Elysium – film de science fiction avec Matt Damon
La vision d’un monde apocalyptique ou post-apocalyptique a toujours eu les faveurs du genre science-fiction, qu’il soit décliné en littérature, au cinéma, en jeu vidéo ou dans toute autre forme d’art discursif. Mais il semble que l’éclosion de la crise économique a particulièrement favorisé la propagation de ce thème au cœur de nombreuses œuvres de fiction, SF ou pas SF en fin de compte. C’est ainsi que l’on a pu voir émerger des films aussi différents que Les Derniers Jours du Monde des frères Larrieu (2008), Melancholia de Lars Van Trier, Batman – The Dark Knight Rises de Christopher Nolan (2012) ou encore le navrant remake Total Recall – Mémoires Programmées de Len Wiseman (2012), qui tous présentent à leur manière un regard sur des mondes en décadence, courants à leurs pertes.
Elysium, blockbuster SF situé dans un univers résolument futuriste, mais jouant tout-de-même sa crédibilité dans une certaine proximité temporelle – l’action se déroule en 2154 – s’inscrit dans la même veine. La Terre a été rongée par « les fléaux de la pollution et la surpopulation ». Une sorte de vieux fantasme SF a alors été réalisé : l’humanité a investi l’espace, envoyant une colonie vivre dans un idyllique satellite orbital nommé « Elysium ». A ce fantasme de conquête spatiale – qu’on pourrait peut-être même percevoir comme un fantasme de conquête de l’infini par la finitude humaine – s’ajoute celui, complémentaire, de la maîtrise du temps ; sur Elysium, on a inventé une machine, la Metbox, qui permet de guérir toutes les maladies ; de rendre la jeunesse aux corps usés par les années et ainsi, de se rapprocher de l’immortalité. (Dans une séquence grotesque, on verra même la Metbox régénérer la tête et la cervelle à moitié arrachées du « méchant » du film…)
Sur cette base narrative peu originale – mais qui aurait pu être traitée avec créativité – est placardé un propos pseudo-politique franchement manichéen : la Terre est devenue une sorte de bidonville géant, où les pauvres se meurent tandis que les nantis se font dorer la pilule sur Elysium. Un président fantoche n’a que peu d’emprise sur les agissements de la cruelle ministre de la défense, qui au nom de la sécurité et du principe de précaution, n’hésite pas à massacrer allègrement tout ce qui s’approche un peu trop près de son paradis suspendu. (On notera toutefois avec un certain amusement que, comme lors de certaines manifestations récentes en France, le principe invoqué par ce vilain personnage pour justifier ses sanglantes actions est la protection des enfants coûte que coûte. Mais il est trop impossible que cela soit expressément conçu comme une allusion à ces mouvements protestataires pour que cela s’avère un tantinet subversif et donc réellement jouissif, hélas.)
Une fois ces éléments de décor posés, le scénario se met en place selon un schéma ultra-balisé. Un petit escroc va mettre sa vie en péril pour sauver l’humanité et rétablir la justice. Pour l’amour de son amie d’enfance, retrouvée totalement par hasard (sic) au début du film, il va sacrifier son destin individuel au profit du bien universel. On nous fera même le coup de la petite fille cancéreuse pour mieux nous tirer des larmes devant le dilemme du héros, contraint de choisir entre sa propre vie et celle de l’enfant de sa bien-aimée. Les « méchants », ingrédient indispensable de toute production manichéenne – dont ils relèvent parfois le niveau s’ils sont bien croqués, ce qui n’est pas le cas ici – sont caricaturaux à souhait, du mercenaire sans foi ni loi (Sharlto Cooper, ridicule) à la ministre sadique et sans éthique (Jodie Foster, toute en rictus et en sourcils froncés). Quelques exosquelettes sont implantés, histoire d’exploiter encore un peu plus le potentiel spectaculaire du genre science-fiction tout en renforçant le degré de force virile du héros (bien que celui-ci soit en phase terminale après avoir été injustement exposé à des radiations mortelles). Après tout, pourquoi faire dans la demi-mesure ; le raisonnement adopté étant apparemment : « Plus c’est gros, plus ça passe. »
Le problème semble toutefois résider dans ce constat que n’est pas Paul Verhoeven ou Philip K. Dick qui veut. Par bien des aspects, cet Elysium lorgne vers des intrigues-phares tels que celles du Total Recall de Verhoeven. Cependant, pour un film dans lequel tous les personnages aspirent à s’élever vers un Eden sur orbite, il reste tristement au ras du sol. L’interprétation flemmarde des acteurs en est moins responsable que l’absence d’ambition de la mise en scène et du scénario de Neill Blonkamp, qui se contente d’exposer quelques idées banales sans jamais en rechercher la profondeur, ni visuellement ni intellectuellement.
Au final, il ne reste donc qu’un vain objet filmique, occupant certes l’œil et l’esprit du spectateur pendant 109 minutes, mais ne lui apportant rien.
Raphaëlle Chargois
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Elysium
De Neill Blomkamp
Avec Matt Damon, Jodie Foster, Sharlto Copley
Durée : 110 min.
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– les films à voir en 2013
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