I Know What I Like : interview avec la fondatrice Sabina Andron
I Know What I Like : interview avec la fondatrice Sabina Andron
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Le 25 septembre 2014
I Know What I Like est une organisation qui propose des événements sociaux gratuits pour les amateurs d’art à travers des visites de galeries, des balades artistiques et des discussions avec des artistes donnant un aperçu de la scène artistique londonienne. Fondée par João Correia, un consultant en art installé à São Paulo, l’organisation est gérée depuis Londres par Sabina Andron, qui effectue sa thèse à la Bartlett School of Architecture, University College. Alors qu’elle a récemment tenu son 200e événement, I Know What I Like donne du 3 au 9 octobre 2014 une première exposition collective réunissant des artistes membres de sa communauté. AMA a pu s’entretenir avec Sabina, qui revient pour nous sur l’histoire de cette aventure originale, et nous présente cette galerie alternative. Comment le projet est-il né ? Au départ, il a été lancé sous la forme d’un club de lecture, ce que João faisait avec ses amis où ils lisaient des livres d’art et en discutaient ensuite ensemble. Cela a vraiment commencé comme ça. Ils ont pu regrouper plus de membres et ont commencé à organiser des débats autour du monde de l’art. Ils se réunissaient une fois par mois et chaque membre devait faire une présentation de son artiste préféré. J’ai vécu à Manchester, avant de m’installer à Londres et c’est comme ça que j’ai pu m’impliquer dans ce groupe. C’est là que les choses ont commencé, se sont développées et ont évolué. Pouvez-vous nous présenter le concept ? Nous sommes des facilitateurs d’art, qui est un terme que j’aime parce qu’il regroupe toutes nos activités. Je suis très intéressée par le côté éducatif, parce que je pense que les gens devraient être exposés à l’art dans tous ces environnements, c’est pour cela que nous visitons des galeries, nous organisons des marches pour analyser le Street art, nous visitons aussi des ateliers. Permettre aux personnes d’exprimer leurs opinions est une grande partie de la mission de ce groupe, c’est pour cela que l’initiative est baptisée I Know What I Like. Souvent les gens ont tendance à être timides quand il s’agit d’exprimer ce qu’ils pensent en public sur l’art et ils ont peur d’exprimer une idée maladroite, alors ils se taisent. Je veux permettre à ces gens de surmonter cet aspect. Il y aussi une partie du concept qui consiste à permettre aux gens de présenter leurs créations, c’est là où le terme de facilitateur d’art prend tout son sens, parce que nous voulons faciliter l’accès à l’art, d’où qu’il vienne. Notre but est de permettre aux artistes de notre groupe d’avoir une plate forme au sein de laquelle ils peuvent présenter leur production, la rendre visible. Quels aspects particuliers d’I Know What I Like permettent de différencier ce que vous faites d’une visite traditionnelle d’un atelier, d’un musée ou d’une galerie ? Premièrement, je dirais que notre champs d’action est quelque chose qui nous différencie parce que nous tendons à aller vers des galeries très différentes. Nous sommes intéressés par les West End galleries mais quand nous allons également dans les plus petites galeries de l’Est. Nous faisons du Street art et des marches pour observer les graffitis ; je fais une thèse sur ce sujet, ce qui nourrit l’activité du groupe. Nous encourageons par ailleurs les gens à se dévoiler, je veux que les membres parlent plus que moi, ou plus qu’un guide de galerie le ferait. Le format est plus celui d’un séminaire, ainsi l’atmosphère est plus décontractée et engageante, plutôt que d’aller dans une exposition et d’écouter simplement un guide. Quel genre de sujets abordez-vous dans vos discussions ? Cela dépend de l’exposition que nous visitons. Je sélectionne les expositions que nous explorons avec une variété de sujets en tête, et surtout en pensant à leur pertinence par rapport aux besoins du groupe, qui sont divers. Si le propriétaire de la galerie le souhaite, nous commençons par leur offrir une présentation, sinon, je fais des recherches en amont pour expliquer au groupe ce que nous pouvons voir, et ainsi, nous essayons de donner sens à tout cela ensemble. L’une des choses les plus amusantes, est de montrer à quel point l’art est riche avant que nous puissions voir le prix réel attribué. Nous avons souvent des conclusions très différents à ce propos. Le niveau de connaissance des membres est-il homogène ? Certains d’entre eux sont banquiers, des professions donc non-créatives, et de l’autre côté nous avons des designers et des artistes. C’est alors intéressant de voir le dialogue généré par ce mélange. Il y a différentes raisons de rejoindre ce groupe, certains appréciant de participer à une activité extra professionnelle à caractère social, voulant sortir de leur routine, tandis que d’autres nous voient comme un moyen de se créer un réseau professionnel. Ainsi j’essaie d’être attentive à tous ces aspects et de faire en sorte que ça vaille la peine pour tout le monde ! Comment choisissez-vous les galeries et les artistes sur lesquels vous vous focalisez ? J’ai quelques galeries favorites sur lesquelles je garde un œil, nous ne faisons pas de grands musées comme la Tate ou des galeries comme Saatchi parce que c’est important de conserver l’unité du groupe et quand nous allons dans ces lieux, les gens adoptent leur propre rythme, et de ce