Exposition “Présence Africaine” au musée du Quai Branly du 10 Novembre 2009 au 31 Janvier 2010
PRESENTATION DE L’EXPOSITION PAR SARAH FRIOUX-SALGAS, Commissaire de l’exposition
La revue littéraire et culturelle « Présence Africaine », héritière des « négritudes » d’avant la seconde guerre mondiale, est fondée à Paris en 1947 par l’intellectuel sénégalais Alioune Diop. Un texte inaugural « Niam n’goura ou la raison d’être de Présence Africaine » explique clairement les objectifs de la revue : Publier des études africanistes sur la culture et la civilisation noire, publier des « textes africains », passer en revue les « œuvres d’art ou de pensée concernant le monde noir ».
Dans les premiers numéros, son fondateur Alioune Diop s’entoure de toutes les personnalités intéressées par les mondes noirs : ethnologues, anthropologues (Marcel Griaule, Georges Balandier, Théodore Monod, Michel Leiris, Paul Rivet), écrivains, philosophes (Aimé Césaire, Léopold Sédar Senghor, Jean-Paul Sartre, André Gide, Albert Camus, Richard Wright) mais aussi galeristes et critiques d’art (Charles Ratton, William Fagg). La part d’auteurs français diminue après les cinq premiers numéros.
Si, en 1947, Alioune Diop écrit « cette revue ne se place sous l’obédience d’aucune idéologie philosophique et politique », en 1955, il redéfinit clairement ses objectifs : « Tous les articles seront publiés sous réserve que leur tenue s’y prête, qu’ils concernent l’Afrique, qu’ils ne trahissent ni notre volonté antiraciste, anticolonialiste, ni notre solidarité des peuples colonisés ».
« Présence africaine » a été un outil de diffusion qui a permis aux intellectuels et aux écrivains noirs de revendiquer leurs identités culturelles et historiques que le contexte colonial niait ou « exotisait ». Cette revue fut donc à la fois un mouvement, un réseau d’échanges et une tribune permettant aux différents courants d’idées liés aux « mondes noirs » de s’exprimer. « Présence Africaine » a été également l’un des acteurs qui a permis très tôt de constituer la bibliothèque des textes fondateurs de l’anticolonialisme en France (Aimé Césaire, Jean-Paul Sartre, Frantz Fanon, …).
Cette exposition a pour ambition de montrer le rôle majeur joué par « Présence Africaine » dans l’histoire politique et culturelle des intellectuels noirs francophones, anglophones et lusophones des années 1950-1960. Elle explore et analyse son rôle de catalyseur durant les 20 premières années de son existence. En effet, c’est au cours de cette période que « Présence Africaine » fonde une maison d’édition (1949), produit le film Les Statues meurent aussi d’Alain Resnais et Chris Marker (1953), créée une association culturelle (1956), organise 2 Congrès d’écrivains et d’artistes noirs (1956 et 1959) et participe activement à la mise en œuvre du « premier festival des arts nègres » de Dakar (1966). Aujourd’hui, une exposition consacrée à l’histoire de « Présence Africaine » permet de révéler à un large public le rôle méconnu des intellectuels africains, antillais, malgaches et noirs américains dans la vie intellectuelle française et mondiale. Elle est également l’occasion de rendre hommage à Alioune Diop, une grande personnalité trop peu connue en France, dont le centième anniversaire de la naissance sera célébré en 2010 par le Sénégal.
Remerciements à l’équipe de « Présence Africaine » (Yandé Christiane Diop, Suzanne Diop, Françoise Balogun, Romuald Fonkoua) qui a collaboré à l’organisation de cette exposition.
Sarah Frioux-Salgas, Commissaire de l’exposition
PORTRAIT D’ALIOUNE DIOP
Alioune Diop est né à Saint-Louis (Sénégal) le 10 janvier 1910. Musulman, il fréquente l’école coranique, mais ses tantes maternelles l’initient à la lecture de la Bible. Il passe son baccalauréat en 1931 et, grâce à une bourse, il étudie les Lettres classiques, d’abord à l’Université d’Alger, puis à celle de Paris. Ces différentes approches culturelles ont certainement contribué à forger l’humanisme et l’ouverture d’esprit qu’on lui connaissait. Il fait aussi l’expérience de plusieurs activités professionnelles, tour à tour enseignant, fonctionnaire de l’AOF (l’Afrique Occidentale Française) et sénateur de la IVe République française. Mais c’est surtout à travers ses talents d’animateur culturel, d’organisateur, de fédérateur qu’il trouve sa voie.
