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Frieze Week : tous les regards du monde de l’art braqués sur Londres

17 novembre 2014
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Frieze Week : tous les regards du monde de l’art braqués sur Londres

Le 16 octobre 2014

Des recherches menées par la National Gallery, publiées sous le titre British Sales 1780-1800: The Rise of the London Art Market [Les Ventes britanniques de 1780 à 1800 : l’avènement du marché de l’art londonien] expliquent comment Londres est devenue la plus grande capitale européenne du marché de l’art en ces termes : « Les bouleversements liés à la Révolution Française ont suscité une profonde redistribution des collections d’art en Europe à la fin du XVIIIe siècle. D’innombrables collections d’une grande importance, à l’image de celle de la famille d’Orléans, ont été dispersées lors de ventes aux enchères. La plupart de ces ventes s’étant tenues dans la capitale britannique, Londres s’est transformée en un puissant marché d’importation, s’établissant rapidement comme le centre névralgique du marché de l’art international. »

Aujourd’hui, malgré l’expansion globale de deux des plus grandes maisons de ventes britanniques, Christie’s et Sotheby’s, Londres conserve sa place de centre international du marché de l’art. La capitale anglaise a certes partagé ce titre avec New York pendant de nombreuses années, mais Sotheby’s a récemment communiqué des chiffres indiquant que la branche londonienne de la maison de vente surpassait par ses activités toutes les autres régions où la société est implantée, qu’il s’agisse de villes américaines, asiatiques d’Europe continentale. Dans le cadre de la Frieze Week — la foire installée à Londres, la Mecque des amoureux de l’art et des galeristes —, AMA revient sur les succès du marché de l’art et de la scène artistique, ainsi que sur les dernières tendances qui dominent la vie culturelle londonienne.

Londres, un point de convergence international

Si New York la talonne de près, et bien que l’on parle abondamment de l’émergence des marchés de l’art à Hong Kong ou à Los Angeles, la ville de Londres reste incontestablement le leader européen du marché de l’art, représentant un total de 77% des ventes. C’est pour cette raison que la galerie Pace, un géant du monde des galeries, une enseigne installée à New York à l’origine, a ouvert le premier de ses espaces londoniens en 2011. « Londres est le carrefour où se rencontrent le monde des affaires internationales et le monde de l’art — le point de convergence où les artistes, les conservateurs, les critiques, les directeurs de musées, les directeurs artistiques et les collectionneurs du monde entier s’assemblent afin d’échanger des idées, visiter des expositions et acquérir des œuvres d’art », commente la directrice Mollie Dent-Brocklehurst. « Être présent à Londres permet à Pace de mieux soutenir les artistes travaillant en Europe. »

Le fait que la ville compte le plus grand pourcentage de résidents usagers des musées et visiteurs des galeries est sans doute l’un des facteurs favorisant la vitalité du marché londonien. L’idée de culturedness, c’est-à-dire de sophistication ou de raffinement culturel, est ancrée dans la conscience collective des Londoniens, confirmant ainsi le statut de Londres en tant que pôle culturel. Par ailleurs, il est aussi intéressant de remarquer que c’est à Londres que l’on dénombre le plus grand nombre d’étudiants inscrits dans des institutions spécialisées dans l’art ou le design, ainsi que 173 musées et 875 galeries qui ont tous vu leur fréquentation augmenter au fil des derniers mois, malgré les températures inhabituellement douces de l’été passé.

Luigi Mazzoleni, de la prestigieuse galerie turinoise Mazzoleni, a fait part de ses impressions à AMA, à quelques jours de l’ouverture d’un nouvel espace à Londres, laquelle s’est tenue lundi. « Nous ne sommes pas ici uniquement, car Londres est l’un des meilleurs marchés au monde, mais aussi, car cette ville draine des visiteurs des quatre coins du monde, en provenance d’Asie, d’Europe ou d’Amérique du Sud… On est entouré d’une multitude de musées incroyables qui accordent une place prépondérante à l’art. » Ce rayonnement international s’est vérifié lors des ventes de printemps de Sotheby’s à Londres, auxquelles ont pris part 1.800 participants venus de 72 pays différents. « Londres génère parmi les meilleures expositions, qui voyagent plus tard dans d’autres villes. C’est aussi l’un des centres financiers les plus importants au monde, ce qui en fait la patrie de certains des plus importants collectionneurs », confirme Mollie Dent-Brocklehurst.

Un nouvel engouement pour l’art italien

Il est clair que Londres tient une place de choix en tant que principale capitale du monde de l’art, mais quels sont les courants qui inspirent actuellement cette ville amoureuse des arts ? La capitale accueille Frieze et Frieze Masters, la première hébergeant 162 des plus célèbres galeries d’art contemporain, en provenance de 25 pays, tandis que la seconde rassemble 127 galeries pour sa troisième édition. Les deux salons jouissent d’un immense succès — la directrice Victoria Siddall a notamment confié au Financial Times que le marchand d’art new-yorkais Otto Naumann allait exposer un Rembrandt, estimé à 50 M$, prouvant par là la confiance qu’il témoigne à la foire Frieze. La Pace Gallery affirme « qu’il est très important pour la galerie de prendre part et d’être vu à la Frieze et à la Frieze Masters ». Gagnant chaque année en ampleur et en influence, la foire Frieze exerce son ascendant sur les autres activités de la scène londonienne pendant toute la durée de la manifestation. Ainsi les maisons de vente Christie’s, Sotheby’s et Phillips ont toutes établi leur programme de ventes de telle sorte qu’elles coïncident avec la foire, afin de profiter de la présence des collectionneurs internationaux ayant fait le pèlerinage jusqu’à Londres. Phillips notamment a organisé une vente de jeunes artistes émergents en réponse à la Frieze London, consacrée essentiellement à l’art contemporain.

