Super 8
Eté 1979. Dans une petite ville tranquille des Etats-Unis, un groupe de gamins décide de réaliser un film de zombie pour un concours de cinéastes amateurs. Mais alors qu’ils sont en plein tournage, à minuit, sur un quai de gare désert, se produit un accident spectaculaire : une camionnette entre en collision avec un train de convoi militaire, qui explose face caméra. Or, c’est justement la présence de cette caméra qui change la donne : à leur insu les enfants ont filmé bien plus que ce qu’ils auraient pu imaginer.
C’est ainsi, en lui proposant d’assister au tournage de cet amusant petit film de morts-vivants (qui n’est pas sans faire penser aux bricolages d’Ed Wood), que JJ Abrams emmène le spectateur dans son propre récit. Le procédé de mise en abime aurait pu paraître superficiel s’il n’avait été aussi superbement maîtrisé. Car Super 8 réussit le pourtant ô combien difficile équilibre entre le divertissement spectaculaire hollywoodien et l’hommage cinéphile aux maîtres. S’il a été produit par Steven Spielberg, ce n’est pas un hasard : les références aux débuts de Spielberg sont omniprésentes. Impossible de ne pas songer à ET ou Rencontres du Troisième Type.
La série B est également ressuscitée, notamment parce que Joe, Charles, Martin, Cary, Preston et Alice tournent un film de zombie, allant jusqu’à y appeler l’usine chimique, théâtre d’horribles événements, la « Romero Factory » ; mais plus encore parce que JJ Abrams se réapproprie habilement tous les codes propres au genre. Que ce soient les autorités débordées par l’avalanche de phénomènes inexplicables qui exacerbent l’hostilité des citoyens, l’armée qui conspire, ou la scène de l’attaque dans la station-service isolée : un certain nombre de repères balisent malicieusement le chemin du cinéphile averti. L’intelligence incontestable de JJ Abrams est pourtant de doser jusque dans l’image cette atmosphère vieillotte, ultra-référencée, et la contemporanéité qui donne au film une dimension réellement spectaculaire. L’image et les effets spéciaux de toute beauté époustouflent, sans toutefois rompre avec le charme désuet de l’ensemble et n’en rendent cette incroyable histoire que plus crédible.
De ce que les enfants découvrent dans l’accident de train, on ne dira rien de plus, afin de ne pas gâcher la surprise, mais il faut tout-de-même souligner le côté novateur du parti pris final, quoi qu’encore une fois il ne soit pas sans rappeler le cinéma du jeune Steven Spielberg. Il n’est cependant pas du tout celui auquel le récent cinéma hollywoodien nous a habitués en la matière, – celui d’un Roland Emmerich, par exemple. Ce qui, peut-être, provient du regard que JJ Abrams semble porter sur son film, de par sa façon de dépeindre ses protagonistes et aspirants-cinéastes. À la fois tendre et humoristique, compréhensif et très ironique, JJ Abrams semble avoir à cœur de réaliser plus qu’un énième film de science-fiction tape-à-l’œil, et évoque des thématiques fortes, telles que la mort, le deuil, l’oppression, le désir de liberté, sans alourdir son propos par de vains discours ou en créant une atmosphère trop sombre.
Finalement, si dans Super 8 la réalisation de JJ Abrams rappelle tant le Spielberg des débuts, c’est sans doute parce que comme les grands noms du Nouvel Hollywood, il parvient ici à montrer qu’un bon metteur en scène, créatif et connaisseur, peut très bien réaliser un film d’auteur qui soit aussi un grand spectacle pop-corn, où le spectateur en prend à la fois plein les mirettes et les neurones. Une leçon de cinéma toujours bien agréable à recevoir.
Raphaëlle Chargois
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Super 8
De JJ Abrams
Avec Elle Fanning, Kyle Chandler et Joel Courtney
Sortie le 3 août 2011
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