La Bicyclette rouge
Aurélie Steunou-Guégan (ASG) : Pouvez-vous nous résumer le spectacle La Bicyclette rouge ?
Maëva Grandamme & Léopoldine Patte (MG & LP) : Ce spectacle a pour thème principal le monde rural. Plus précisément, la Corée rurale, encore ancrée dans les traditions ancestrales. La Corée du village de Yahwari et de ses habitants : malicieux grands-pères et grand-mères animés par Kim Dong Hwa dans son manhwa (BD coréenne), La Bicyclette rouge. Le corps de ces agriculteurs a vieilli avec le temps sans pour autant les miner. Ils s’aiment comme à vingt ans et vivent en harmonie avec leur terre. Ces figures universelles apportent un regard nouveau sur la vieillesse et tentent, grâce au support poétique de la marionnette et de la flûte traversière, qui ponctue, chante et donne vie aux différents tableaux des saisons, de nous réconcilier avec une des plus grandes phobies du monde moderne : Vieillir.
Ces aînés vous parlent de leurs enfants partis à la ville laissant derrière eux des campagnes dépeuplées, de leurs fêtes traditionnelles, de la difficile mousson coréenne et du simple bonheur de voir chaque année revenir le printemps.
Un retour à la terre, une histoire d’amour vécue à travers le temps et qui se solde par l’acceptation de laisser partir l’autre avant, malgré les promesses de quitter ce monde main dans la main… Des thèmes qui, finalement, regroupent toutes les cultures et nous invitent à ne pas oublier nos racines.
La Bicyclette rouge est un hymne de gratitude envers la nature et sur ce qu’elle a à nous apprendre. Elle met en valeur l’importance des plaisirs simples.
ASG : D’où vient ce désir de créer ce spectacle toutes les deux ?
MG & LP : La complicité qui nous lie depuis plus de quinze ans a été sans conteste à l’origine de notre désir de travailler ensemble. Nous avons, depuis 2005, partagé de manière informelle des expériences diverses autour de la musique et de la marionnette. Aujourd’hui, un peu plus fortes et ancrées chacune dans notre pratique artistique, nous avons eu envie de travailler autour d’un spectacle conçu spécialement pour ces deux formes d’art.
ASG : Pourquoi avez-vous choisi de croiser les disciplines (manhwa, flûte, marionnettes) et les cultures (Corée et France) ?
MG & LP : Au départ, l’envie d’explorer les possibilités de dialogues pluridisciplinaires. Nous avons cherché des textes théâtraux liant musique et marionnettes sans trouver notre bonheur. C’est finalement Léopoldine, passionnée par ses études de Coréen qui a trouvé, au rayon BD de la bibliothèque des Flandres, ce petit bijou qu’est La Bicyclette rouge. Nous n’avions pas pensé à la possibilité de travailler sur un texte issu d’une bande dessinée, mais nous avons été véritablement séduites par la poésie et l’humour de cette œuvre. Nous l’avons tout de suite adoptée.
De plus, cela nous offrait la possibilité de collaborer avec la Corée du Sud, pays peu connu et peu représenté en France, mais porteur d’une importante culture marionnettique.
Nous sommes convaincues de la richesse des échanges interculturels car nous pensons que cela enrichit le regard et nous offre la possibilité de faire grandir notre recherche artistique.
Le spectacle, comme un retour à la nature, est rythmé par les saisons et donne à voir plusieurs aspects de la culture coréenne.
Pour cela, nous souhaitions absolument travailler en collaboration avec un metteur en scène et des plasticiens coréens car nous avions d’abord besoin de leur regard pour une « lecture » fidèle de la péninsule.
A présent, nous aimerions présenter le travail plastique formidable de la Cie Neige d’or, qui crée sans cesse des prototypes nouveaux de marionnettes et grâce à qui nous avons pu construire nos chers paysans coréens avec une technique de manipulation inédite.
ASG : Comment s’est déroulée la première résidence de création à Séoul ?
MG & LP : Le premier objectif de cette résidence a été d’élargir notre vision et nous permettre de mieux comprendre ce texte coréen et sa culture. En voyage artistique à l’autre bout du monde, nous avons rencontré d’autres promeneurs passionnés à Séoul : Yoo Jin-woo, metteur en scène. Il a étudié puis enseigné l’art du mouvement à l’école internationale de Jacques Lecoq. Il transmet maintenant le savoir de ce grand maître en Corée, dans son école PAM Theatre. La Compagnie de marionnettes Keumseol, représentée par Song Eun-kyeong, Kim Sin-gi et Choi Min-soo.
Cette première résidence d’un mois et demi, à Séoul, s’est déroulée en deux étapes :
Tout d’abord le travail dramaturgique et l’écriture d’un texte théâtral, librement inspiré du manhwa de Kim Dong Hwa. Nous avons rencontré l’auteur lors de notre séjour. Et lui avons présenté notre projet auquel il a donné son soutien, agréablement surpris par notre désir de rendre hommage à son œuvre. Il nous a, par ailleurs, accordé les droits d’exploitation jusqu’à ce que le projet grandisse plus amplement.
Ensuite, le travail plastique : la fabrication des marionnettes dans l’atelier de la Cie Keumseol. C’est ainsi qu’une nouvelle équipe est née et que La Bicyclette rouge est devenue notre projet commun.
ASG : Où en est la production de ce spectacle aujourd’hui ?
MG & LP : Toute l’équipe de La Bicyclette rouge se réunira dans notre antenne ariégeoise cet été. Du 3 au 21 septembre 2012, nous serons en résidence à l’Espace Périphérique (avec le soutien d’Espace Périphérique – Ville de Paris – Parc de la Villette). Nous avons le soutien de la Cie Pupella-Noguès, qui nous propose une résidence de création suivie d’une présentation du spectacle en avant première dans leur lieu dédié à la marionnette, Odradek (31). Et en ce moment, nous travaillons sur la diffusion et la recherche de subventions.
Aurélie Steunou-Guégan
La Bicyclette rouge
Spectacle en répétition
Avec : Yoo Jin-woo , Maëva Grandamme, Léopoldine Patte & Song Eun-kyeong
Un Excursus
www.unexcursus.fr
[Photos : © Léo Delafontaine]
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