Il semblerait en outre que l’art italien soit à l’honneur à Londres actuellement, avec deux grandes ventes d’art italien post-Seconde Guerre mondiale organisées durant la Frieze, dont la vente Sotheby’s intitulée « The Italian Sale » le 17 octobre, où 49 lots seront mis aux enchères. Au total, ces ventes devraient réaliser un chiffre de 50 M£. Luigi Mazzoleni est particulièrement enthousiaste vis-à-vis de cette tendance : « L’art italien de l’après-guerre est plus populaire que jamais, ce dont témoignent les résultats des ventes. C’est une bonne opportunité pour nous d’exposer d’autres artistes italiens. » Mollie Dent-Brocklehurst acquiesce : « On assiste clairement à la réapparition de l’Arte Povera, et l’on voit se développer un fort intérêt pour les artistes de ce mouvement à Londres aujourd’hui » ; Pace participe également à ce renouveau du goût pour l’art italien : « C’est un honneur pour nous que de travailler avec la Fondation Merz et de présenter au public une exposition dédiée à Mario Merz, un des fondateurs de l’Arte Povera », explique-t-elle. De nombreuses raisons peuvent être évoquées pour expliquer l’engouement pour l’art italien à Londres, continue Mollie Dent-Brocklehurst. Elle attribue le succès du genre à « dOCUMENTA (13), une exposition organisée par Carolyn Christov-Bakargiev, spécialiste de l’Arte Povera, et d’autres expositions dédiées à des artistes de l’Arte Povera », tandis que Lorenzo Ronchini, l’Italien fondateur de la Ronchini Gallery London suggère que cet engouement serait dû aux tendances des collectionneurs eux-mêmes. Les collectionneurs italiens sont inquiétés par les restrictions liées aux taxes frappant les œuvres d’art, ainsi que par le marché de l’art italien, moins dynamique. De fait, les artistes italiens sont plus accessibles sur le marché anglais, et ils s’y épanouissent.

L’art africain en première ligne

L’art italien n’est pas le seul à faire des vagues à Londres, car l’art africain s’y assure une présence grandissante. Le retour de 1:54, la deuxième édition de la foire d’art contemporain africain qui se tient en parallèle à la Frieze, en est peut-être le meilleur exemple. Une autre exposition, déjà ouverte au public et accessible durant toute la semaine de la Frieze, est l’exposition inaugurale de la collection de Theo Danjuma. Ce jeune collectionneur présente des œuvres d’art contemporain, les faisant cohabiter avec des objets d’art africain avec une prédilection pour le Nigéria, son pays d’origine. Theo Dajuma livre son analyse des tendances actuelles : « Je pense qu’un certain intérêt a été éveillé pour le monde de l’art africain, mais je n’irais pas jusqu’à dire qu’il s’agit réellement de l’avènement des arts africains ; quand on part de zéro, même la plus infime évolution est une nette amélioration ! »

La fondatrice du 1:54, Touria El Glaoui, est de ceux qui ont à cœur d’offrir une plus grande visibilité possible à l’art africain. Elle est convaincue que Londres est le meilleur point de départ possible, grâce à son « ouverture d’esprit » caractéristique et à « la culture internationale » qui y prospère. Les collectionneurs commencent en outre à réaliser l’importance de l’art africain. Touria El Glaoui explique enfin : « C’était bien notre intention d’exposer pendant la Frieze Week, car nous comptons exploiter à notre avantage la présence de tous les plus grands collectionneurs à Londres, afin d’attirer leur attention. C’est pour nous un atout considérable. »

L’influence prépondérante de la Frieze Week

Alors que la Frieze Week décline ses manifestations, Frieze London, Frieze Masters, Frieze Sculpture Park (rassemblant des œuvres sélectionnées dans les deux volets de la foire), Frieze Masters Talks et Frieze Talks, mais encore Frieze Film, Frieze Live et de nombreux prix, de nombreux conservateurs ou galeristes adoptent un point de vue similaire à celui de Touria El Glaoui, considérant cette semaine comme une opportunité pour obtenir davantage de visibilité pour leurs expositions, foires, ventes aux enchères, etc., au moment même où le monde entier dirige son attention vers Londres. Neuf foires, sept ventes aux enchères et des centaines de galeries se réclament toutes de la marque Frieze Week. Ainsi, un conseiller artistique a confié au New York Times : « La Frieze Week dépasse le nom de Frieze, elle touche aussi à la périphérie. L’ethos de cette semaine est de se consacrer aux artistes émergents », faisant de cette manifestation la plateforme idéale à laquelle peuvent se rattacher tous ces éléments satellites.

La foire du Q-Park à Cavendish Square « We Could Not Agree » (Nous n’étions pas d’accord) représente une alternative gratuite aux principaux événements de la Frieze. Cette foire présente les œuvres de plus de cent artistes, exposées dans les 2.000 m² du Q-Park ; tandis qu’à la Battersea Affordable Art Fair, on peut acheter des œuvres dont les prix vont de 100 à 5.000 £. Parmi les temps forts des expositions proposées par les galeries, nous avons noté : « The Journey of the Underdog » à la galerie Knight Webb, présentant dix œuvres à grande échelle de l’artiste camerounais Adjani Okpu-Egbe et « Schizophrenogenesis » à la galerie Paul Stolper, où l’on est confronté aux œuvres de l’artiste anglais le plus scandaleux du moment Damien Hirst ; tandis que la Royal Academy met à l’honneur les œuvres du maître italien Giovanni Battista Moroni.

Art Media Agency

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