Dan Colen – Out of the Blue, Into the Black – Gagosian Gallery
Le titre de l’exposition est un mélange de deux chansons de Neil Young issues de l’album « Rust Never Sleeps » de 1979 : Hey Hey, My My (Into the Black) qui fait l’ouverture de l’album et My My, Hey Hey (Out of the Blue) qui clôt l’album. Young écrit cette ligne célèbre « It’s better to burn out than to fade away » (Mieux vaut brûler franchement que s’éteindre à petit feu) en référence à ses peurs personnelles de devenir obsolète, faisant à l’époque écho aux décès d’Elvis Presley et de Sid Vicious. Cette même ligne avait été évoquée des années plus tard, par Kurt Cobain dans sa lettre de suicide.
Dan Colen a utilisé ces paroles de manière similaire afin d’évoquer une peur de l’érosion de l’influence, pour montrer les façons dont la mort infléchit la célébration, et pour nous rappeler ce à quoi nous essayons de nous raccrocher au moment même où cela nous échappe. Colen a commencé ses peintures « confetti » après la mort de son ami Dash Snow en 2009. À la manière de l’ancienne coutume païenne qui consistait à jeter des confettis sur les jeunes mariés pour leur souhaiter une union fructueuse, ces peintures sont des exercices joyeux et magiques aux qualités précieuses et pourtant momentanées. Les peintures de confetti existent à la fois sur papier Mylar confetti collé sur la toile, et dans ce cas présent, en tant que peintures à l’ huile trompe l’œil.
A ce jour, Colen a utilisé le trompe-l’œil non seulement pour simuler, mais aussi pour élucider l’absurdité et l’insuffisance de l’illusion. La qualité commémorative de ces séries est mise en évidence par son titre « Moments Like This Never Last » ; titre que Colen a emprunté à Snow, qui l’avait lui-même emprunté du groupe de rock américain The Misfits, lors de sa deuxième exposition monographique à New York en 2005. L’installation dans la galerie rappelle les projets extrêmes de Colen intitulés « NEST » — réalisés avec Snow — qui consiste à mettre en lambeaux des bottins de téléphone et à déchirer des oreillers en plume afin de créer des environnements aux allures d’orgies. Mais ici, le concept espiègle et houleux prend une tournure noire et morbide.
L’espace principal, entièrement recouvert de goudron et de plumes, devient une doublure du corps social où la souffrance et l’humiliation sont infligées par la tradition vernaculaire puissante de la foule. Ainsi la vie exubérante et le tumulte jubilant des nids (nests) est immobilisée à jamais, et le spectateur -‐ tel un oiseau pris au piège dans une nappe de pétrole mortelle, se trouve encerclé par un espace où les plumes et les feuilles de papier qui jadis tourbillonnaient, sont bel et bien collées sur des surfaces noircies, visqueuses et goudronnées.
Pour la sculpture, My Old Friend the Blues, Colen crée un sanctuaire délabré, ambigu et sciemment maladroit. L’objet conservé, comme dans un sanctuaire, est un ensemble de ferrailles mal tendu, des parties de bicyclettes bleues ramassées dans les poubelles des rues de New York. Ces morcellements, enchainés à des revêtements et des panneaux, sont devenus tellement familiers dans le paysage urbain des rues qu’on ne les remarque plus, jusqu’à ce qu’elles soient libérées et ravivées en tant qu’art, leur couleur suggérant (par association de culture populaire) le retour inévitable de la mélancolie. Ainsi, en épousant le pouvoir latent des matériaux et leurs effets ambivalents, Colen promulgue, une croyance héritée — tempérée de scepticisme — en des procédés réceptifs et transformatifs selon laquelle l’art peut être cultivé par ceux qui sont privés de droits civiques et ceux que l’on néglige.
Dan Colen est né dans le New Jersey en 1979. En 2001, il reçoit un BFA en Peinture de la Rhode Island School of Design. Parmi ses expositions on compte la Whitney Biennial en 2006, à New York; « USA Today », à la Royal Academy, à Londres (2006); « Defamation of Character », au PS1 Contemporary Art Center, Long Island, New York (2006); « Fantastic Politics », au National Museum of Art, Architecture and Design, à Oslo (2006); « Skin Fruit: Selection from the Dakis Joannou Collection », au New Museum, à New York (2010); « Peanuts », au Astrup Fearnley Museum à Oslo (2011); et « In Living Color » à la FLAG Art Foundation, New York.
Dan Colen – Out of the Blue, Into the Black
Du 12 juin au 28 juillet 2012
Du mardi au samedi, de 11h à 19h
Gagosian Gallery
4, rue de Ponthieu
75008 Paris
Articles liés
“Chaque vie est une histoire” : une double exposition événement au Palais de la Porte Dorée
Depuis le 8 novembre, le Palais de la Porte Dorée accueille une double exposition inédite, “Chaque vie est une histoire”, qui investit pour la première fois l’ensemble du Palais, de ses espaces historiques au Musée national de l’histoire de...
“Les Imitatueurs” à retrouver au Théâtre des Deux Ânes
Tout le monde en prend pour son grade, à commencer par le couple Macron dans un sketch désormais culte, sans oublier Mélenchon, Le Pen, les médias (Laurent Ruquier & Léa Salamé, CNews…), le cinéma, la chanson française (Goldman, Sanson,...
La danseuse étoile Marie-Agnès Gillot dans “For Gods Only” au Théâtre du Rond Point
Le chorégraphe Olivier Dubois répond une nouvelle fois à l’appel du Sacre. Après l’opus conçu pour Germaine Acogny en 2014, il poursuit, avec For Gods Only, sa collection de Sacre(s) du printemps qu’il confie cette fois-ci à la danseuse...