Week-end – film d’Andrew Haigh
En français, le mot anglophone Weekend (fin de la semaine) s’écrit le plus souvent de façon séparée avec trait d’union (Week-end). Suite à la réforme orthographique de 1990, il nous est pourtant possible de l’écrire à l’anglaise. Cette date marque aussi un tournant dans les œuvres cinématographiques traitant de l’homosexualité. C’est lors de cette décennie que des films comme The Living-End de Gregg Araki, My own private Idaho de Gus Van Sant ou encore Poison de Todd Haynes font leur apparition. L’homosexualité n’y est plus sous-entendue, mais à l’inverse clairement exprimée et revendiquée.
Depuis, les œuvres se sont multipliées offrant de grands films en la matière (A Single Man, J’ai tué ma mère, C.R.A.Z.Y., Eyes Wide Open…) jusqu’à l’arrivée du film Week-end d’Andrew Haigh.
Le film se démarque des autres par son approche sociale et sa pudicité. Russel est un jeune solitaire esseulé en quête d’amour. Il passe le plus clair de son temps dans un HLM sordide de la province anglaise. Un soir, il rencontre Glen. Une amitié se nouera alors entre les deux hommes le temps d’un weekend.
Avec ce pitch à la Ken Loach ou à la Mike Leigh, Andrew Haigh conte une histoire d’amour à la réalité sociale quelque peu effrayante, où la surveillance, les préjugés et les apparences sont maîtres face aux sentiments enfouis au fond de chacun. Malgré un récit quelque peu bateau, Haigh réussit à faire de cette simple histoire une réflexion sincère et pudique sur la condition homosexuelle actuelle.
On remarquera surtout que celle-ci n’a pas foncièrement changé au fil des ans. Certes, comme le film l’explique si bien, la communauté a réussi à s’émanciper comme il se doit, à l’inverse de certaines personnes encore trop enfermées et dans l’incapacité de s’exprimer. C’est ici le cas de Russel dont on apprendra au fur et à mesure de ses dialogues avec Glen la véritable histoire.
Discrète, la caméra de Andrew Haigh réussit à prendre suffisamment de recul face à ses acteurs tout en captant l’essence même de leur rencontre et de leur amour naissant. Qu’elle soit placée au loin dans la rue, au plus prêt dans l’appartement et entre les deux dans sa séquence finale, elle réussit à capter en toute discrétion les sentiments et émotions naissants des personnages. Sans aucune vulgarité, les rapports sexuels sont de même montrés avec une retenue rare à l’écran, à la limite de l’érotisme.
Est-ce le début ou la fin d’une relation, on ne le saura pas trop. Entre le sentiment d’une semaine qui se termine et celle d’une autre qui commence, le film navigue constamment pour délivrer, avec talent, un message certes classique, mais que d’autres n’arrivent pas forcément à accomplir avec autant d’universalité. A ce titre, le film est destiné pour tous, quelque soit sa sexualité.
Edouard Brane (Twitter: Cinedouard)
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The London Critics’ Circle 2012 (19 janvier)
- 1 prix : The Virgin Atlantic Award Breakthrough British Filmmaker
- Nomination : Meilleur acteur britannique
The British Independent Film Awards 2011 (4 décembre)
- 2 prix : Prix du meilleur espoir et Prix de la meilleure production
London Film Festival 2011 (du 12 au 27 octobre)
- Nomination : New British Cinema
Festival de films Chéries-Chéris 2011 (du 7 au 16 octobre)
- Nominations : Grand prix – Longs métrages et Prix du jury
Festival du Film britannique de Dinard 2011 (du 5 au 9 octobre)
- 1 prix : Prix du coup de coeur – Mention spéciale
- Nominations : Hitchcock d’Or et Hitchcock d’Argent du Public
Week-end
D’Andrew Haigh
Avec Tom Cullen (Russell), Chris New (Glen), Jonathan Race (Jamie), Laura Freeman (Jill), Loretto Murray (Cathy), Jonathan B. Wright (Johnny), Sarah Churm (Helen) et Joe Doherty (Justin)
Durée : 96 min.
Sortie le 28 mars 2012
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