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Dark Waters – Un film avec Mark Ruffalo et Anne Hathaway

4 février 2020
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Robert Bilott est un avocat spécialisé dans la défense des industries chimiques. Interpellé par un paysan, voisin de sa grand-mère, il va découvrir que la campagne idyllique de son enfance est empoisonnée par une usine du puissant groupe chimique DuPont, premier employeur de la région.

Afin de faire éclater la vérité sur la pollution mortelle due aux rejets toxiques de l’usine, il va risquer sa carrière, sa famille, et même sa propre vie…

Note d’intention du réalisateur

C’est grâce à Mark Ruffalo et à Participant, que le projet Dark Waters m’a été proposé et a vu le jour. Cela ne faisait qu’un an que l’article sidérant de Nathaniel Rich avait été publié dans le New York Times Magazine. Quand je l’ai découvert, j’ai été – comme la plupart des gens – stupéfait et choqué par l’affaire que Rob Bilott, avocat d’affaires pugnace, a révélé bien malgré lui – celle de DuPont et du Teflon.

Ce matériau allait se révéler complexe à fictionnaliser… En attendant, il pointait du doigt les innombrables pratiques malhonnêtes de grandes entreprises qui enfreignaient la loi depuis quelques années – et continuaient de le faire. Des pratiques qui restent d’une terrible actualité sociale et politique. Si l’on songe aussitôt à plusieurs réalisateurs talentueux pour porter ce projet à l’écran, Mark avait pensé à moi sans que je puisse m’expliquer pourquoi.

Ce dont Mark ne pouvait pas se douter, c’est que je suis un grand fan du cinéma de dénonciation. Nous sommes évidemment nombreux à admirer la “trilogie de la paranoïa” signée Alan J. Pakula (et son directeur de la photo Gordon Willis) – Klute, à cause d’un assassinat et Les hommes du président, réalisés dans les années 70 – ou des films des décennies suivantes comme Le mystère Silkwood de Mike Nichols et Révélations de Michael Mann. Mais il y avait un élément dans ces films qui m’a toujours captivé, bien au-delà de la révélation d’un pouvoir dévoyé (personne ne regarde Les hommes du président pour apprendre que Richard Nixon était extrêmement corrompu !). Certes, ces films dénoncent les abus de pouvoir, les intimidations et les manœuvres des puissants pour étouffer des affaires – qu’elles soient liées au monde de l’entreprise, aux grandes industries ou à l’État. D’ailleurs, c’est ce que le spectateur attend de ces films et la notoriété des affaires qu’ils fustigent les précède souvent. Mais en réalité, le cinéma de dénonciation s’attache surtout à monsieur ou à madame- tout-le-monde, à sa trajectoire et aux dangers – d’ordre psychique, émotionnel, voire mortel – que ces individus affrontent quand ils se battent pour faire éclater la vérité.

Dans Dark Waters, c’est le personnage de Rob Bilott, héros malgré lui par excellence, qui l’incarne : quand il découvre les pratiques de la société DuPont, toutes ses convictions sur le monde de l’entreprise sont ébranlées. Méfiant, refusant les partis- pris et foncièrement sur la réserve par nature, Rob Bilott, comme la plupart des lanceurs d’alerte, est déjà un personnage solitaire au début de l’histoire. Et comme souvent, les événements qui se déroulent ne font que renforcer cet isolement. Cet isolement qui le stigmatise se retrouve en miroir chez Wilbur Tennant, catalyseur du récit, et se propage, par effet de capillarité, aux parties prenantes à l’affaire issues de classes sociales différentes – affectant la sphère politique, la vie de famille et le rapport à la religion. Ce qui en souligne la singulière et insidieuse contagion. Malgré ces liens, quand on affronte ces puissantes entités, on tend à voir ses horizons se fermer et ses facultés mises à mal. Un film comme Dark Waters décrit – dans le plus grand détail – une telle rupture.

Je me suis entouré de formidables collaborateurs et nous avons tourné en décors naturels à Cincinnati et en Virginie-Occidentale, et le plus souvent par un hiver très rigoureux. Nous avons pu filmer sur les lieux mêmes de l’action et intégrer à notre équipe d’acteurs des comédiens fantastiques recrutés sur place. Cette spécificité géographique et temporelle se retrouve dans le langage visuel : nous avons eu recours à une approche quasi-documentaire pour créer une unité entre les lieux de tournage, très contrastés, et souligner leur interdépendance. Ce qui en ressort est un paysage américain complexe, parfois contradictoire, mais où le pouvoir économique est clairement identifié – même s’il est aussi confronté à ses propres limites.

C’est souvent grâce à ces contradictions, ou à ces faits improbables, que l’affaire Wilbur Tennant et le recours collectif qui s’en est suivi ont pu être portés devant la justice. L’improbabilité qu’un avocat d’affaires travaillant pour l’industrie chimique change de camp et s’attaque à un géant du secteur comme DuPont est justement ce qui a procuré à Rob le temps et les ressources nécessaires pour gagner. Sans le soutien de Tom Terp et du cabinet Taft Law, cela ne se serait jamais produit. De même, sans la ténacité courageuse d’un Wilbur Tennant, ou d’un Joe Kiger, sans les décisions en matière de suivi médical en Virginie- Occidentale, ou la stratégie destinée à rapprocher le système judiciaire de l’Ohio à celui de Virginie-Occidentale, ou encore le soutien et la sérénité que Wilbur a reçus de sa femme Sarah, on a du mal à imaginer que ces résultats incroyables aient pu être obtenus ! Et le monde n’aurait jamais appris l’existence des dangers liés aux “substances chimiques persistantes”, comme le fameux PFOA (acide perfluorooctanoïque) omniprésent dans notre quotidien.

Et pourtant, ces films s’achèvent rarement sur une issue prédictible (après tout, rappelons-nous qu’ils s’inspirent de faits réels) et Dark Waters ne fait pas exception. Plutôt que de se conclure sur une victoire qui fait du bien, il montre que le combat se poursuit quotidiennement et qu’il permet de vivre, quoiqu’imparfaitement, entre connaissance et désespoir. C’est ainsi qu’il nous maintient en haleine.

Dans Dark Waters, ce qui au départ se présente comme une contamination régionale et nationale de l’air et de l’eau se transforme en une contamination mondiale du système sanguin – marquant ainsi notre interdépendance en tant qu’habitants de la planète, sinon en tant que victimes des systèmes capitalistes et idéologiques. Mais dans cette épouvantable catastrophe provoquée par l’homme, nous sommes inéluctablement liés par un sort commun et c’est notre conscience de ce qui s’est passé qui nous lie les uns aux autres, comme Rob à Wilbur, comme Taft Law à Parkersburg (en Virginie-Occidentale), dans ce qui est à la fois un combat sans fin pour la justice et pour notre propre survie.

[Source : communiqué de presse]

À lire également sur Artistik Rezo : De La Cravate à Dark Waters : 4 films à voir en février 2020 par Lucile Bellan

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