouvert au Bénin. Il a été précédé de peu par Bandjoun Station, au Cameroun, sous la houlette de Barthélémy Toguo. Ces deux inaugurations, un musée et un centre d’artiste, soulignent la dynamique actuelle de création de lieux d’expositions dédiés à l’art contemporain sur le continent africain. Dans un entretien accordé à Art Media Agency en février dernier, Marie-Cécile Zinsou, à la tête du musée de Ouidah et de la Fondation Zinsou à l’origine de ce projet, est revenue sur cette multiplication des initiatives sur le continent africain. Elle note : c’est « assez nouveau comme phénomène, cela n’existait pas il y a huit ans. » Et d’ajouter : « on est vraiment au début de quelque chose. » Le constat est le même pour Bill Kouléany, plasticienne et fondatrice des Ateliers Sahm au Congo. Contactée par AMA, elle explique : « Les initiatives privées se multiplient. Le paysage s’enrichit de différentes formes d’expressions. » Une des explications de cette profusion est l’absence d’action gouvernementale et de tradition d’institutions muséales dédiées à l’art contemporain en Afrique subsaharienne, contrairement au dynamisme européen, asiatique ou américain, par exemple. Il existe des musées, comme le Musée National du Mali et la National Gallery of Zimbabwe, mais, ils se consacrent principalement à leur culture nationale, étudiée sur une vaste période. Dans certains autres cas, des actions sont bien menées, mais elles ne sont pas pérennes. Face à cette carence, des lieux ont ouvert petit à petit sur le continent, sous l’impulsion de différents acteurs : artistes, fondations, ou encore particuliers, tels que les curateurs, les opérateurs culturels ou encore les collectionneurs. Ils se donnent pour objectifs de présenter, d’accroître la visibilité et de promouvoir une offre artistique foisonnante et variée. Pour certains, l’idée sous-jacente est également de garder cette production sur le continent et de permettre aux artistes africains d’y exposer. Au-delà de la présentation de la création contemporaine, ces lieux cherchent également à soutenir la création locale et souvent à l’insérer à la vie de la cité. Il est néanmoins important d’apporter une nuance préliminaire : la situation demeure très différente au sein des cinquante-quatre pays qui composent le continent. L’Afrique du Sud et le Nigeria, qui tend à devenir le premier marché d’art contemporain d’Afrique Subsaharienne, font encore figure d’exceptions. Mais, des pays comme le Bénin, le Cameroun, ou encore le Sénégal, font également preuve de vitalité et de créativité pour trouver des solutions et accompagner l’épanouissement de leur création artistique. AMA s’est penché cette semaine sur ce cocktail énergisant et la cartographie qui se dessine à l’heure actuelle. Sous l’impulsion des artistes La dynamique des lieux d’expositions d’art contemporain en Afrique Subsaharienne est portée par l’émergence et la pérennisation de lieux d’artistes. Face au manque de structures adéquates pour présenter leurs œuvres, mais aussi pour les accompagner dans leurs démarches, les artistes ont décidé de répondre eux-mêmes à leurs besoins et de créer leurs propres espaces. En effet, ces lieux sont couplés de structures d’accompagnement à destination des créateurs et prodiguent formations, workshops et séminaires, qui favorisent également le dialogue et l’émulation entre les artistes. Bandjoun Station Les Ateliers Sahm Unik-Lieu Les exemples de ces initiatives d’artistes ne manquent pas, pour le seul Bénin il est aussi possible de mentionner l’Espace Tchif ouvert en 2007, mais aussi Kin ArtStudio de Vitshois en République Démocratique du Congo, ou encore, Les Rencontres d’Art de Lubumbashi de Sammy Balodji. Néanmoins, les créateurs ne sont pas les seuls à venir enrichir la proposition de lieux dédiés à l’art contemporain. Les fondations sont également force de proposition dans ce domaine et mettent en place des initiatives ambitieuses. Sous l’impulsion des fondations Musée de Ouidah Fondation Donwahi Des initiatives individuelles Le désir de doter le continent africain de lieux d’expositions dédiés à l’art contemporain s’étend à un troisième groupe d’acteurs aux profils divers : les particuliers. Il est possible de noter ici les collectionneurs, mais aussi les curateurs ou autres professionnels du milieu de l’art et de la culture. Les collectionneurs à l’initiative du Zeitz MOCAA Parmi les projets des collectionneurs, l’une des initiatives phares est la construction du Zeitz Museum of Contemporary Art Africa, Zeitz MOCAA, annoncée en novembre dernier. L’institution devrait ouvrir d’ici la fin de l’année 2016 et présenter la Zeitz Collection. Jochen Zeitz, collectionneur allemand et ancien président de Puma, met ses œuvres à disposition de l’institution muséale. En outre, il financera les frais de fonctionnement et fournira des fonds qui seront destinés à l’acquisition d’œuvres. Vaste de plus de 9.000 m², le MOCAA sera installé dans un ancien silo à grain, haut de cinquante-sept mètres et situé sur le front de mer. Mark Coetzee, le conservateur de la collection Zeitz et ancien directeur de la collection de la famille Rubell de Miami, a été nommé directeur général et conservateur en chef. Professionnels de l’art CCA (Center of Contemporary Art) de Lagos Raw Material Company Art Twenty One Outre les espaces culturels indépendants et les lieux d’artistes évoqués dans ce dossier, les galeries ne demeurent pas moins des espaces à prendre en considération. L’Afrique du Sud compte Stevenson, Goodman et la Gallery Momo. Le Nigéria est également doté d’un maillage dense de galeries. D’autres exemples peuvent être cités sur l’ensemble du continent, plus sporadiques. Par exemple, à Abidjan, Cécile Fakhoury a ouvert sa galerie en 2012. La Galerie Peter Herrmann s’est, quant à elle, implantée au Togo en 2013. Cette multiplication de lieux est un indice de la vitalité de la scène artistique africaine. D’autres éléments viennent compléter ce constat : les nombreuses biennales, foires et autres manifestations dédiées à l’art contemporain, comme Dak’Art qui vient de s’achever, ou encore le Lagos Photo Festival qui ouvrira ses portes en octobre prochain. Néanmoins, des défis restent à relever. Les contraintes financières et la question des subventions restent un enjeu crucial pour la plupart de ces lieux. Bill Kouléany mentionne cette difficulté : « Ces espaces d’exposition, ou plus largement, de discussions, de rencontres et d’échanges œuvrent avec très peu de moyens, mais avec conviction de la nécessité d’investir les lieux. » En outre, la rencontre des œuvres de ces expositions avec le public reste un vaste chantier. Art Media Agency |
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