fait, nous nous perdons ! Alors nous essayons de nous cantonner aux plus petites galeries. Je fais quelques vernissages mais pas tant que ça, car c’est davantage de la socialisation que de l’intérêt pour l’art ! Quand je suis réellement intéressée par une exposition je vais programmer une visite de mon côté en amont. J’essaie d’équilibrer entre les deux rives, et de rester attentive à ce qui se passe. Ce sont les priorités, mais je ne me suis pas fixée de règles. Nous allons publier en ligne des avis sur les événements, les membres n’hésitent pas à être francs quand ils n’apprécient pas ce qu’ils voient ! Quelle est votre capacité d’accueil pour chaque événement ? Certaines fois je limite le nombre de personnes, d’autres fois ce sont les galeries qui le demandent lors d’événements privés. Mais en principe, j’essaie de rendre cela le plus libre et accessible possible. Pour chaque événement, nous avons une moyenne de 8/10 personnes, et un maximum de trente personnes, ce qui peut rendre les choses difficiles puisque je cherche à connaître chacun d’entre eux et à mettre certains en contact si quelque chose les intéresse particulièrement. Le mois d’octobre marque la première exposition collective, pouvez-vous nous en parler ? Le groupe d’exposition est maintenant lancé depuis un certain temps, et il y a beaucoup d’artistes dans le groupe dont je connais le travail. Je voulais faire quelque chose pour eux, et le fait de voir beaucoup d’expositions et beaucoup de galeries, cela nous a donné un petit aperçu de la manière d’organiser cela. C’est la première fois que j’organise quelque chose de ce type, mais je suis très heureuse de la manière dont cela prend forme. J’ai demandé aux artistes de me présenter un de leur travaux et j’ai reçu quelques réponses qui étaient satisfaisantes. J’ai décidé d’organiser un événement dans une galerie située à Old Street, Curious Duke. L’espace est géré par Eleni Duke, que j’ai rencontrée à plusieurs reprises lors de visites de groupe. Elle a décidé de soutenir le projet. L’exposition collective regroupera quinze artistes, que j’ai choisis, qui présentent des peintures, des collages, des photographies ou des œuvres faisant intervenir plusieurs médias mais pas de sculpture. Il n’y a pas de thème pour l’exposition, j’ai fait ça consciemment parce que je souhaite que les travaux soient éclectiques et qu’ils puissent répondre à divers intérêts. C’est un bon mélange, et je trouve que nous sommes enfin prêts ! L’exposition ouvre le 2 octobre et se déroulera jusqu’au 9 du même mois. Est-ce que les œuvres sont à vendre ? Oui elles seront à vendre. Ce seront des œuvres abordables, les prix varient entre 70 £ et 3.500 £. La plupart sont des œuvres originales, nous avons aussi quelques gravures d’éditions limitées, mais il était important de ne pas faire une exposition seulement composée de multiples. J’ai l’intention de créer quelques événements lors du déroulement de l’exposition, certains des artistes seront présents, que ce soit lors de la soirée d’ouverture ou pendant la semaine d’exposition. Je ne peux pas en dire plus à l’heure actuelle parce que nous sommes encore en train de finaliser le projet. Alors que vous réalisez une thèse sur ce sujet et que vous avez un regard attentif sur ce genre, quelle vision avez-vous de la scène du street art londonienne ? Concernant le street art qui imprègne les rues, je pense que cela a évolué d’une manière très particulière, et de plus en plus de projets sont commissionnés, la ville est attractive et les artistes ont du temps pour créer dans ces conditions. Les gens peuvent voir évoluer les œuvres, observer le processus de création et les photographier, tout est fait au grand jour. C’est donc considérablement différent du caractère subversif et illégal auxquels les street artistes étaient habitués. Je pense que nous avons besoin d’être défiés par les Street artistes et à cause de cela, la bulle du Street art va éclater. Il faut qu’il y ait de l’innovation. Je ne pense pas que cela va cesser en tant que phénomène culturel, les gens vont continuer à peindre dans les rues, mais en termes artistique, je ne pense pas que cela va durer longtemps en tant que mouvement esthétique, d’autant plus si les street artistes continuent de quitter les rues pour s’exprimer sur des toiles voire dans les musées. Il y a beaucoup de gens, dont la plupart sont des street artistes de la vieille école, qui ne sont pas satisfaits de cette évolution. C’est un sujet bien compliqué ! Par ailleurs, I Know What I Like participe à l’organisation de conférences sur trois jours en décembre intitulées Graffiti Sessions, qui traiteront de ces questions. En collaboration avec UCL, Central Saint Martins, Global Street Art et le Southbank Centre elles réuniront des artistes, des universitaires, des photographes, et d’autres amateurs. Quel est l’avenir d’I Know What I Like ? Je voudrais désormais me concentrer davantage sur l’organisation d’expositions. Cela commencera par l’exposition collective en octobre, qui, je l’espère, sera la première d’une longue série. Du côté des événements, cela continuera à fonctionner comme au début, car ils ont beaucoup de succès, et j’apprécie cet aspect social. Parallèlement à tout cela, j’effectue ma thèse, je dois alors jongler entre ces activités mais quand ce sera fini je pourrai m’investir à plein temps pour mener le projet encore plus loin. Art Média Agency |
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