En 1947, il fonde la revue « Présence Africaine », en 1949 la maison d’édition et en 1962, il ouvre la librairie « 25 bis rue des Ecoles ». En 1956, il organise à la Sorbonne le Congrès des écrivains et artistes noirs qui réunit les intellectuels noirs de nombreux pays, soutenus par des écrivains et artistes du monde entier (Picasso, Claude Levi-Strauss…), militant pour l’émancipation des cultures africaines, et en faveur de la décolonisation.
Avec les indépendances qui se succèdent rapidement, Alioune Diop organisera avec Léopold Sédar Senghor le 1er festival mondial des arts nègres en 1966 à Dakar, dans un Sénégal désormais indépendant. Il meurt le 2 mai 1980 à l’âge de 70 ans. Léopold Sédar Senghor lui rend un vibrant hommage, le désignant comme un « Socrate noir », plus soucieux d’accoucher les autres que de produire une œuvre personnelle ambitieuse.
Un prix d’édition africaine Alioune-Diop a été créé en 1995 par l’Organisation internationale de la francophonie. Il est décerné tous les 2 ans à la Foire internationale du livre et du matériel didactique de Dakar (FILDAK). La veuve d’Alioune Diop, Yandé Christiane Diop, poursuit le travaille de son mari, aux côtés de Romuald Fonkoua, Directeur de la publication. « […] Tout m’attirait en lui, son élégance naturelle, sa générosité, sa double culture, sa volonté patiente qui ne redoutait ni les obstacles ni les défis : être catholique bien que fils de lettré musulman, parler à des communautés séparées par les différences, l’inégalité et les discriminations. Nous avons discuté chaque soir, et il fut ainsi mon instituteur. Des visiteurs venaient, des notables, des imams dakarois, des politiciens locaux dont le socialiste Lamine Guèye, des hommes de cultures […] » Georges Balandier, Histoire d’Autres, Stock, 1977, p 51-52 Aimé Césaire, Alioune Diop et Edouard Bass, ancien ambassadeur du Sénégal à Rome, 1959
PRESENCE AFRICAINE
Du 10 Novembre 2009 au 31 Janvier 2010
Musée du Quai Branly
37, quai Branly
75007 – Paris
Métro : Alma Marceau, Iena, Ecole Militaire, Bir Hakeim
Tél : 01 56 61 70 00
mardi, mercredi et dimanche : de 11h à 19h
jeudi, vendredi et samedi : de 11h à 21h
Tarifs : billet Exposition(s) temporaire(s)
billet 7 € (plein tarif) / 5 € (tarif réduit)
billet jumelé (collections permanentes + expositions temporaires)
billet 10 € (plein tarif) / 7 € (tarif réduit)
Articles liés
“Simone de Beauvoir, la liberté à tout prix” : un seule en scène de Brigitte Bladou au Studio Hébertot
Se vouloir libre, c’est vouloir les autres libres… De l’enfant sûre d’elle à l’adolescente insouciante, de la femme indépendante à la femme mûre et engagée qui ose ce que la plupart des autres ont peur de faire : être...
« Les Parallèles » : comédie romantique douce amère sur la difficulté à se rencontrer
À l’heure du speed dating et de la multiplication des sites de rencontres, Alexandre Oppecini imagine une rencontre entre deux êtres que tout oppose, sur le pas d’une porte qui devait s’ouvrir sur une fête de crémaillère avec des...
Découvrez les artistes diplômés du Centre National des Arts du Cirque à La Vilette
Rendez-vous incontournable avec la relève du cirque, ce spectacle sous chapiteau à La Villette est l’occasion de découvrir les artistes tout juste diplômés du CNAC – Centre National des Arts du Cirque. Pour les jeunes talents qui arpentent la...